AlloCiné : Avec le recul, comment avez-vous vécu l'expérience du Festival de Cannes, où vous avez remporté le Prix du Jury Un Certain Regard en mai dernier ?
Daniel & Diego Vega : De manière générale, c'était beaucoup de stress, beaucoup du boulot, de la pression. En fait, nous étions tous les deux chez nous, à Lima, au Pérou, et nous avons reçu un coup de fil assez surprenant, assez mystérieux, où quelqu'un nous disait : "Préparez-vous pour Cannes !" (rires) Tout cela pour dire que tout est allé très vite. Et sur place, deux choses nous ont marqué : on travaillait très vite, il fallait prendre des décisions dans l'urgence, mais en parallèle, c'était un plaisir extrême, un show dont nous faisions partie intégrante, même à notre modeste niveau. On en a sacrément profité, avec aujourd'hui des souvenirs plein la tête, la première projection, la réaction des spectateurs, leurs rires, leurs applaudissements...
AlloCiné : Pourquoi le film s'appelle-t-il "Octubre" ?
Octubre car Octobre, au Pérou, est un mois très important au niveau religieux et historique. C'est à cette période de l'année que se déroule une Fête traditionnelle qui existe depuis plus de 350 ans, une procession qui réunit beaucoup de monde et qui se déroule donc au mois d'octobre.
AlloCiné : Le film est articulé autour de cette fête, la religion est très importante dans votre comédie. Mais il y a beaucoup dautres éléments...
Tout à fait. Intégrer cette fête religieuse à notre scénario initial a donné plus de corps à l'ensemble, à ce que l'on voulait dire. Au départ, Octubre était une histoire chorale avec des références religieuses. Au final, en intérgrant cet événement particulier du mois d'octobre, le film est beaucoup plus que cela. Tout est centralisé autour du personage de Clemente qui est confronté à un petit miracle, l'arrivée d'une femme et d'un bébé. Au centre du film, il y aussi le fait que les gens pensent qu'il n'y pas de grands miracles, mais que la vie est faite de petits miracles.
AlloCiné : "Octubre" est fait de contradictions. Le désespoir le dispute à l'espoir ou l'humour, la foi au désir et à la sensualité. En découle une dynamique particulière...
Les contradictions font partie du film. Un homme solitaire est confronté à un petit bébé, c'est le choc de deux émotions différentes qui s'affrontent. Il y a aussi l'opposition entre la fois et le désir, avec le personnage de Sofia. Elle désire un homme follement mais elle également très religieuse. Le film est fait de contradictions. L'humour dans le film n'est pas voulu, imposé, mais c'est la confrontation de tous ces éléments qui amène à quelque chose de drôle et absurde. C'était quelque chose que nous voulions très rapidement pour Octubre : aborder cette histoire avec de l'humour noir et de l'absurde. C'est, nous pensons, un moyen intéressant de traiter de thèmes aussi difficiles que le désespoir et la solitude.
Propos recueillis par Clément Cuyer à Paris - Décembre 2010