LE SONDAGE
UNE SAISON QUI RESONNE FORTEMENT AVEC L'ACTUALITE
Alors que les violences faites aux femmes sont (enfn) au coeur du débat en France, à Hollywood, comme partout ailleurs, la saison 3 de Broadchurch prend le sujet à bras-le-corps et ne se contente pas de raconter une affaire de plus. Il y a bien sûr cette horrible agression sexuelle comme point de départ de la saison, traitée avec l'empathie, la justesse et le sérieux nécessaires, mais il y a surtout ce qui est dit en creux sur la société patriarcale par le prisme de cette ville et de ses habitant(e)s, parfaitement représentatifs de ce qui se joue à l'échelle mondiale. Les femmes de la série sont ainsi plus que jamais au coeur du récit.
Toutes différentes, elles bénéficient de portraits soignés et précis, qui ne cherchent ni à en faire des anges, ni à n'en faire que des victimes des hommes. Elles ne sont pas forcément aimables, elles ne correspondent pas forcément aux canons de beauté. Elles sont réelles. Ainsi, Ellie Miller refuse d'être réduite aux yeux des gens et notamment de ceux des suspects comme "la femme du violeur". Elle souffre, mais elle avance. Il va sans dire qu'Olivia Colman est à nouveau impeccable. Trish, la victime de viol, est par ailleurs une femme volage. Et alors ? La série bouscule les stéréotypes et comme toujours s'amuse à déconstruire les apparences.
En plus d'évoquer la sexualité dans tout ce qu'elle peut avoir de déstructeur quand elle est utilisée à des fins perverses dans des rapports de domination et de pouvoir, cette salve d'épisodes traite également de la protection des mineurs, tant à travers le pouvoir de la pornographie sur les jeunes générations que le harcélement scolaire dont le fils d'Ellie est victime. Une preuve supplémentaire, s'il en fallait une, que Broadchurch est une série d'utilité publique, qui sous ses airs de thriller policier est surtout une oeuvre sociale et politique.
UNE SAISON QUI "BOUCLE LA BOUCLE" INTELLIGEMMENT
Si la saison 2 se perdait, presque sous forme de longue digression, dans une intrigue secondaire sans grand intérêt, la saison 3 revient aux fondamentaux -la communauté, l'intime...- et permet surtout aux personnages de s'accomplir, d'une manière ou d'une autre; de faire leurs adieux dignement, en utilisant le temps qui s'est écoulé depuis la saison 1 pour boucler la boucle, avec un effet miroir saisissant. Alec va tenter de régler ses problèmes avec sa fille, Beth va trouver une voie pour dépasser son deuil alors que son mari y est toujours empêtré... Le traumastime de la saison 1, celui du meurtre de Danny, est toujours présent mais sous une forme différente. Celui des téléspectateurs aussi : l'émotion suscitée par les premiers épisodes est intacte et nous guide jusqu'aux derniers instants, puissants de simplicité.