Pour les amateurs de cinéma, le nom d’Akira Kurosawa est plus que familier. Souvent cité comme l’un des cinéastes les plus influents de tous les temps par les critiques, tout comme par le public, le réalisateur japonais a connu une carrière illustre de près de 60 ans, au cours de laquelle il a réalisé des chefs-d’œuvre majeurs tels que Rashômon et Les Sept Samouraïs – entre autres.
Né en 1910 à Tokyo, Kurosawa était le huitième enfant de sa famille et aussi le benjamin du clan. C’est son père qui l’a initié au cinéma dès l’âge de six ans : il a alors grandi en regardant les westerns de John Ford ainsi que des films muets influents, qui ont ensuite façonné sa propre vision artistique.
Son enfance est d’ailleurs considérée comme une partie formatrice de son développement en tant que cinéaste, et notamment sa relation avec son frère aîné Heigo qui a travaillé, avec succès, en tant que narrateur de films muets. Cependant, lorsque le cinéma parlant s’est développé dans les années 1930, marquant un tournant majeur dans l’histoire du cinéma, c’était là une mauvaise nouvelle pour les narrateurs de films muets comme Heigo, qui ont commencé à perdre leur emploi. Déçu par ce changement, Heigo s’est suicidé, laissant Akira Kurosawa complètement dévasté. Son frère aîné est également décédé peu de temps après : le futur réalisateur est devenu alors le seul frère survivant de la famille Kurosawa, de quoi le marquer à jamais.
Cette période a profondément affecté sa sensibilité si bien qu’après avoir gravi les échelons de l’industrie cinématographique japonaise puis internationale, au plus haut sommet, un échec au box-office, avec son film Dodes’ka-den, qui l’a profondément bouleversé le conduira à une tentative de suicide, heureusement râtée.
Une carrière faite de chefs-d’œuvres...
Akira Kurosawa a réalisé son premier film en 1943, La Légende du grand judo, qui a été un succès critique et commercial mais a obtenu une véritable reconnaissance internationale avec son chef-d’œuvre de 1950, Rashômon, qui lui a valu le Lion d’or au Festival du film de Venise en 1951 et l’Oscar d’honneur du Meilleur film étranger – en plus d’une nomination dans la catégorie Meilleurs décors (Noir & Blanc) aux Oscars également. Après s’être imposé dans le domaine, il signe L’Ange ivre en 1948, qui lui a aussi apporté la célébrité et le succès, et qui mettait en scène un nouveau visage avec qui il allait former l’un des duos acteur-réalisateur les plus emblématiques de tous les temps : Toshirō Mifune. Ils ont fini par travailler ensemble sur 16 films en 16 ans.
Et le succès ne s’arrête pas là, Kurosawa réalise chefs-d’œuvres après chefs-d’œuvres, de Vivre (1952), proposant une puissante méditation sur la vie et la mort, à son film phare (et le plus connu de filmographie) Les Sept Samouraïs, son interprétation des westerns qu’il regardait enfant, et un film qui est, à son tour, devenu une source d’inspiration pour Les Sept Mercenaires (1960) de John Sturges. Certaines de ses œuvres, comme La Forteresse cachée, ont également eu une influence formatrice sur des cinéastes tels que George Lucas et Steven Spielberg.
...et d’un échec
Après Barberousse (1965), ce sera pourtant le début d’une période d’inactivité jusqu’à son échec au box-office de 1970 avec Dodes’ka-den considéré comme “non rentable” par les studios japonais – et pourtant noté 4,1 sur 5 par les spectateurs d’AlloCiné. C’est cet échec qui le conduira alors à un geste désespéré : Akira Kurosawa tentera en effet de mettre fin à ses jours en décembre 1971 en se tranchant la gorge et les poignets à plusieurs reprises.
Il n’avait également pas réussi à obtenir de financement pour ses films, des productions épiques de la 20th Century Fox et considérés par beaucoup comme démodés.
Un retour important
Heureusement, sa tentative n’a pas abouti et Kurosawa a trouvé la volonté de continuer à vivre et à produire des œuvres déterminantes, dont l’un de ses meilleurs films, Dersou Ouzala (1975), qui a remporté l’Oscar du meilleur film étranger et a reçu une médaille d’or au Festival du film de Moscou.
Au cours de ses dernières années, la vision artistique de Kurosawa a pris une tournure différente. Des films comme Rêves (basé sur ses propres rêves) en 1990 – année où il reçoit d’ailleurs un prix honorifique de la part des Oscars des mains de George Lucas et Steven Spielberg – ou encore Rhapsodie en août en 1991 ont montré sa maturité et ses réflexions sur la vie qu’il a menée. Tout comme son projet final, Mâdadayo (1993), qui signifie “Pas encore”, une œuvre inquiétante sur un vieux professeur aimé de ses élèves.
C’est un accident, après avoir glissé et s’être blessé à la colonne vertébrale, qui le confinera dans un fauteuil roulant jusqu’à la fin de sa vie. Akira Kurosawa est décédé à l’âge de 88 ans en 1998 après avoir été victime d’un accident vasculaire cérébral. Lui qui avait espéré mourir sur un tournage, ne verra donc pas son vœux exaucé.
Son héritage toutefois, lui, est immortalisé, ses films continuant d’inspirer les générations de jeunes cinéastes. Voilà qui en dit long sur le réalisateur et scénariste de renom.
Dodes’ka-den est à (re)découvrir en VOD. Tout comme la plupart de ses films à ne pas manquer.
Regardez Akira Kurosawa recevoir son prix honorifique aux Oscars 1990 :