Avec 1,26 million d'entrées dans les salles françaises en sept jours d'exploitation, Gladiator II de Ridley Scott s'impose déjà comme l'un des succès majeurs de 2024. Le retour dans le Colisée commence donc sous les meilleurs auspices pour le réalisateur, alors que le film n'est même pas encore sorti aux États-Unis (il y sortira le 27 novembre, à l'occasion de Thanksgiving).
Gladiator II se déroule 16 ans après le film original, qui avait valu à Russell Crowe l’Oscar du meilleur acteur. Après la mort de Maximus et de Commode ( Joaquin Phoenix), Lucius, incarné par Paul Mescal, est envoyé en Afrique par sa mère, Lucilla (Connie Nielsen). Mais lorsque son pays est conquis par des empereurs tyranniques gouvernant Rome d’une main de fer, il se retrouve contraint de combattre dans le Colisée. La rage au cœur et l’avenir de l’Empire en jeu, Lucius doit puiser dans son passé pour trouver la force et l’honneur nécessaires à rendre sa gloire à Rome.
L'apogée des combats de gladiateurs
Alors qu’une suite est déjà annoncée, nous avons rencontré Jérôme France, professeur émérite d’histoire de la Rome antique, pour évoquer les combats de gladiateurs. Après nous avoir expliqué pourquoi les requins ne pouvaient pas être introduits dans un Colisée inondé, il revient sur l’origine et les enjeux de ces affrontements, qui généraient une véritable économie.
"Les combats de gladiateurs commencent sous la République, au IIIᵉ siècle avant Jésus-Christ, voire peut-être même avant. À l’origine, il s’agissait de combats organisés lors de funérailles. Très rapidement, ils sont devenus des spectacles. L’âge d’or des gladiateurs, a lieu sous l’Empire, et cela dure tout au long de cette période.
La construction du Colisée, vers 80 après Jésus-Christ, marque l’apogée des combats de gladiateurs
La construction du Colisée, vers 80 après Jésus-Christ, marque l’apogée. Avec cet édifice conçu spécialement pour ces spectacles, l’amphithéâtre ovale et ses mécanismes complexes, le Colisée devient un véritable lieu dédié aux combats de gladiateurs, aux affrontements contre des fauves et aux exécutions de condamnés livrés ad bestias (aux bêtes). Cette pratique perdure jusqu’au début du Vᵉ siècle. En gros, c’est l’expansion du christianisme qui, progressivement, met fin à ces combats. Mais à leur apogée, ils constituaient le loisir le plus populaire de l’époque."
L’historien ajoute que ces spectacles reposaient sur une véritable organisation économique :
"Ils impliquaient l’entretien des amphithéâtres, le recrutement et la formation des gladiateurs, qui pouvaient être des prisonniers de guerre, des esclaves, des affranchis ou encore des hommes libres en quête de gloire ou d’argent. Il y avait également tout un commerce lié à l’approvisionnement en animaux."
La chasse aux animaux
En effet, les animaux étaient essentiels au spectacle. Dès 202 avant J.-C., les soldats romains débarqués en Afrique du Nord, un continent riche en faune sauvage, capturent lions, hippopotames, crocodiles et girafes pour les importer à Rome. Ces animaux sont utilisés afin d’amuser le public ou lors de combats dans l’arène. Les gladiateurs affrontent donc d’autres gladiateurs, mais également des animaux sauvages. Les condamnés à mort étaient d'ailleurs jetés en pâture aux lions.
Gladiator 2 contre des babouins ? Cette scène de combat inattendue que nous promet la suite !Jérôme France commente : "Les chasses étaient organisées en Afrique, en Égypte, ou même en Germanie, où l’on capturait des ours. Ces animaux étaient ensuite acheminés jusqu’à Rome, où ils étaient gardés dans des viviers pour les maintenir en condition. L'Empereur donnait essentiellement des jeux à Rome mais il y en avait également dans les provinces où les grandes aristocraties locales offraient ces jeux à leur communauté.
Cela représentait un réel prélèvement sur l’environnement. Souvent, c’était l’armée qui supervisait ces expéditions. On a retrouvé des inscriptions attestant de ces pratiques en Allemagne et dans l’Est de la France.
Il y avait des combats d'animaux entre eux, des gladiateurs contre des animaux. Il y avait aussi les condamnés qu'on livrait aux bêtes, c'est attesté. Mais la plupart du temps, les gladiateurs combattaient surtout entre eux.
Cela représentait un réel prélèvement sur l’environnement.
C'était une véritable organisation. Par exemple, au Colisée, on commence à bien connaître tous les mécanismes qu'il pouvait y avoir. Il y avait des machineries à pousser pour faire monter des ascenseurs, afin de faire apparaître les fauves à tel ou tel endroit de l'arène, en fonction des entrées condamnées ou de gladiateurs,... On sait que les animaux, étaient acheminés jusqu'à l'amphithéâtre pour le jour du spectacle mais on ne connaît pas vraiement l'organisation concrète des spectacles."
Les combats d'animaux et de gladiateurs n'étaient donc pas aussi courants que le laisse entendre le film de Ridley Scott mais avaient néanmoins lieux afin de divertir le peuple.