"Certaines des expériences de divertissements de l'année les plus attendues et dont on parle le plus actuellement, ne vont pas se jouer dans votre cinéma, à l'intérieur d'un stade ou sur les ondes, mais auront lieu à l'E3, depuis que le divertissement interactif est sur le devant de la scène de la pop culture" déclarait il y a quelques jours avant l'ouverture du salon Eric Hirshberg, CEO d'Activision.
Parmi les titres attendus figure justement déjà en bonne place Call of Duty : WWII; un jeu développé par le studio Sledgehammer Games, qui était derrière la livraison 2014 de la licence avec Call of Duty : Advanced Warfare. Mais Call of Duty : WWII veut aller au-delà de la livraison de l'opus annuel effectuée par Activision en fin d'année. Ces dernières années, la société s'est surtout concentré à livrer des titres ayant pris le virage de la guerre futuriste. Des jeux offrant des univers funs mais froids, parfois anxiogènes, en tout cas pessimistes, avec lesquels il était difficile de se sentir en phase ou, du moins, connecté émotionnellement. Tout le contraire d'un événement historique et donc authentique comme le D-Day, pour prendre cet unique et emblématique exemple, qui a changé le cours de l'Histoire et parle aux consciences.
Un virage à 180° donc pour une licence qui revient aux glorieuses racines qui ont fait sa gloire. C'est que Call of Duty fut avant tout une série basée justement sur la Seconde guerre mondiale, mais s'adapta au fil des ans, au gré des envies et du goût de son public. Le dernier opus de la saga ayant eu comme cadre cette période historique remonte à 2008 avec Call of Duty : World at War. Une éternité ou presque. Avec une nouvelle génération de consoles et une nouvelle génération de joueurs, il était sans doute temps d'effectuer un vrai retour en force. Et autant insister pour le redire : non, ce n'est pas le succès -mérité- de Battlefield 1 et son contexte de Première guerre mondiale qui a incité les équipes de Sledgehammer Games à explorer à nouveau le plus meurtrier conflit de l'Histoire; le développement du jeu remontant à 2014.
Une histoire empreinte de respect et de réalisme
Aux Etats-Unis, on vénère et montre un grand respect à ceux qui ont combattu au cours de cette guerre. Ce n'est pas une formule creuse. Surtout aux Etats-Unis. Ils font d'ailleurs partie de ceux que l'on appelle the Greatest Generation; ceux et celles qui se sont sacrifiés dans une guerre considérée comme juste et noble, à l'opposé des motifs d'un conflit comme la guerre du Viêtnam.
"C'est un honneur pour nous d'avoir l'opportunité de rendre hommage à tous ces sacrifices durant la Seconde guerre mondiale, et pas seulement américains, pour une nouvelle génération" expliquent Glen Schofield et Michael Condrey, les responsables du studios, venus faire la présentation du jeu. "Vous savez, cela fait presque vingt ans que Il faut sauver le soldat Ryan est sorti, neuf ans que "Call of Duty : World at War" est sorti. Nous souhaitions apporter notre humble contribution en hommage à ceux et celles qui se sont battus durant ce conflit". Une génération qui a combattu le nazisme et qui est désormais presque éteinte. "C'est aussi une période qui me touche personnellement" lâche Schofield. "A quel niveau ?" lui demande-t-on. "Mon grand-père est un héros de guerre; il a fait toute la campagne d'Italie durant la Seconde guerre mondiale, et trois séjours en Afrique. Il fut grièvement blessé alors qu'il enlevait un nid de mitrailleuse qui clouait sur place son unité. Suite à ses blessures, il a perdu sa jambe. Il fut plusieurs fois décoré, dont le Purple Heart, une silver et bronze Star".
Dans Call of Duty : WWII, il ne sera donc pas question d'héroïsme triomphant ou de soldat encaissant les rafales de mitrailleuses sans sourciller. Dans la campagne, le choix a été fait de placer le joueur dans la peau d'un soldat, un bleu du nom de Ronald "Red" Daniels, incarné par Josh Duhamel. Le personnage est ainsi enrôlé au sein de la Première division d'infanterie, tandis que son supérieur, William Pierson, est incarné dans le jeu par l'acteur Jonathan Tucker. Son histoire commence la veille du fameux D-Day, le 6 juin 1944, jusqu'en 1945, avec de nombreux combats se déroulant lors de la libération de la France, mais aussi en Belgique lors de la terrible bataille de la forêt de Hürtgen entre septembre 1944 et février 1945, où les américains eurent 12000 tués et 20000 blessés.
Hürtgen, un haut lieu de combats que les équipes de Sledgammer Games sont venu voir lors d'une visite en Europe, accompagnés d'un historien et conseiller militaire. Une plongée In Situ nécessaire pour les équipes, pour mieux se rendre compte du climat, de l'environnement, parfois rude, et tenter de le retranscrire au mieux dans le jeu. "Quand on lisait tous les récits et les témoignages de ces événements, on s'est rendu compte que les auteurs parlaient souvent peu d'eux-même, mais de leurs copains, de ceux qui les entouraient, du sacrifice de leurs camarades situés à côté d'eux. C'est pour cela que dans le jeu, nous avons vraiment voulu nous concentrer sur une escouade et sur son aventure à travers un personnage évoluant au milieu d'elle" expliquent les créateurs du jeu.
Cela dit, le joueur sera régulièrement amené à croiser des personnages très différents et parfois prendre le contrôle de ceux-ci, à commencer par une femme de la Résistance française, un GI noir victime d'un racisme ordinaire, un enfant... Des personnages aux profils différents, évoluant dans des situations parfois dramatiques et / ou particulièrement dures. "Nous ne sommes pas timides pour montrer ce qui doit être montré, nous devons coller à la réalité" précise Michael Condrey.
La sauvagerie des combats
La suite de la présentation fut une petite exclusivité présentée en Behind Closed Door : une séquence de la bataille de Normandie située à Marigny. La mise en scène des combats reste -marque de fabrique de la licence oblige- taillée comme un blockbuster hollywoodien. Mais le résultat est là. Baignés de superbes effets de lumière et autres fumée volumétrique, les combats sont d'une rare sauvagerie, notamment au corps-à-corps. Les corps sont déchiquetés, voire même littéralement carbonisés par un soldat allemand équipé d'un lance-flammes, avant que celui-ci ne soit à son tour victime d'un coup de fusil bien placé dans ses réservoirs.
L'équipe a aussi peaufiné les effets sonores, voulus réalistes : on pouvait entendre l'impact des balles pénétrer les chairs des soldats. Un travail sur le son qu'avait aussi exigé Steven Spielberg pour décupler l'impact de sa désormais mythique séquence du débarquement dans Il faut sauver le soldat Ryan. En avancant, le personnage principal doit tenir compte de ses coéquipiers, qui le ravitaillent en munitions ou pansement. Ceux-ci ne sont pas éternels, et peuvent être tués. Donc il faut veiller à aussi assurer leurs arrières, faute de quoi le manque de munitions peut vite se faire sentir par exemple. Un rappel du travail d'escouade évoqué plus haut. Un peu plus loin après avoir pris possession du clocher du village, le personnage devait se transformer en sniper pour aider un coéquipier en contrebas, tandis que les Allemands lancaient une violente contre-attaque. Une séquence qui rappelait là-aussi furieusement celle du terrible combat final dans le film de Spielberg, avant que le clocher ne soit pulvérisé par un tir d'obus. Voir cette séquence dans ce presque pendant vidéoludique au chef-d'oeuvre de Spielberg, mâtiné sans doute d'un zeste de l'excellente série Band of Brothers : il faut avouer qu'il y a pire comme références.