Synopsis : Après s'être tenu prudemment à l'écart pendant des années, Gaspard, 25 ans, doit renouer avec sa famille à l'annonce du remariage de son père. Accompagné de Laura, une fille fantasque qui accepte de jouer sa petite amie le temps du mariage, il se sent enfin prêt à remettre les pieds dans le zoo de ses parents et y retrouver les singes et les fauves qui l'ont vu grandir... Mais entre un père trop cavaleur, un frère trop raisonnable et une sœur bien trop belle, il n'a pas conscience qu'il s'apprête à vivre les derniers jours de son enfance.
AlloCiné : Qu'est-ce qui vous a immédiatement plu dans Gaspard va au mariage lorsque vous avez lu le scénario ?
Félix Moati : Ce qui m'a plu c'est que ça faisait écho à des questions que le jeune homme que j'étais à l'époque, et que je suis toujours, se posait. À savoir, "C'est quoi ma place dans ma famille ?". Et moi c'est ce que je demande au cinéma, c'est qu'il soit un outil, une clé de compréhension du monde dans lequel je vis et des sentiments que j'éprouve. Je demande aux films d'être les témoins de ce que c'est que l'expérience d'être envie. Et Gaspard va au mariage me touche dans mon rapport à ma soeur, à mon frère, à ma famille. Mon rapport à toute cette architecture familiale. Et comment rencontrer la personne qu'on aime nous protège et nous émancipe de ça.
Le film a aussi le mérite d'être très singulier et de mélanger les genres. C'est aussi cet aspect-là du scénario qui vous a séduit ?
Oui il y a un aspect comédie romantique, conte pour enfants, film merveilleux. Et en même temps des dialogues très finement écrits, très ciselés. Le fait qu'on se dise des vacheries avec le sourire. Et puis ce qui m'a évidemment séduit aussi c'est le fait de travailler avec Antony Cordier [le réalisateur du film, ndrl]. J'avais vu ses deux premiers films bien avant qu'il me propose Gaspard va au mariage et j'avais adoré. Tout particulièrement Douches froides. Et ensuite, être entouré de partenaires comme Christa Théret, Guillaume Gouix, Laetitia Dosch, Marina Foïs, et Johan Heldenbergh, je savais que ça allait être un terrain de jeu assez exceptionnel.
Comment s'est passé le tournage dans un véritable zoo ? C'était compliqué à gérer ?
Ce qui est compliqué c'est de tourner avec des animaux car par définition on ne peut pas les contrôler, c'est eux qui ont le pouvoir. Mais ce qui était bien c'est que le zoo ne s'était pas arrêté de tourner. Il y avait de vrais employés qui travaillaient et du coup ça donnait du réel. On pouvait regarder leurs gestes, leur manière de travailler, d'appréhender les animaux, de toucher les machines. Tout ça amenait du concret dans notre jeu. Tout n'était pas que de l'imaginaire et du fantasme.
Gaspard et sa soeur, Coline, jouée par Christa Théret, entretiennent une relation pour le moins particulière dans le film. Comment décririez-vous ce lien spécial qui les unit ?
Je dirais que c'est vraiment une passion amoureuse, entre un frère et une soeur. Ils ont un rapport très enfantin, ils prennent le bain ensemble. Ils ont un rapport au corps très décompléxé, ils savent qu'ils viennent de la même chair. Il y a un truc très fusionnel entre les deux, mais qui n'est pas glauque je trouve. Mais c'est questionnant, c'est interrogeant. C'est son premier objet d'amour je pense. Et puis il y a évidemment cet amour absent qui entre en compte. La figure maternelle, jouée par Élodie Bouchez. (...) Et le côté un peu "incestueux" c'est quelque chose que je n'avais même pas vu à la lecture. Ça prouve qu'on voit vraiment ce qu'on veut bien voir.
Vous avez une scène de nu frontal dans le film. C'est un peu la mode en ce moment, après Didier Bourdon dans Garde alternée ou François Cluzet dans Normandie nue. C'est compliqué pour un comédien d'accepter de tourner ce genre de séquences ?
Oui je trouve ça compliqué, mais là c'est le sujet du film je trouve. C'est un film sur les corps, sur le désir, sur la sensualité. Donc ça se justifie complètement. Et si on ne s'y prête pas, on passe à côté du propos du film. Mais oui, moi ça me gêne, évidemment. Je ne suis pas du tout à l'aise avec la nudité. Surtout quand on sait que ça va être regardé, on a toujours des complexes.
Le film contient aussi une très jolie séquence musicale dansée, qui intervient un peu comme un moment suspendu...
J'ai adoré cette séquence. Il y avait un plaisir enfantin à danser avec Christa et Guillaume. Moi qui suis un assez piètre danseur, je me laissais guider par eux. C'était comme si on rejouait une scène de notre propre enfance. On imagine très bien que c'est une danse qu'ils faisaient beaucoup quand ils étaient petits, avant que le zoo ne périclite et avant qu'ils ne quittent ce paradis perdu qu'est l'enfance.
Vous retrouvez Christa Théret presque 10 ans après LOL. C'est un vrai hasard ou une volonté de votre part de retravailler ensemble ?
C'est le choix d'Antony, mais ce n'est pas lié à LOL. Mais depuis qu'on a fait LOL, je vois toujours Christa. On est resté très proches. On a un rapport un peu fraternel, c'est marrant. Je m'étais senti très protégé par Christa sur le tournage de LOL, du fait qu'elle avait déjà fait un film. Tout de suite j'ai eu une sorte de familiarité avec elle. Et là, retourner avec elle, c'était vraiment très joyeux, j'étais très content.
Dix ans après le tournage, quel regard portez-vous sur LOL, un film qui a marqué une génération d'ados ?
En fait c'est comme si je ne l'avais pas fait. J'avais 17 ans, c'était mon premier film. C'était vraiment un truc proche de la colonie de vacances. Mais évidemment je vois que c'est un film qui a beaucoup marqué. Les grandes soeurs le font découvrir à leurs petites soeurs. Mais c'est un film auquel je ne m'identifiais pas. Je ne m'identifiais pas aux problématiques du personnage que je jouais, car ce n'était pas le même milieu social. Mais c'est un film pour lequel j'ai une immense tendresse, et je pense que si je l'avais vu en tant que spectateur ça m'aurait plu. Mais quand il est sorti j'étais en hypokhâgne et je ne me rendais pas vraiment compte qu'il était sorti. C'était un peu irréel.
Vous êtes récemment passé à la réalisation. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur ce premier long métrage, Deux fils ?
C'est un film de fraternité, un film de frères. Un film sur trois hommes seuls qui apprennent à vivre ensemble à nouveau. Un père et ses deux fils.
Vous avez toujours eu la volonté de devenir réalisateur ?
Oui, depuis LOL déjà, je voulais faire de la mise en scène. Et ensuite j'ai pris le plaisir du jeu, et je ne pourrais pas m'en passer, j'aime trop ça. Surtout si c'est pour faire des films comme Gaspard va au mariage ou Simon et Théodore, qui sont des films qui me tiennent particulièrement à coeur. J'ai toujours voulu raconter des histoires.
Juste après LOL vous avez joué dans une mini-série, Sweet Dream. Jouer dans une série aujourd'hui, ça pourrait vous intéresser ?
J'ai lu des projets de séries, et il y a de plus en plus de qualité dans les séries aujourd'hui, mais je n'en regarde moi-même pas tellement et je ne sais pas trop dans quelle mesure je pourrais en faire une honnêtement. Mais pour l'instant, le seul problème c'est que ça prend beaucoup de temps, c'est très chronophage, car il faut libérer plusieurs mois par an et potentiellement s'engager sur plusieurs années. Mais en tout cas j'ai lu des projets intéressants.
La bande-annonce de Gaspard va au mariage, qui sort aujourd'hui au cinéma :