Le Genou de Claire est le premier film de Rohmer dont j'ai entendu parler mais c'est le quatrième que je vois. Encore un été ensoleillé, mais cette fois-ci, le personnage principal est Jérôme, interprété par Jean-Claude Brialy, 35 ans, diplomate. Il cherche à vendre sa maison familiale dont il a hérité près d'Annecy, sachant qu'il a de grandes chances d'aller vivre à l'étranger avec sa fiancée qu'il doit prochainement épouser.
Par un hasard tout à fait rohmérien, il rencontre une vielle connaissance, Aurora, qui va un peu troubler ses plans. Elle est écrivaine et loge chez une amie qui a une fille, Laura. Et cette dernière semble ne pas être indifférente au charme de Jérôme.
Que faire alors ? Explorer, assouvir sa curiosité plus que son désir. Et s'enfermer dans les sempiternels débats en le faisant. Qu'est- ce que l'amour ? Ne vaut-il pas mieux rester seul comme le clame Aurora: "La solitude est le plus grand plaisir de ma vie actuelle et tu dis qu’il faut vivre selon son plaisir." Mais le plus intéressant, ce sont les échanges entre Laura et Jérôme. Lui, homme de 35 ans, elle jeune adolescente mais qui montre un recul étonnant et une précocité habituelle chez Rohmer. "Au fond, je ne suis pas contente d’être amoureuse. Je tape des pieds, je ne m’intéresse à rien. Je le vis plus, ce n’est pas drôle du tout." En effet, pourquoi se mettre dans ces états ?
Mais tous ces débats volent en éclat lorsque Jérôme voit Claire. Toute son attention se concentre sur son genou qu'il trouve parfait. Où lorsque tout le désir, toute l'obsession, toute la concupiscence se réduit telle une métonymie sur le petit genou d'une adolescente. Ce petit désir coupable mais en même temps tellement innocent, comment le gérer. Par le faux accident dans un geste rohmerien provoqué par Aurora ? Ou par une compassion forcée qui permet de l'assouvir ce désir. Comme le dit Jérôme, "Une caresse doit être consentie." Et lorsque le désir est ardent, il ne faut pas le perdre de vue. Mais obtenir ce consentement n'est pas une chose aisée, cela requiert une certaine habileté. Et c'est tout le jeu de l'amour, de la romance, de l'été. Il faut parfois être prudent, surtout avec de si jeunes filles, qui sont telles les nymphettes décrites par Nabokov dans Lolita. Mais parfois, il faut prendre des risques, et un peu forcer le destin. Et pourtant, à quoi servent tous ces débats alors que Jérôme avoue lui même la chose suivante: "Tous mes succès me sont venus par surprise. Le désir a suivi la possession."
Hormis ces débats, ces dialogues, ce petit côté sulfureux, le Genou de Claire, c'est avant tout la naissance d'un désir irrationnel, d'une passion qui ne demande qu'à être satisfaite. La photographie du côté d'Annecy est merveilleuse, ainsi, certains plans sont de véritables enchantement, lorsque par exemple on vogue sur l'eau sur le lac. Le Genou de Claire provoque une émotion fugace, c'est en cela qu'il est précieux.