Pour Si tu es un homme, son premier long documentaire, le réalisateur français Simon Panay nous emmène au Burkina-Faso à la rencontre du jeune Opio, 13 ans. Ce dernier travaille à la surface de la mine d’or de Perkoa. Son seul salaire est un sac de cailloux par mois. Son père souhaite qu’il intègre une formation professionnelle, mais ne peut pas payer les frais de scolarité. Opio doit donc réunir cet argent et demande à son patron une promotion : le droit de descendre dans les galeries souterraines où l’on dit que les hommes peuvent devenir riches.
Simon Panay a déjà réalisé 4 courts métrages en Afrique de l’Ouest. Il a notamment été formé par le documentariste Souleymane Drabo.
Il a reçu en 2014 le Prix du Jeune talent de l’année de l’ARP et en 2018 la Bourse Documentaire de la Fondation Jean-Luc Lagardère. Son dernier court-métrage, Ici, Personne ne Meurt, tourné dans une mine illégale du Bénin, a été projeté dans 71 pays et a remporté 133 prix en festivals. Pour son premier long-métrage, il explore davantage le monde des mines d’or.
Dans le dossier de presse du film, Simon Panay explique sa fascination pour ce monde : "Pour mon troisième documentaire, j'ai découvert le monde des mines d’or artisanales, et c’est un monde qui m’a particulièrement fasciné. Plonger dans cet univers en compagnie des orpailleurs de la mine de Perma, au nord Bénin, m’a permis de comprendre ce qui m’échappait : leurs mentalités, leurs croyances, leurs motivations, pourquoi certains restent et d’autres partent.
Mais le tournage a été arrêté au bout de huit jours par les autorités qui nous ont confisqué notre matériel. Il y avait de la corruption autour de cette mine illégale et beaucoup d’accidents mortels. Le projet a donc été écourté mais je voulais continuer à travailler sur ce sujet et particulièrement sur les enfants dont la présence m’avait le plus marqué. En descendant dans les galeries, j’avais croisé un gamin de 8 ou 10 ans."
Je suis rentré en France avec son visage en mémoire, le revoyant à chaque projection en festival. Nous ne pouvions pas retourner dans cette mine-là, à cause des problèmes d’autorisations. J’ai donc décidé de privilégier un tournage au Burkina-Faso où j’avais déjà tourné deux documentaires. C’est un pays que je connais bien, où j’ai des attaches et un historique."
Ce projet de film a permis à Simon Panay d’engager le dialogue avec des travailleurs de la mine de Perkoa. Le metteur en scène se rappelle : "Opio travaillait avec son équipe d’orpailleurs sous une tente et passait les poussières sur un tapis pour trouver des traces d’or. C’était le plus jeune du groupe. Les autres avaient 18-20 ans. Je me suis adressé au plus âgé, comme le veut la tradition en Afrique. Mais j’ai été extrêmement étonné que tous se tournent vers Opio pour avoir son approbation ou pas sur le fait d’être photographiés.
Braver le danger pour réaliser son rêve : aller à l'école
Au Burkina, c’est le plus âgé qui décide en général. J’ai alors découvert le charisme naturel d’Opio et quelque chose de vraiment électrique et d’intense dans son regard. J’ai compris en moins de cinq minutes que j’avais trouvé mon personnage."
Ce qu'Opio souhaite plus que tout est d'aller à l'école, et pour pouvoir gagner assez d'argent il est prêt à risquer sa vie. Seuls les adultes descendent dans les profondeurs habituellement en raison du danger. Mais je jeune garçon réussi à convaincre son patron de le laisser descendre malgré ses craintes.
Pour pouvoir tourner son documentaire, Simon Panay a décidé d'accompagner Opio dans les galeries. Il explique : "Quand on décrit une réalité, je crois qu’il est important d’aller jusqu’au bout. Cela ne me paraissait pas pensable de rester en surface, de mettre une caméra sur la tête d’Opio et de me contenter de récupérer les images. Il fallait qu’on ait cette même dimension de cinéma et de point de vue qu’on a à l’extérieur.
Il a toujours été évident que si Opio était amené à descendre dans les galeries souterraines, je le suivrai, même si c’était difficile. L’endroit est exigu, il y a plein de boue et pas de lumière. On a continuellement peur qu’il y ait des effondrements", explique le metteur en scène.
Il ajoute :"A la mine de zinc, d’à côté, il y a eu un effondrement trois mois après la fin de notre tournage. Huit mineurs sont morts dans les galeries. Le cinéma est un vecteur qui peut amener du changement. C’était donc essentiel de documenter la vie de ces enfants car à travers eux, on raconte le destin de milliers d’autres."
Un film prenant à voir au cinéma dès ce mercredi.