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    Après son César du meilleur acteur, Arieh Worthalter est de retour dans Comme le feu
    Isaac Barbat
    Isaac Barbat
    -Rédacteur ciné-séries
    Biberonné aux films de genre dès son plus jeune âge, amoureux des monstres et de l'hémoglobine, ses excursions cinématographiques le mènent parfois jusqu'à Truffaut ou Duvivier… pour son plus grand plaisir !

    Au cinéma cette semaine, Comme le feu marque le retour d’Arieh Worthalter après sa performance dans Le Procès Goldman, pour laquelle il avait été récompensé d’un César. AlloCiné les a rencontrés, lui et le réalisateur Philippe Lesage.

    Comme le feu est à découvrir au cinéma dès maintenant.

    Comme le feu est un film très dense. Comment le résumeriez-vous ?

    Arieh Worthalter : Albert (Paul Ahmarani), avec sa fille Aliosha (Aurélia Arandi-Longpré), son fils Max (Antoine Marchand-Gagnon) et leur ami Jeff (Noah Parker) sont invités à rendre visite à Blake (Arieh Worthalter), un vieil ami et ancien collaborateur d’Albert, dans un endroit très reculé du Québec. Ils arrivent dans son magnifique chalet, sont accueillis, mais très vite la relation entre les adultes commence à peser sur les vacances de tous, notamment des enfants.

    Comme le feu
    Comme le feu
    De Philippe Lesage
    Avec Noah Parker (II), Aurélia Arandi-Longpré, Arieh Worthalter
    Sortie le 31 juillet 2024

    Le point de vue essentiellement adopté est celui de Jeff. Est-il le reflet du jeune cinéphile que vous étiez ?

    Philippe Lesage, réalisateur : Cette histoire, c’est mon grand-frère Jean-François, qu’on appelle Jeff, qui l’a vécue quand il était jeune avec un cinéaste. Je me souvenais qu’il avait été invité par un réalisateur à aller passer une semaine dans son camp de pêche. Plusieurs années après, je suis revenu sur cette histoire pour avoir plus de détails et je me suis dit que c’était le début d’un film.

    Ça touchait à des thèmes qui m’intéressaient déjà d’emblée et me permettait de passer de l’enfance de mes précédents films à un monde où adolescents et adultes se rencontrent. Mon imagination s’est mise à galoper et j’ai mis dans ce projet un peu d’expérience personnelle. J’ai mélangé tout ça et, en quelques semaines, j’avais une première version du scénario.

    La présence d’Arieh Worthalter dans le casting était-elle une évidence ?

    Philippe Lesage : Je ne connaissais pas Arieh au moment où j’ai écrit le film, donc je n’avais pas d’idées préconçues. Mais j’imaginais le personnage de Blake joué par un grand acteur ! J’ai fait des recherches intensives pendant deux ans pour trouver le bon Blake, au Québec, aux États-Unis et en Europe.

    La première rencontre avec Arieh s’est faite sur Zoom et nous avons fait des essais où je jouais le personnage d’Albert. Nous sommes partis du texte, en sommes sortis, avons improvisé. J’avais trouvé mon Blake !

    Les scènes de tension sont nombreuses, tournées en plans-séquences. Quelle place y était laissée à l’improvisation ?

    Philippe Lesage : C’est une question fondamentale. Le problème avec l’improvisation, c’est qu’elle peut mener à n’importe quoi, alors que c’est quand même du travail. Je laisse énormément de liberté aux comédiens, à partir du texte. Je fais beaucoup de prises donc on explore les possibilités ensemble. L’improvisation n’est pas paresseuse, elle se fait dans un cadre. Mais si les comédiens veulent se lever de table, ajouter des répliques ou changer l’ordre de la scène, ils sont libres de le faire et ça crée de la surprise pour tout le monde !

    Copyright Shellac / Tandem

    Arieh Worthalter : J’adore travailler comme ça ! Je l’impose souvent sur les tournages. Parfois on me dit non, et j’arrête (rires). Parfois, on ne peut pas le faire car le texte est trop central. Si ce n’est pas le cas, j’essaye d’introduire de l’improvisation autant que possible.

    Philippe Lesage : Ç’a été un critère sur lequel je me suis basé pour travailler avec Arieh. Paul Ahmarani et lui étaient très doués pour se réapproprier le texte et proposer de nouvelles pistes.

    La tension et les non-dits sont au cœur du scénario. Cela s’est ressenti sur le tournage ?

    Arieh Worthalter : C’est normal qu’il y ait des tensions. Il y avait de la “cabin fever”, comme pour les personnages, puisqu’on passait trois mois tous ensemble sur une pourvoirie. Les gens étaient fatigués, mais cela ajoute de la vie au tournage. On ne bosse pas dans un bureau, quoi. C’était dur, surtout pour la technique, mais c’était assez fantastique ! Une fois la journée de travail commencée, il se passe quelque chose. On ne tourne pas dans un appartement en ville mais face à un énorme lac, avec des animaux, autour duquel on mange tous ensemble le soir.

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    Philippe Lesage : Je dirais que pour beaucoup de membres de l’équipe, et pour moi, ç'a été une expérience extraordinaire. Les week-end où on se retrouvait tous ensemble étaient les plus belles fêtes que j’ai vécues dans ma vie. Il y avait une belle cohésion.

    Arieh Worthalter : Mais en vivant certaines choses en plateau, on comprenait certaines situations du film ! (rires).

    Philippe Lesage : Oui, il était nécessaire d’avoir chacun son espace. Chacun avait sa petite cabane pour se protéger, préserver ses habitudes.

    Auriez-vous aimé, comme Jeff, séjourner avec un de vos réalisateurs fétiches ?

    Philippe Lesage : Non, je ne préfère pas ! (rires) Je n’ai jamais ressenti le besoin de rencontrer les gens que j’admire. Je préfère vivre dans l’illusion que ce ne sont pas des gens centrés sur eux-mêmes, névrosés et narcissiques.

    Arieh Worthalter : Si je devais faire ce genre de chose, ça ne serait qu’avec des amis. L’entre-soi ne m’intéresse pas.

    Pensez-vous que le trio de jeunes acteurs (Aurélia Arandi-Longpré, Antoine Marchand-Gagnon, Noah Parker) puisse entretenir avec vous le même rapport que leur personnage avec Blake ?

    Arieh Worthalter : L’âge et l’expérience entraînent de la douceur dans la relation, et une forme de passation, qui serait la même pour moi avec un acteur plus âgé. Il y a une simplicité dans la rencontre qui est très évidente, très émouvante. Il y a de l’humour aussi, on se fait charrier parce qu’on est plus vieux. Ce qui est chouette, parce que c’est une manière de se rapprocher ! C’est assez beau, on se parle, on se raconte des choses.

    Philippe Lesage : Tu sentais que tu pouvais être une sorte de guide, ou de modèle ?

    Arieh Worthalter : De guide, non ! Mais on se soutient, on peut apporter à l’autre, ne serait-ce que par l’expérience. L’âge y fait quelque chose, mais pas que. Quelque chose s’installe entre les générations. Je n’avais pas ce rapport de guide avec eux, je ne joue pas à garder mon personnage entre les scènes.

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    Tout se joue en fait dans ce qu’on s’offre entre “Action !” et “Coupez !”, quand les gens sont vraiment ensemble, se donnent beaucoup et qu’une confiance s’installe. La personne en face te laisse une liberté, autant que tu lui en laisses. C’est un endroit de fragilité, le jeu : tu montres une facette de toi, selon ton partenaire. C’est un plaisir d’être ensemble, d’écouter l’autre.

    Propos recueillis pour AlloCiné par Isaac Barbat.

    Comme le feu, de Philippe Lesage et avec Arieh Worthalter, est à découvrir au cinéma dès maintenant.

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