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    Ce chef-d'œuvre avec Ingrid Bergman est à l'origine d'une expression largement utilisée aujourd'hui
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti en 1944, "Hantise" est un pur chef-d'oeuvre, qui fut couronné par deux Oscars. Le film de George Cukor est aussi passé à la postérité car il a donné son nom à un concept, largement utilisé de nos jours. Son nom ? Le "gaslighting".

    Vous connaissez peut-être l'expression male gaze. Soit la manière dont le regard masculin s'approprie le corps féminin quand la caméra filme une femme comme un objet sexuel, pour faire admirer sa plastique. Un concept qui n'est pas exactement une nouveauté d'ailleurs : il a été théorisé dans l’essai Plaisir visuel et cinéma narratif en 1975 par Laura Mulvey, une réalisatrice britannique et militante féministe.

    Mais avez-vous entendu parler du Gaslighting ? Il s'agit d'une forme de manipulation mentale dans laquelle l'information est déformée ou présentée sous un autre jour, omise sélectivement pour favoriser l'abuseur, ou faussée dans le but de faire douter la victime de sa mémoire, de sa perception et de sa santé mentale. Les exemples vont du simple déni par l'abuseur de moments pénibles qu'il a pu faire subir à sa victime, jusqu'à la mise en scène d’événements étranges afin de la désorienter.

    Quel rapport avec le cinéma ? Il a tout à voir : le terme vient directement de deux films. Le premier, Gaslight, sorti en 1940 et réalisé par Thorold Dickinson. Le second, plus fameux, qui sortira quatre ans plus tard sous le titre Hantise chez nous. Réalisé par George Cukor, le film est à l'origine une pièce de théâtre intitulée Gas Light, jouée en 1938.

    Manipulation psychologique

    La pièce, connue sous le nom d'Angel Street aux États-Unis, ainsi que les adaptations cinématographiques de 1940 et 1944, sont à l'origine du terme qui fait référence à l'utilisation systématique par le personnage principal de la manipulation psychologique sur sa victime.

    Dans la pièce, le mari cherche à persuader son épouse et son entourage qu'elle devient folle, en manipulant des détails de leur environnement. Il cherche à lui faire croire qu'elle commet des erreurs et qu'elle a une mauvaise mémoire lorsqu'elle pointe les changements.

    En l'occurrence, le titre original provient de l'affaiblissement de l'éclairage au gaz dans la maison lorsque le mari utilisait celui du grenier alors qu'il était en quête d'un trésor caché. Sa femme remarque justement ce changement et aborde le sujet, mais son mari lui affirme qu'elle s'imagine ce changement de luminosité.

    Warner Bros.

    Dans le film de George Cukor, c'est Ingrid Bergman qui est victime des manipulations de son époux. Porté par un merveilleux trios d'acteurs - Joseph Cotten et Charles Boyer épaulant l'actrice-, Hantise sera récompensé par deux oscars, dont celui de la Meilleure actrice pour Ingrid Bergman.

    Une oeuvre qui reste, par son propos, et malgré ses 80 ans, d'une grande actualité. Aux Etats-Unis d'ailleurs, l'expression gaslighting est revenue en force à l'époque de l'élection de Donald Trump à la présidence; comme ces articles du New York Times à CNN en passant par Vogue, qui titrait dans un billet "Donald Trump is gaslighting America".

    Si Hantise vous intéresse -et il est très chaudement recommandé !-, il est disponible en VOD, ainsi qu'en DVD.

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