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    "Jarhead" : Sam Mendes livre sa vision des marines

    Pour son troisième film, Sam Mendes continue son analyse de l'Amérique et se penche cette fois sur la première guerre du Golfe. Il évoque pour Allociné sa vision du conflit et revient sur le tournage...

    Qu'est ce qui vous a poussé à tourner "Jarhead" ? La guerre vous a-t-elle toujours intéressée ?

    Sam Mendes : J'ai toujours voulu comprendre ce qui pousse quelqu'un à partir au combat parce que c'est vraiment à l'opposé de ce que je suis. Et j'ai toujours été fasciné par ce qui motivait les gens à devenir soldats et faire la guerre. Mais ce qui m'a attiré avant tout c'est le ton du roman d'origine : à la fois drôle et original, tout en restant très sceptique sur ce qu'il se passait. C'est presque comme si j'avais moi-même été dans cette situation. L'histoire qu'il raconte est tellement surréaliste et surprenante, et le tout traite d'une guerre que je pensais bien connaître... alors qu'en fait je n'en connaissais absolument rien !

    Votre intention était-elle de délibérément montrer au public américain la face cachée de ses marines ?

    Oui, je voulais rapprocher le public de ce qu'est véritablement la vie d'un marine, et montrer à quel point la vie d'un soldat professionnel peut être désorganisée et "non-héroïque".

    Dans une des scènes de Jarhead, vous montrez les marines galvanisés par la projection du film "Apocalypse Now"... N'avez vous pas peur que votre film soit mal interprété comme dans cette scène ?

    99% des gens pensent qu'Apocalypse Now est un film anti-guerre. Mais il reste effectivement 1%, principalement des hommes, qui se bloque sur les éléments guerriers du film et qui l'interprète dans le mauvais sens. Ceux là sont fascinés par les aspects viscéraux et excitants de la guerre et ils cherchent à ressentir tout ça. Dans Jarhead, la situation est différente : le sujet est l'attente de la guerre et l'impossibilité de trouver une réponse dans le conflit.

    Qu'est ce que votre expérience de metteur en scène au théâtre peut apporter pour la réalisation d'un film comme "Jarhead" ?

    Cela a surtout aidé pour la direction d'acteur, mais j'ai toujours essayé de dissocier mon travail de metteur en scène au théâtre et celui de réalisateur. Le cinéma et le théâtre traitent les choses de manière différente. De plus, le théâtre est l'univers de la parole tandis que le cinéma est beaucoup plus visuel. Mes deux carrières sont pour moi entièrement séparées.

    Comment avez vous justement créé cet univers visuel si prononcé ?

    Contrairement à mes films précédents, j'ai décidé de ne pas faire de story-board. Je souhaitais m'inspirer directement des lieux de tournage, improviser avec les acteurs, laisser mon imagination courir. Je voulais filmer caméra à l'épaule, avec souvent plusieurs caméras en même temps.Mais il y avait plusieurs images qui étaient déjà parfaitement décrites dans le roman qui m'ont toujours plues et qui étaient une des raisons qui m'ont donné envie de faire ce film : comme la partie de football qu'ils sont obligés de jouer avec leur tenue anti-gaz... Il y avait aussi des images se rapportant à la guerre elle-même : l'autoroute de la mort avec tous ces cadavres brulés, les images du désert en feu dans la partie finale du film. Ces images viennent tout droit de la réalité... Je n'ai fait que les recréer à l'écran.

    C'est seulement votre troisième film. Quelle est la place de Jarhead dans votre univers ?

    C'est difficile de se rappeler que l'on est débutant quand votre premier film est un grand succès... qu'il faut toujours faire des expériences, essayer de nouvelles choses, continuer de voyager. C'est facile de s'asseoir sur ses acquis et rester sur formules qui ont prouvé leur succès. Avec Jarhead, j'ai tenté une nouvelle expérience. Le tournage a été complètement différent des deux premiers. Dans quelques films je pense que je pourrai enfin définir mon " style" mais en attendant je dois encore expérimenter.

    Est ce que l'auteur du roman Anthony Swofford a vu le film ?

    Oui il l'a vu, il l'adore ! Il a fortement soutenu la promotion du film. C'est quelque chose dont il est très fier je pense.

    Y-avait il beaucoup de pression venant de lui ?

    Oui, j'avais une pression énorme. Je tenais tellement à ce qu'il apprécie le film... J'étais terriblement nerveux lorsqu'il est venu le voir. Il a vécu ce film ! C'est sa vie ! Donc s'il n'avait pas aimé, on aurait eu quelques ennuis... (rires)

    Quels souvenirs gardez vous du tournage dans le désert ?

    Faire un film et faire la guerre sont deux choses qui ont souvent été comparées par de nombreux réalisateurs. Jarhead est un film sur un groupe d'hommes perdus dans le désert attendant le début des combats et nous étions un groupe d'homme perdus dans le désert attendant la fin du tournage. Et certains acteurs ont eu quelques accès de folies, un peu comme les personnages...

    Quels sont vos prochains projets ?

    Je pense retourner à la mise en scène dans l'immédiat. J'espère aussi tourner un nouveau film à la fin de 2006 avec un budget plus faible... et en Europe cette fois.

    Propos recueillis par Eric Kervern le 13 décembre 2005

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