Dans le drôle et émouvant Marguerite, en salles ce mercredi, Catherine Frot incarne une femme fortunée passionnée de musique et d’opéra, qui chante... terriblement faux ! Un rôle hors-norme inspiré de la vie d'une véritable chanteuse, Florence Foster Jenkins (à écouter ici).
Rencontre avec Catherine Frot, actrice passionnée par son rôle de diva pas comme les autres, qui évoque avec enthousiasme le long métrage de Xavier Giannoli.
AlloCiné : Comment vous êtes-vous retrouvée à incarner le personnage incroyable de Marguerite ?
Catherine Frot : Tout d'abord, j'avais envie de travailler avec Xavier Giannoli, et je lui avait fait savoir, tout simplement. Assez rapidement, j'ai reçu le script de Marguerite. Il a ressorti ce projet qu'il avait mis dans les tiroirs en se disant que ce serait peut-être bien pour moi. Ensuite, il est venu me voir jouer Les Beaux jours de Beckett sur scène et il m'a dit que Marguerite était une cousine de Winnie dans Les Beaux jours. On est partis là-dessus et, pour tout vous dire, je savais que j'étais dans une grande histoire. Je l'ai compris tout de suite. Avec un personnage dont je connais quand même un peu le caractère. (sourire) Cette innocence, je l'ai travaillée à quelques reprises. Et puis travailler avec Xavier, c'était une superbe expérience. J'ai vu ses films précédents et je vois une filiation de personnages, souvent, qu'il met au milieu de ses histoires. Des personnages qui sont seuls, enfermés, qui vivent une illusion, qui s'échappent de la réalité et qui sont en danger.
Je connais quand même un peu le caractère de Marguerite
AlloCiné : Cette femme, Marguerite, avec son innocence, est à la fois très drôle et très émouvante...
Pour moi, c'est un film sur la vérité et le mensonge, sur l'hypocrisie, bien entendu, sur l'innocence et sur la beauté, car cette femme croit en la beauté, c'est évident. La manière dont elle vit son rêve est sur la beauté, elle est certaine de chanter merveilleusement bien. Elle croit en elle, elle croit en l'art. C'est une passionnée. Selon moi, c'est une vraie artiste. Bon, elle chante comme une casserole, d'accord. Mais en même temps, il y a des époques où on se bouche les oreilles pour certaines choses et d'autres où on dit que c'est génial. Alors je ne vais pas la comparer à Picasso, pas la comparer au Douanier Rousseau, mais le Douanier Rousseau, c'est André Breton qui l'a fait exister et qui a décidé que c'était un artiste peintre. Sinon, il serait resté douanier. Bon, j'édulcore, car Marguerite, ce n'est pas ça, mais un peu... C'est quoi la beauté ? De voir cette femme chanter aussi merveilleusement faux, à mon avis, ça a son charme. Est-ce que ce n'est pas une proposition artistique ?
AlloCiné : Le personnage de Marguerite est inspiré d'une véritable diva, Florence Foster Jenkins, qui chantait très mal...
Je ne la connaissais pas. Et quand je me suis un peu renseignée, je me suis aperçue que peu de gens la connaissaient, sauf dans le milieu des mélomanes. Très vite, j'ai réalisé qu'on pouvait facilement l'entendre, et là je me suis dit que ça allait être joyeux ! (rires)
Je me suis dit que ça allait être joyeux !
AlloCiné : On imagine qu'il y a eu une sacrée préparation pour ce rôle ! Vous vous êtes entraînée à mal chanter ?
C'est du jeu. Je devais apprendre mes airs, tous ces grands airs. C'était un travail de mémoire, de chant. Je les ai appris normalement, pour m'amuser ensuite à les chanter faux, puis revenir et faire un playback impeccable ! J'ai écouté La Callas en boucle dans Casta Diva de Bellini, notamment, le grand air qu'elle chante à l'opéra. Et en même temps, j'écoutais également Florence Foster Jenkins en boucle. Je me suis envolée là-dessus, je me suis amusée avec ça.
Par ailleurs, pour me préparer au rôle, Xavier Giannoli m'a passé un bouquin merveilleux, très épais, un vrai livre d'art, très beau, sur les divas entre les années 1850 et 1930. Toutes les divas qui ont chanté tous ces grands airs avec les photos qui ressemblent aux photos de Marguerite dans le film. Des photos incroyables, avec toutes ces poses hiératiques, ces poses à la grecque, Lady Macbeth, Salomé, Samson et Dalila, Aïda... Toutes ces femmes que Marguerite finit par croire être.
La bande-annonce de "Marguerite" :