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    "Le Secret de Kelly Anne..." : rencontre avec Peter Cattaneo.

    Peter Cattaneo, l'auteur du success-"full Monty" revient avec "Le Secret de Kelly Anne", une fable en salles ce mercredi. Allociné l'a rencontré au Festival du film britannique de Dinard. Interview.

    Allociné : A quand remonte votre envie d'adapter le livre Pobby and Dingan ?

    Peter Cattaneo : J'avais été très ému à la lecture du livre. Je m'en souviens très précisément : c'était le 1er janvier 2001. Mais entre le moment où vous vous dites : "J'aime ce livre" et celui où vous réalisez le film, c'est très long. Pour l'adaptation, j'ai travaillé avec l'auteur du livre et un de ses amis. L'histoire est la même, mais nous avons ajouté des personnages secondaires. Et dans le livre, le récit est moins linéaire : on est du côté des enfants, on suit le fil de leurs pensées. Nous avons aussi changé le titre : Pobby and Dingan, c'était vraiment un titre impossible : même le monteur, après avoir travaillé 7 mois sur le film, n'arrivait toujours pas à le dire correctement ! Et puis je voulais quelque chose de neutre. Opal dream a un pouvoir évocateur, c'est assez mystérieux.

    Que connaissiez-vous des mines d'opale d'Australie avant de lire le livre ?

    Je n'en avais jamais entendu parler. Ben, le romancier, qui est anglais, est marié à une Australienne qui a grandi dans une ville où on trouve des mines d'opale. Beaucoup d'éléments de l'histoire viennent donc du récit qu'elle lui a fait de son enfance. En fait, c'est une petite communauté, répartie sur deux villes. Il suffit d'aller parler à une personne, et vous faites rapidement connaissance avec tous les mineurs. Quand on commence à creuser, on devient facilement accro, c'est un peu comme le jeu. Moi, je n'ai jamais rien trouvé : à chaque fois, c'était juste une pierre quelconque, sans couleur, donc sans valeur. D'autres membres de l'équipe ont trouvé des petits morceaux...

    Avez-vous trouvé facilement les enfants qui interprètent les deux rôles principaux ?

    Le casting, ce n'est jamais évident, mais avec des enfants c'est particulièrement difficile. Il vous faut juste prier le dieu du cinéma... Avec le directeur de casting, nous avons commencé par écumer les grandes villes : les écoles, les ateliers de théâtre. Bien sûr, il y a déjà des agents pour les enfants acteurs, mais je préfère chercher de "vrais" enfants. J'ai visionné toutes ces cassettes de Londres. La fille devait avoir ce visage fin, étrange, un peu irréel, comme si elle sortait d'un conte de fées. La petite qu'on a choisie vient de Sydney, elle était sur l'une des premières cassettes. Une des questions qu'on posait à tous les enfants, c'était : "Avez-vous un ami imaginaire ?" Les uns disaient oui, les autres non. Elle, elle a regardé à sa droite et nous a dit : "Je vous présente Bum Bum et Fluff Fluff", puis a fait mine de chercher l'un d'entre eux... J'ai pensé : ou bien elle joue la comédie, et c'est épatant, ou bien ce sont vraiment ses amis imaginaires et c'est parfait pour moi ! C'est une fille qui a une imagination débordante. Le garçon est venu très tard. Nous n'avions personne de satisfaisant, j'ai même pensé abandonner le film à cause de ça. On a passé une dernière annonce à Sydney, et ce garçon fantastique a surgi. Quand les enfants sont naturels, c'est formidable : les acteurs professionnels doivent travailler des années pour arriver à être aussi naturels. Mais c'est délicat de choisir un enfant : s'il n'est pas bon, je me fais avoir parce que mon film sera raté, mais s'il est vraiment bon, c'est lui qui se fait avoir, parce que sa vie sera celle d'un enfant acteur ! Je sais que Christian Byers [le jeune acteur qui incarne Ashmol] tourne un film avec Daniel Radcliffe en Australie [il s'agit de December boys, Lire notre article à ce sujet], donc il devrait continuer dans cette voie.

    Etait-il évident dès le départ qu'il ne fallait pas représenter à l'écran Pobby et Dingan, en dehors des illustrations ?

    Les dessins sont venus assez tard, ils n'étaient pas dans le livre, mais je tenais à montrer quelque chose. Je savais que des figurines en caoutchouc, habillées, ça ne donnerait rien. C'est un film sur l'imagination, donc je voulais que les spectateurs se servent de leur imagination. Une de mes influences sur ce film a été Harvey avec James Stewart qui se promène avec un lapin blanc imaginaire. On ne voit jamais Harvey, mais un lapin blanc d'1 mètre 80 c'est assez facile à imaginer... En revanche, ces deux personnages on ne peut pas savoir à quoi ils ressemblent, d'où l'idée des dessins.

    Vous ne donnez pas d'explication sur la maladie de la fillette.

    C'est un mystère pour tout le monde, mais il y a certainement une raison psychologique. Selon un médecin, qui a vu le film, elle traverse un trauma émotionnel, et c'est cette sorte de déprime qui produit une faiblesse intérieure. Les malaises ont souvent une origine psychologique, il y a des gens qui meurent parce qu'ils ont le coeur brisé. C'est cette idée que notre esprit peut totalement contrôler notre corps.

    On pense un peu à Frank Capra. Diriez-vous de votre film qu'il s'agit d'un conte ?

    Oui, une fable. Néanmoins, j'espère que le monde que je décris, la musique, la photo donnent une impression de modernité, de quelque chose de contemporain. J'ai veillé à ne pas faire un conte de fées à l'ancienne. Quant à Capra, c'est un cinéaste que j'admire. Les personnages, et surtout l'ambiance du film, peuvent évoquer son univers : cette petite ville, le thème de la perte de la foi, et cette catharsis émotionnelle à la fin du film.

    Après "The Full Monty" et son projet fou (un spectacle de strip-tease monté par une bande d'amis chômeurs), "Le Secret de Kelly Anne", c'est encore l'histoire d'un rêve. Vous êtes le cinéaste de l'utopie...

    Mais le cinéma, c'est un peu ça, non ? Personne ne croit à un film, jusqu'à ce qu'il soit fait. C'est comme cette phrase dans Jusqu'au bout du reve, le film avec Kevin Costner : "If you build it, it will come" ("Si tu le construis, il viendra"), c'est le pouvoir de l'imagination. J'aime bien cette idée.

    Autre lien avec "The Full monty", même si ce thème est encore plus évident ici : la relation père-fils.

    C'est vrai, c'est un thème qui m'intéresse depuis longtemps. Dans le livre, deux relations sont plus particulièrement étudiées : Ashmol et son père, et Ashmol et sa soeur. Mais de toute façon, je crois que même s'il n'y avait pas d'histoire entre un père et un fils, je trouverais le moyen d'en ajouter une ! Beaucoup de grandes oeuvres ont été faites sur ce sujet, à commencer par celles de Shakespeare... On subit tous l'influence de notre père, et maintenant que je suis moi-même père, ça m'intrigue encore plus. La situation est inversée : quand je regarde mon fils, ça me renvoie à moi-même, enfant.

    Avez-vous plus de difficultés à tourner aujourd'hui qu'il y a dix ans ?

    Le défi, c'est de surprendre les spectateurs. Je sais que The Full Monty a été un peu une référence pour d'autres films, ce qui a rendu les choses compliquées pour moi parce qu'on me proposait toujours la même chose : la classe ouvrière, les laissés-pour-compte, les individus qui luttent contre le système... J'ai déjà donné, j'en ai fait un, une bonne fois pour toutes. Et puis, j'imagine déjà la presse qui titrerait : "The half monty"...

    Recueilli à Dinard par Julien Dokhan

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