De quoi ça parle ?
Cléo a tout juste six ans. Elle aime follement Gloria, sa nounou qui l’élève depuis sa naissance. Mais Gloria doit retourner d'urgence au Cap-Vert, auprès de ses enfants. Avant son départ, Cléo lui demande de tenir une promesse: la revoir au plus vite. Gloria l’invite à venir dans sa famille et sur son île, passer un dernier été ensemble.
Attention pépite ! Pour bien finir l'été, àma Gloria arrive dans nos salles obscures en ce 30 août. Ce premier long métrage en solo de Marie Amachoukeli va vous faire fondre.
Le film qui raconte le lien qui unit une petite fille à sa nounou est un cocktail de tendresse et d'émotion. Nous avons rencontré sa scénariste et réalisatrice Marie Amachoukeli, entre deux averses, au Festival de Cannes, où le film était présenté en ouverture de la Semaine de la critique.
En filmant les visages, en accordant une place aux textures (via des séquences animées), àma Gloria est un film centré sur les sensations, comme nous le confirme sa réalisatrice.
"Il y avait complètement cette idée. Comme je filme une toute petite petite, - elle a 5 ans et demi -, j'ai été obligée de me replonger dans mes sensations d'enfant. L'enfance est justement le moment des premières sensations, et des premiers sentiments qui vous traversent. C'est aussi bien l'amour fou que la tristesse infinie. J'avais envie que la caméra filme tout ça, que la grammaire, le montage, le rythme retranscrivent ce moment de l'enfance, où l'on est traversé par des sensations dont on ne se remet pas vraiment dans sa vie, comme un ancrage très fort."
L'enfance est le moment des premières sensations, et des premiers sentiments qui vous traversent.
Marie Amachoukeli, dont le travail a déjà été remarqué au sein d'un duo (le court métrage C'est gratuit pour les filles, coréalisé avec Claire Burger, Césarisé en 2010) et d'un trio (le long métrage Party Girl, Caméra d'or en 2014, coréalisé toujours avec Claire Burger et Samuel Theis), réalise pour la première fois un long métrage en solo, et y a mis beaucoup de choses personnelles, à commencer par... sa myopie !
"La petite est myope comme une taupe. Je suis myope comme une taupe, j'avoue ! Petit problème d'identification. Je reconnais les gens à la démarche, au mouvement, beaucoup à l'oreille et au toucher. J'ai besoin de toucher des matières et de beaucoup écouter. On a fait en sorte avec la chef opératrice et la monteuse de construire une grammaire cinématographique. La petite écoute beaucoup ; il y a beaucoup de plans sur son oreille. Les sons sont travaillés de manière à ce qu'ils prennent la première place aussi parfois." Le montage du son et la musique du film ont été confiés à Fanny Martin.
Une chanson de Nilda Fernandez, "Les Yeux dans ton regard", occupe une place importante dans le film, qui est aussi un jalon intime. "J'ai été élevée par une femme qui s'appelle Laurinda. Le film lui est d'ailleurs dédié. Elle m'a élevée jusqu'à mes 6 ans, et un jour, elle est repartie dans son pays, retrouver sa famille, sa vie là-bas, et quand on était avec elle, elle écoutait Nilda Fernandez, dont cette chanson. Il se trouve que c'était notre voisin. Il avait cette voix venue de nulle part ; j'adorais cet homme. Ce que raconte la chanson est très beau.
àma Gloria surprend aussi en mêlant prise de vues réelles et animation. Outre l'aspect poétique et mélancolique que ces images convoquent, Marie Amachoukeli y voit un clin d'oeil à l'un de ses films préférés, Mary Poppins. "Ce film m'a marquée et j'ai eu envie de m'essayer à ça très modestement, car je n'ai pas les moyens de Walt Disney". Et de préciser : "c'est fait à la main, c'est de la peinture sur verre par une vingtaine de femmes incroyables. C'est un très long travail, image par image ; on n'a pas le droit à l'erreur !"
La cinéaste avait en tête d'autres films en référence, comme Cria Cuervos "pour la mélancolie qui se dégage du visage de cette enfant", mais aussi Ponette de Jacques Doillon, ou encore Les 400 coups de Truffaut. Enfin, le prénom Cléo que porte l'héroine du film n'est autre qu'un clin d'oeil à Agnès Varda, "qui est pour moi l'enfant éternel du cinéma français et pour qui j'avais une admiration folle".
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àma Gloria, avec Louise Mauroy-Panzani, Ilça Moreno Zego, Arnaud Rebotini, sort au cinéma ce mercredi.
Propos recueillis à Cannes, le 17 mai 2023