D'origine arménienne, Achod Malakian de son vrai nom est contraint de fuir avec sa famille le génocide qui a lieu dans son pays d'origine. Ayant trouvé refuge à Marseille, il entre à l'École Navale des Arts et Métiers d'Aix-en-Provence dont il sort en 1943 avec un diplôme d'ingénieur. Il se laisse alors tenter par le journalisme, devient rédacteur en chef du magazine Horizon (1944-1946), puis critique de cinéma à la radio marseillaise. Peu après, il monte à Paris et devient l'assistant-réalisateur de Robert Vernay en 1949.
Auteur d'une vingtaine de courts métrages entre 1947 et 1950, il fait une rencontre déterminante en la personne de Fernandel, qui accepte de jouer dans son premier long métrage, La Table aux crevés, en 1951. De cette fructueuse collaboration naîtront quelques films à succès (Le Fruit défendu, Le Mouton à cinq pattes, Le Grand chef...), dont le plus emblématique reste La Vache et le prisonnier (1959), fort de plus de 8,8 millions de spectateurs. Autre monstre sacré à lui apporter la gloire : Jean Gabin. A l'actif de ce formidable duo, de véritables perles du cinéma populaire français dans les années 60 : Le Président (1961), Un singe en hiver (1962) et deux polars également interprétés avec brio par Alain Delon - Mélodie en sous-sol (1963) et Le Clan des Siciliens (1969).
Tenté par une carrière internationale, Henri Verneuil part en Italie et au Mexique poursuivre son oeuvre. Anthony Quinn, avec qui il tourne La Vingt-cinquième heure (1967) et La Bataille de San Sebastian (1968), l'accompagne dans ses démarches. Le réalisateur s'entoure également de stars hollywoodiennes (Dirk Bogarde, Yul Brynner, Henry Fonda) pour son film d'espionnage Le Serpent en 1972. Dans les années 70, il s'oriente principalement vers le registre de l'action, genre auquel il a donné ses lettres de noblesse en France avec le très viril Cent mille dollars au soleil (1964). Et ça tombe bien, puisque Jean-Paul Belmondo, au casting de ce film, sera de nouveau de la partie pour les très efficaces Peur sur la ville (1975) et Le Casse (1971) et le moins glorieux Morfalous (1984).
Entre deux productions commerciales, Henri Verneuil tente de marcher sur les plates-bandes d'Yves Boisset en proposant un cinéma plus engagé avec trois "films enquêtes" : Le Corps de mon ennemi (1976), critique à l'égard des notables de province, I... comme Icare, nommé au César du Meilleur scénario en 1980, et Mille milliards de dollars (1982), dénonciation en bonne et due forme de la mondialisation économique naissante. Dans la deuxième moitié des années 80, Henri Verneuil déserte, à l'instar de Belmondo, la scène cinématographique française pour n'y revenir qu'en 1991 avec l'autobiographique diptyque Mayrig / 588, rue paradis, récit de son enfance et de ses souvenirs d'immigrés. Cinq ans plus tard, couronnement d'une belle carrière, il recevra un César d'honneur pour l'ensemble de son œuvre.
G.M.