De quoi ça parle ?
Nan Goldin a révolutionné l’art de la photographie et réinventé la notion du genre et les définitions de la normalité. Immense artiste, Nan Goldin est aussi une activiste infatigable, qui, depuis des années, se bat contre la famille Sackler, responsable de la crise des opiacés aux États Unis et dans le monde. Toute la beauté et le sang versé nous mène au cœur de ses combats artistiques et politiques, mus par l’amitié, l’humanisme et l’émotion.
En septembre dernier, ce film a créé la surprise en remportant la plus prestigieuse récompense d'un des festivals qui compte le plus dans le circuit : le Lion d'or de Venise. Ce film est plus précisément un documentaire, Toute la beauté et le sang versé, réalisé par Laura Poitras. Cette dernière est une signature dans le domaine du documentaire. Elle a été nommée à plusieurs reprises à l'Oscar, et l'a reçu pour Citizenfour en 2015.
Après Citizenfour (sur Edward Snowden) ou encore Risk (consacré à Julian Assange), Toute la beauté et le sang versé s'intéresse à nouveau à une personnalité forte : l'artiste, photographe et activiste Nan Goldin. Connue notamment pour sa série photographique "The Ballad of Sexual Dependency", Nan Goldin, à travers son œuvre, a exploré la notion du genre et les définitions de la normalité. Elle a offert une voix et une visibilité, notamment, à la communauté queer.
Toute la beauté et le sang versé, même s'il donne à explorer la vie et la carrière de cette artiste, n'est pas un documentaire biographique, ou en tout cas, pas uniquement. Le film prend le temps de montrer son travail photographique, notamment via de très belles séquences diaporama, mais va bien au-delà.
Comme l'explique la réalisatrice Laura Poitras elle-même, elle est intéressée par des "portraits d’individus qui permettent de produire une critique plus large de la société". "Dans mes films, je dresse toujours le portrait d’individus qui se battent pour une certaine idée de la justice et de la responsabilité. Nan Goldin était de ceux-là", explique-t-elle dans le dossier de presse
C'est le cas ici, puisque Toute la beauté et le sang versé est aussi et surtout un film sur la crise des opiacés aux États-Unis. L'idée était d'explorer "les liens entre le militantisme, la vie et l’œuvre de Nan Goldin". Le projet de documentaire a été initié par Nan Goldin et le collectif P.A.I.N. (Prescription Addiction Intervention Now) : celui-ci "prône la réduction des risques sanitaires et la prévention des overdoses".
Pour donner quelques éléments de contexte sur cette crise, il s'agit d'une crise entremêlant production d'un médicament et d’héroïne, qui a provoqué une vague inédite de surdoses aux États-Unis, connue sous le nom de "crise des opioïdes". "Quand Nan Goldin apprend que le laboratoire Purdue Pharma de la famille Sackler bloque un médicament préventif aux overdoses, l’artiste crée le collectif P.A.I.N. (Prescription Addiction Intervention Now), qui prône la réduction des risques sanitaires et la prévention des overdoses. Ses actions vont alors se multiplier à travers le monde."
"Pendant des années, les Sackler ont réussi à séparer leur empire pharmaceutique de leur réputation dans le monde de l’art", détaille Nan Goldin dans le dossier de presse du film. "Nous avons donc cherché à mettre un terme à cette hypocrisie, à montrer qui ils sont vraiment et à relier leur nom à la crise des opiacés dans l’opinion de toutes et tous". Toute la beauté et le sang versé parle donc également de ce que l'on peut nommer le "artwashing", à savoir utiliser le mécénat artistique pour "redorer une image et se dédouaner de la mort de centaines de milliers de personnes".
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Toute la beauté et le sang versé est un film très fort, instructif, et émouvant, notamment lorsque Nan Goldin dévoile son intimité familiale, et révèle d'où vient la rébellion qui l'anime en tant qu'artiste et activiste. Le film sort au cinéma ce mercredi 15 mars 2023.
