Le moins que l'on puisse dire, c'est que les amoureux transis de la licence Hitman étaient à la peine ces dernières années. Et ce n'est malheureusement pas le catastrophique Agent 47 qui est venu redorer le blason du plus célèbre tueur à gages vidéoludique sur grand écran. En 2012, Hitman : Absolution, pourtant riche de quelques unes des plus formidables missions de la saga, s'est vu desservi par un accueil mitigé par les fans : trop linéaire, trop facile ont dit certains, trop centré sur sa narration, pas assez de liberté...
Aux dires de Hannes Seifert, à la tête du studio de développement IO Interactive et venu effectuer la présentation du jeu, le message a été entendu. Pas question aussi d'attendre encore six longues années de développement entre deux volets de la saga, comme ce fut le cas entre l'excellent Hitman : Blood Money et Hitman : Absolution. "Nous avons voulu revenir à ce qui fait les fondations du jeu, redonner aux joueurs le côté bac à sable de la licence, qu'ils puissent exprimer leur créativité". Le nom choisi ne doit d'ailleurs rien au hasard, puisque le jeu est sobrement baptisé Hitman, comme pour mieux souligner le Reboot de la licence, du moins son renouveau.
Hitman est aussi une grande première : il s'agit du premier jeu estampillé "AAA" à être vendu sous forme épisodique. Un choix totalement assumé par IO Interactive et son éditeur Square Enix, mais surprenant. D'ordinaire, ce format est davantage le fait des jeux d'aventures de tendances narratives, comme Life is Strange, pour rester dans le catalogue de l'éditeur. A la sortie du jeu, le 11 mars prochain, les joueurs auront donc un contenu constitué des missions du Prologue du jeu, ainsi que les missions se déroulant à Paris, le tout regroupé sous la forme d'un "Pack d'intro". En avril sortiront les missions se déroulant en Italie; et en mai les missions se déroulant à Marrakech.
Plus tard dans l'année, il y aura des mises à jour mensuelles comprenant notamment trois nouvelles destinations : la Thaïlande, les Etats-Unis et le Japon, qui viendra clore cette saison de contenus. Le studio prévoit le lancement d'événements temporaires et de bonus toutes les semaines entre chaque mise à jour mensuelle, ainsi que la désignation de cibles éphémères à abattre toutes les 48h pour les joueurs. Comble du raffinement, il sera même possible d'être prévenu de leurs arrivées...Par SMS !
Gros succès d'Hitman : absolution (le studio en a compté pas moins de 30 millions !), les Contracts feront leur retour; soit la libre création de contrats que l'on pourra tester avant de les soumettre à l'ensemble des joueurs. A cela s'ajoute des Escalations Contracts, une autre variante consistant à enchaîner des contrats à la difficulté croissante.
Enfin pour ceux que la dégustation d'un Hitman par tranches refroidiraient, il est bien entendu prévu une version complète du jeu pour la fin d'année, pour un prix allant de 50 € (version PC) à 60 € (versions consoles).
Et mon histoire alors ?
L’histoire du nouveau Hitman est donc racontée de manière épisodique, découpée comme une série. Ces épisodes seront tout à la fois centrés sur les cibles de l’agent 47 et sur l’agent 47 lui-même. Mais aussi, au fur et à mesure de l’avancement de la saison, sur l’intrigue mêlant l’agent 47 à Diana Burnwood, l'agent traitant du tueur, l’agence ICA (International Contract Agency), ainsi que d’autres nouveaux personnages. IO Interactive a déjà prévu plusieurs saisons dans ses cartons. Pour commencer, l’histoire « globale » et les missions individuelles d’assassinats se déroulent de manière parallèle. Mais à mesure que la saison suivra son cours, les deux lignes / histoires convergeront jusqu’à fusionner.
Avant de nous atteler à la tâche manette en main, Hannes Seifert nous donne un dernier conseil : "à partir du moment où vous engagez votre cible, ca compte. Il n'y a qu'un seul essai. Si vous ratez votre cible, c'est perdu, pas de rattrapage possible !" Autrement dit, faire appel à sa créativité et un certain sens de l'improvisation pour mener à bien ses missions, certes, mais aussi tâcher de veiller dans la mesure du possible à planifier un peu ses actions. Savoir doser les deux approches.
Entrecoupé de cut-scenes cinématiques, le prologue prend place 20 ans avant la mission "Paris". Se déroulant dans les bâtiments d’entrainement secrets de l’ICA, il marque un virage majeur dans la vie de l’Agent 47 – sa rencontre avec l’ICA et sa toute première rencontre avec son futur officier traitant, Diana Burnwood.
Le prologue dispose de deux entraînements libres, initiant les joueurs aux fonctionnalités et aux mécaniques du jeu. Dans la première mission, plutôt sympathique d'ailleurs, on doit tuer un certain escroc du nom de Kalvin Ritter, qui tient une surprise party à bord d'un (faux) Yacht. Première (re)prise en main avec l'agent 47, qui bénéficie, pour cette toute première mission d'aides en pop-up à l'écran, rééxpliquant en douceur les bases du jeu. Il est d'ailleurs vivement conseillé de refaire la mission en changeant les manoeuvres d'approches pour atteindre la cible.
L'autre mission, plus corsée, consiste à tuer un homme du nom de Jasper Knight, amateur d'échec à ses heures perdues. Mais le bougre est sacrément bien gardé, à l'abri dans une base aérienne soviétique reconstituée au temps de la Guerre Froide. Pressé par le temps, on décide d'opter pour une approche semi-directe : après s'être infiltré en douce au sein de la base à l'aide de l'uniforme d'un malheureux garde en faction, on repère une possibilité de grimper sur une gouttière dans l'angle du bâtiment, et de longer une baie vitrée. Bonne pioche : notre cible se tient dans la pièce, en pleine discussion avec un officier. Une fois seul, un tir de silencieux bien placé à travers la fenêtre le touche mortellement. Mais le bruit de la vitre volant en éclat, et la découverte du corps met la base en alerte. On repart aussi sec -et avec difficulté- vers notre chemin d'entrée.
Fashion Victim
C'est après une formidable cinématique faisant office de montage Best of des contrats de l'agent 47, que l'on débarque à Paris en pleine Fashion Week pour une mission baptisée "Le clou du spectacle". Les cibles : éliminer un certain Viktor Novikov et sa femme, Dahlia Margolis. Le but est d’éviter qu’une liste des agents du MI6 ne soit revendue. Elle est pourtant déjà entre les mains de IAGO, organisation criminelle menée par le couple fashion, qui travaille sous la couverture d’une société spécialisée dans la mode, du nom de SANGUINE.
La première chose qui frappe, c'est la taille de l'environnement : gigantesque. Le bâtiment, sorte d'hôtel particulier, possède un nombre très important d'entrées. Ensuite la gestion de la foule : déjà impressionnante dans Hitman absolution, notamment dans la mission du Strip Club, la qualité de la gestion de celle-ci s’est encore accrue sur Hitman. C’est impressionnant, et ca grouille de vie. On décide de piquer les vêtements d’un serveur en pleine pause cigarette sur le parking. Rentrant dans le bâtiment côté cuisines, on repère rapidement le garde du corps de Viktor Novikov. En empoisonnant un plateau de sushis avec un vomitif versé discrètement dans la cuisine puis apporté dans la salle de réception, on force le bodyguard à foncer aux toilettes pour vomir. Après l’avoir étranglé, on endosse ses habits. Ca permet d’avoir très rapidement accès à une grande partie du bâtiment sans être inquiété, et même d'accompagner notre hôte - cible dans une petite discussion se tenant dans les jardins derrière le bâtiment.
Luxueux bac à sable
Dans le cadre d'un autre essai, cette fois-ci déguisé en serveur, on prend soin ne pas croiser trop longtemps les chefs d’équipes, qui connaissent leurs effectifs et leurs chemins de ronde. Rester trop longtemps dans leurs champs de vision nous fait apparaître comme suspect. Profil bas donc. Cet exemple n'est évidemment qu'une manoeuvre d'approche parmis des dizaines : on aurait pu se faire passer pour un agent de sécurité, un membre du staff du défilé qui se tient dans le pavillon, un membre de l'équipe pyrotechnique préparant le feu d'artifice qui doit clôturer la soirée, ou se faire carrément passer pour un mannequin qui nous ressemble étrangement et qu'on jurerait tout droit sorti de Zoolander . Ou même, pourquoi pas, pour le caméraman d'un duo de journalistes People faisant un reportage sur la soirée. C'est qu'une caméra piégée à l'explosif peut aussi être efficace... Créativité, liberté et multiplicité des approches : le sand box de Hitman est effectivement très généreux et tourne à plein régime, garantissant une vraie rejouabilité; d'autant que les sauvegardes ne sont pas automatiques. Jusqu'au bout donc, on garde le contrôle.
C'est ici l'occasion d'introduire une nouveauté très bien vue de la part de IO Interactive, sobrement baptisée "Opportunité". Destinées à l'adresse des néophytes, les opportunités sont accessibles via la carte dans le menu pause : des pictogrammes indiquent différents endroits de la carte comme autant d'opportunités à saisir pour nous rapprocher de la cible. Par exemple, être le témoin d'une discussion fournissant de précieux renseignements, partir à la découverte de la cave du pavillon, trouver tel ou tel individu... En sélectionnant l’info via le menu pause, on peut activer l’opportunité comme une sorte de "quête". Une fois l'opportunité découverte, on est amené à en découvrir de nouvelles, tout en donnant aussi de précieuses informations, comme l'accès à certaines zones sécurisées et donc sensibles. Libre au joueur de commencer à exploiter ces opportunités, puis de les arrêter, voire même de faire l'impasse dessus. Elles peuvent même carrément disparaître en fonction de nos actions et / ou du timing.
Selon Hannes Seifert, ces opportunités ne sont pas exhaustives. En clair, elles ne représentent pas l’ensemble des possibilités pour liquider la cible. Mais elles incarnent souvent les plus spectaculaires, comme par exemple celle consistant à faire crasher un lustre géant sur sa cible. On aurait donc tort de s'en priver, même si on gage que les puristes feront très certainement l'impasse dessus.
S'il reste encore du temps à IO Interactive pour faire un bon coup de polish sur son Hitman depuis l'heure où nous l'avons eu entre les mains (fin janvier), ce nouvel opus des (més)aventures de l'agent 47 devrait être un bon millésime; en tout cas, fidèle à son ADN d'origine tant réclamé par les fans. Reste à les convaincre, ainsi que les profanes, d'accepter un format épisodique qui pourrait de prime abord apparaître comme frustrant. Début de verdict le 11 mars prochain.