Il est difficile d’évaluer l’exactitude historique des bâtiments, des costumes et du mobilier, d’autant que le premier épisode nous montre quelques images d’une Venise… avec des demeures de la Renaissance. Rares sont les productions américaines qui réalisent un vrai travail de recherche sur ce point, à l’exception notable de Last Kingdom.
Las, il faut de toute façon faire l’impasse sur la qualité historique de cette série qui ne fait qu’emprunter des noms et de rares événements avérés pour construire son récit et se concentrer sur celui-ci et sur les interactions entre les personnages. De la même manière, il ne faut pas être trop chatouilleux sur la cohérence des repères espace-temps : nous sommes dans une série américaine.
Au niveau des personnages et des intrigues, néanmoins, on égale Game of Thrones, notamment, et c’est précisément rare pour des productions américaines, dans les dialogues. Kubilaï Khan est très éloigné des images d’Epinal qui nous en sont parvenues de ce côté de l’Oural, c’est un Khan au ventre de Bouddha, à la tête mongole, au caractère irascible et imposant aux accents shakespeariens. Un vrai khagan. Si l’histoire de Marco Polo est très éloignée de ce que son propre récit nous en a fait parvenir et s’il demeure un héros naïf et observateur, sa vie dans l’entourage du grand Kubilaï est une quête initiatique à l’image de son entraînement tao et des épreuves qui parsèment son destin. Les autres personnages sont attachants sans être stéréotypés, qu’il s’agisse de l’impétueux Jingim, fils du khagan, du vieux et fidèle Youssouf, de Jia Siado, le chancelier chinois psychopathe, de Sifu-100-yeux, moine aveugle ou de l’impératrice Chabi, noble au-delà du possible mais intraitable sur les questions du palais, sans oublier Khutulun, interprétée par l’exceptionnelle Claudia Kim.
Enfin, la réalisation, multiple, comme souvent dans les séries contemporaines, est somptueuse et esthétisante.
On regrettera qu’aucune suite n’ait été donnée à la série, laissant la fin de la deuxième saison sur un énorme point d’interrogation en forme de crucifix planté dans la steppe.