En novembre 2010, nous étions quelques privilégiés à arpenter les plateaux de Pinewood, à la recherche de Jack Sparrow et ses pirates. Suivez le guide !
Avec son compère Ted Elliott, Terry Rossio fait partie des scénaristes incontournables du petit monde du blockbuster hollywoodien. Le tandem a ainsi à son crédit pas moins de quatre franchises : Shrek, Zorro, Benjamin Gates et Pirates des Caraïbes, dont ils ont tous deux signé les quatre scripts... aidés sur ce nouvel opus opus par une recrue de choix, un certain Johnny Depp. Direction la cantine de Pinewood pour un tête à tête avec ce spécialiste ès superproductions.
Pirates des Caraïbes, épisode 4
"Terry Rossio : Nous avons cet incroyable univers iconographique autour des pirates et du monde de la mer et de ses légendes, ses créatures... Nous avons exploré un grand nombre de ces histoires, que ce soit le Hollandais Volant ou Davy Jones. Mais il restait beaucoup de choses à raconter au sein de cet univers, comme la fontaine de jouvence, Barbe-Noire, les sirènes, les zombies des Caraïbes... Ce sont des éléments qui font partie de l'imagerie commune pour la plupart des gens, même s'ils n'en ont pas de vision très précise. Ce quatrième film, c'est l'occasion d'explorer ces histoires et ces personnages. Quand j'ai travaillé sur le scénario de Shrek, c'était la même chose : les gens avaient une vague représentation des ogres. Maintenant, quand vous dites "ogre", les gens pensesnt à Shrek. Nous avons réussi à faire ça avec Davy Jones sur la saga Pirates des Caraïbes. Sur le premier film, on ne pensait pas du tout à une suite. On pensait même que ce serait le dernier film de pirates ! Mais le succès de la trilogie a convaincu les producteurs de poursuivre l'aventure. D'autant qu'il y avait encore des éléments à explorer, des zones d'ombres, des non-dits... Grâce aux fans, nous pouvons poursuivre les aventures de Jack Sparrow : de toute façon, ce sont eux qui ont le pouvoir. Les fans décident !"
Décomplexifier le scénario
"Je comprends les gens qui trouvaient les deuxième et troisième films trop complexes... même si ça m'intrigue. Car les fans adorent souvent les choses compliquées, avec une mytholgie complexe et un univers riche. Dans les séries comme Lost, c'est quand même très compliqué ! Il faut être un fan pour comprendre ce qui se passe. Et on aime Lost pour cette complexité : un néophyte est évidemment perdu devant Lost, mais un fan comprend tout. C'est en suivant la série qu'on la comprend, et la complexité récompense cette fidélité. Donc même si je comprends ce reproche sur Le Secret du Coffre Maudit et Jusqu'au Bout du Monde, je ne peux m'empêcher de me dire que ces critique sont faites par des gens qui ne sont pas fans et qui ne veulent pas faire l'effort de se plonger dans notre histoire. Ce que je peux comprendre... Mais après, qui écouter ? Le plaisir de cette franchise, c'est d'offrir aux fans ce qu'ils adorent : noter tous les détails, voir et revoir les films... Au vu de la popularité des trois premiers films, nous avons fait le bon choix je pense. Mais ce n'était pas forcément idéal pour des gens qui attendaient un blockbuster estival simple à comprendre. Maintenant, il y a une grande différence entre une trilogie dans laquelle les trois films sont liés et dans laquelle on doit laisser de la place à de nombreux personnages différents, et un film comme ce nouvel opus qui est plus comme un James Bond, un film qui fait certes partie d'une franchise, mais qui a une unité et une globalité, un début un milieu et une fin. C'est très différent, et ce nouveau film ne repose que sur lui-même. Il est donc par définition moins "complexe"."
Les nouveaux personnages
"Nous voulions adapter, ou du moins s'inspirer du livre On stranger tides de Tim Powers. Or ce livre traite de Barbe-Noire. C'était donc logique de retrouver ce personnage dans notre film. Même chose pour les sirènes. Nous voulions par ailleurs offrir à Jack Sparrow un alter-ego féminin en terme d'action, de caractère et de dialogue, un personnage susceptible de créer une romance : c'est le personnage d'Angelica interprété par Penélope Cruz. Concernant Philip et Syrena, on pourrait croire qu'ils "remplacent" Will Turner et Elizabeth Swann. Mais leur rôle est différent au sein de la narration de ce film, notamment parce que Syrena... est une sirène. Une chose que les spectateurs n'ont pas forcément saisie, c'est que c'est Keira Knightley le personnage principal de la première trilogie : l'histoire démarre avec elle, elle est au centre de tous les événements et sa vie s'en trouve bouleversée à jamais. Elle débute comme une petite fille qui rêve de pirates et termine en reine des pirates. C'est un peu la même chose avec Orlando Bloom. Alors que Philip et Syrena n'ont pas le même rôle dans ce quatrième film."
Un nouveau réalisateur, Rob Marshall
"Gore Verbinski er Rob Marshall ont deux méthodes de travail vraiment différentes. On sent la formation et l'expérience théâtrale de Rob dans son travail : il est très proche des acteurs en terme de jeu et de mouvements. Gore est plus attaché à l'image et se concentre sur l'histoire. Ce sont deux approches aussi intéressantes l'une que l'autre. Rob aime beaucoup répéter également : il explore d'abord la scène avec les comédiens, avant de s'intéresser aux caméras et à l'aspect technique. Gore est plus fou ! Il adore tourner dans des endroits impossible, se faire déposer dans un lieu reculé en hélicoptère avec sa caméra super 8 ! (Rires)"
La 3D
"Nous n'avons rien écrit de spécifique pour le relief. L'idée avec ce film est d'offrir une expérience immersive plutôt que faire sortir des trucs de l'écran. Une scène majeure avec les sirènes par exemple, a été pensée pour offrir une vraie immersion au spectateur. Même chose pour la jungle, avec un résultat vraiment cool. La 3D a un vrai intérêt dans ces cas-là, car on a l'impression d'être au coeur de la jungle, de sentir les arbres, de voir les ruines d'un fortin au loin... Nous n'avons donc pas créé de scènes pour la 3D, nous avons surtout conçu le film comme une aventure immersive."
Les zombies
"Les trois premiers films mêlent l'aventure, l'action, la comédie, la romance... et le fantastique avec les histoires de fantômes ou les monstres comme Davy Jones. Il y a dans la première trilogie une approche assez macabre. C'est dans cette optique que nous avons approché les zombies de ce quatrième film."
Jack Sparrow et Barbossa
"Jack Sparrow et Barbossa ne sont pas ennemis : ils leur arrivent même de s'allier si le besoin s'en fait sentir. Le coeur de leur relation, c'est que Barbossa est presque amoureux de Jack Sparrow. Ou plus précisément, c'est qu'il veut être Jack Sparrow. Quand il le regarde, il l'envie et en même temps il ne le comprend pas. Ce sont un peu les deux rock-stars de leur monde, ces deux personnages. Barbossa est flamboyant, larger than life, il veut être le numéro un... Et soudain il tombe sur ce Jack Sparrow qui a toujours un coup d'avance sur lui. Et il ne comprend pas comment, et il est du coup intrigué par ce personnage en même temps qu'il le hait. C'est une relation amour/haine."
Ecrire avec Johnny Depp
"Contrairement aux autres films, nous avons pu travailler le scénario avec Johnny Depp. Et Johnny a apporté des pistes, des scènes et même des idées de personnages. Souvent, l'inspiration nous vient après un bon dîner bien arrosé. Vers 5 ou 6 heures du matin, un verre de bon vin à la main alors que le soleil se lève sur Los Angeles, c'est là que nous avons les meilleures idées. (Rires)"
Un scénariste sur le plateau
"A Hollywood, si un réalisateur ne veut pas du scénariste sur le plateau, il n'y est pas invité. C'est souvent la preuve d'un manque de confiance du réalisateur. Si au contraire il ne craint pas la présence du scénariste sur le tournage, c'est une relation saine. Gore Verbinski er Rob Marshall ont confiance en eux et sont ravis que les scénaristes soient avec eux sur le plateau. Ca se passe donc très bien. Sur le tournage, il m'arrive de retoucher des scènes, de travailler avec les comédiens, de voir si quelque chose ne manque pas à l'histoire... Parfois, on se rend compte qu'il y a une opportunité pour ajouter quelque chose. A ce moment-là on en parle avec le producteur et le réalisateur et on décide ensemble. (...) Les scénaristes sont souvent frustrés, car ils ont une certaine vision de leur histoire, qui n'est pas forcément celle du réalisateur. Mais je crois qu'il faut toujours essayer d'atteindre un objectif impossible : c'est ce qu'ils font chez Pixar. Individuellement, personne ne peut atteindre le but fixé ; mais collectivement, avec l'apport de chacun, ils atteignent ce but. Il ne faut donc pas limiter une histoire à une seule vision et les capacités créatives d'une personne : il faut que mon travail complète celui du réalisateur, celui des acteurs et celui des autres membres de l'équipe pour parvenir au but que nous nous sommes fixés. Sinon, on n'y parvient pas. Donc les frustrations ponctuelles sont vite balayées par le plaisir de collaborer avec d'autres talents pour atteindre une vision. Ca peut être frustrant individuellement, mais le travail collaboratif vous emmène vers des endroits que vous n'auriez jamais atteint tout seul."
Méthode de travail
"Je travaille avec un tableau dont la taille est très précise (3 pieds par 4 pieds), sur lequel j'épingle des cartes d'une taille très précise sur lesquelles j'écris avec une police de caractère très précise. Pourquoi ? Simplement pour se donner un cadre et limiter les personnages et les scènes à l'essentiel : c'est important de faire ce travail dès l'écriture car ça aide l'équipe à visualiser le film, à évaluer le budget et ça aidera au final les spectateurs qui seront conrontés à un nombre "gérable" de personnages et de lieux. C'est comme la poésie : il y a un format précis, dans lequel vous faites rentrer l'histoire que vous souhaitez raconter."
Plus de technologie pour plus de libertés narratives
"Mon approche, c'est de proposer aux équipes des effets visuels mais aussi aux comédiens, aux cascadeurs, aux équipes techniques et aux réalisateurs de nouvelles choses à faire et à tester. Par exemple en créant un Davy Jones tel qu'il est présenté dans Le Secret du Coffre Maudit et Jusqu'au Bout du Monde, qui était un véritable défi en termes d'effets visuels. Je ne cherche pas à leur donner une nouvelle explosion ou un nouvel effet "fond bleu" à faire ; l'idée est de repousser les limites et d'utiliser la technologie pour faire quelque chose d'inédit. C'est la même chose pour les scènes d'action : il ne faut pas que ce soit une routine pour les équipes d'effets spéciaux et de casccdeurs ; il faut qu'ils se disent que la conception risque d'être compliquée et difficile, mais qu'ils en seront fiers quand ce sera en boîte. Il faut donc utiliser cette technologie à notre avantage et réfléchir à ce qu'on peut en faire. (...) Dans ce nouveau film par exemple, il y a cette poursuite dans les rues de Londres où Johnny saute de chariot en chariot ainsi qu'une séquence avec les sirènes : deux scènes dont nous sommes très fiers."
Un spoiler ?
"Et bien... Vous apprendrez au cours du film comment Barbossa perd sa jambe."
Un vrai spoiler ? Judi Dench et Keith Richards par exemple...
"Tiens donc ? Il y a des photos de Keith Richards et Judi Dench au département costume ? C'est vrai, ça ? Je ne suis pas au courant ! (Rires) Vous entendez ça, il y a des photos de Keith Richards et Judi Dench au département costumes ! Ca devrait signifier qu'ils jouent dans le film, non ? Vous êtes très observateur en tout cas. (Rires) Mais il n'y a pas de photos de Mick Jagger par contre..."
Pirates des Caraïbes, épisode 5 ?
"Nous avons un bureau ici, où nous gardons et développons de nouvelles idées. Mais encore une fois, c'est le public qui décide. Le public et Johnny Depp. (Rires) Nous avons un univers très riche peuplé de fantômes, de serpents de mers, de personnages hauts en couleurs... Il y a encore plein de directions intéressantes à explorer. Mais difficile d'en dire plus pour le moment : on en saura plus en juin 2011, après la sortie du film et les résultats au box-office."
Propos recueillis par Yoann Sardet
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