De quoi ça parle ?
Ingrid et Martha, amies de longue date, ont débuté leur carrière au sein du même magazine. Lorsqu’Ingrid devient romancière à succès et Martha, reporter de guerre, leurs chemins se séparent. Mais des années plus tard, leurs routes se recroisent dans des circonstances troublantes…
La Chambre d'à côté est le film incontournable de ce début d'année ! Auréolé du très prestigieux Lion d'or au Festival de Venise, ce nouveau long métrage de Pedro Almodovar - son premier en langue anglaise - réunit deux actrices formidables qui n'avaient encore jamais joué ensemble : Julianne Moore et Tilda Swinton. L'association de ces trois talents fait des étincelles.
Si La Chambre d'à côté a été tourné en langue anglaise, il reste avant tout un film almodovarien. Les fans du cinéaste y retrouveront ce qu'ils aiment dans son cinéma.
"La situation qui est décrite dans le film n'est pas étrangère aux 22 films que j'ai déjà faits", nous indique Pedro Almodovar, en préambule de notre entretien. "C'est un film à la production totalement européenne", précise-t-il. La Chambre d'à côté n'a d'ailleurs pas été tourné à Hollywood, ni même aux Etats-Unis. Le décor représente New York, mais le film a été tourné en Espagne.
Pedro Almodovar aurait pu réaliser la comédie musicale culte Sister Act !Il ne s'agit donc aucunement d'un film hollywoodien. Le cinéaste a d'ailleurs refusé toutes les sollicitations de ce type dans le passé, notamment celle de réaliser le film Sister Act !
"Lorsque j'ai dit non aux différentes propositions américaines, ce que je rejetais c'était surtout le système de production hollywoodien. Je suis habitué à un certain type de production, faite d'une autre façon, et moins chère d'ailleurs, et très différente de la façon dont on fait les films à Hollywood."
C'est un film qui est complètement dans la continuité de tous les autres que j'ai faits avant
Et d'ajouter : "Alors c'est vrai, c'est un film qui est en anglais, mais c'est un film qui est complètement dans la continuité de tous les autres longs-métrages que j'ai faits avant et que j'ai produits avec ma société de production El Deseo.
Donc c'est un film de El Deseo qui se passe aux États-Unis certes, avec des actrices qui parlent anglais, mais c'est une œuvre qui m'appartient complètement. C'est vraiment un film à moi. D'ailleurs la moitié de l'équipe qui travaille dessus est composée d'habitués de mes films."
Précisons que ce long métrage peut aussi être une excellente entrée en matière dans son œuvre si on connait peu ou pas du tout son travail. Le propos est très universel et les comédiennes principales sont aussi une très belle porte d'entrée vers ce film.
Je ne fais pas du tout une analyse de la société américaine
"Je ne fais pas du tout une analyse de la société américaine. En fait, c'est une réflexion qui m'est propre sur la douleur, sur la mort et que je raconte en mes propres termes. Donc je me suis senti sur mon propre terrain en faisant ce film", ajoute le cinéaste.
Le film est incroyablement délicat et aborde des sujets difficiles avec une grande sensibilité et intelligence. La Chambre d'à côté est aussi une grande déclaration d'amour à l'art, et comment celui-ci nous aide à vivre. Parmi les artistes qui apparaissent, à travers leurs œuvres ou leurs noms, on peut citer Edward Hopper, Virginia Woolf, Dora Carrington....
"Je pense que c'est vraiment à travers l'art que l'on se découvre soi-même", explique Julianne Moore à notre micro. "C'est à travers une peinture, la musique, le cinéma, la littérature, mais aussi la télévision, la sculpture dans toutes les formes d'expression artistique, que l'on se découvre soi-même que l'on découvre sa propre humanité, mais aussi que l'on découvre l'autre, qu'on va à la rencontre de l'autre.
Je pense que c'est vraiment à travers l'art que l'on se découvre soi-même
Quand des oeuvres vous donnent cette possibilité de vous découvrir, mais vous donnent aussi cette possibilité de rencontrer l'autre, vous pouvez aussi avoir un reflet des thèmes qui traversent votre propre vie.
Moi, à ce titre là, l'artiste à laquelle je reviens toujours, c'est Louise Bourgeois parce que précisément, elle a n'a cessé de revenir sans se lasser sur les mêmes questions : sa mère, son rôle de femme, la transformation du rôle d'une femme...
Ce sont des sujets qui sont extrêmement porteurs, et sur lesquels je n'ai de cesse moi aussi de revenir, de l'observer. Je suis vraiment très reconnaissante que Pedro ait semé, comme ça, dans ses films, ses livres, ses peintures qui nous permettent précisément d'être dans ce rapport à soi et à l'autre.
Tilda Swinton complète : "Un des rapports les plus intimes qui s'est établi entre ce film et moi, c'est précisément que j'ai toujours été persuadée, dans ma propre vie, que quand on va vraiment mal, quand on est vraiment dans un besoin de se relier à la vie, ce qui crée ce lien-là, ce sont quatre aspects : l'amitié, la camaraderie, l'art et la nature.
Dans ce film, c'est exactement de ça dont il est question. C'est le cœur de ce film et c'est précisément sur ces quatre piliers-là que mon personnage de Martha décide d'embarquer sur ce cheminement, vers la fin de sa vie. C'est ce qui lui permet de tenir."
Propos recueillis lors du Club AlloCiné au Pathé Palace de Paris, le 16 décembre 2024