Douches froides a été présenté en 2005 au Festival de Cannes, dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs.
Douches froides est le premier long métrage du Tourangeau Antony Cordier. Issu d'un milieu ouvrier, il étudie le cinéma à la FEMIS, en section montage. En 2000, il tourne son film de fin d'études, Beau comme un camion, un documentaire, primé à Clermont-Ferrand, dans lequel il interroge différents membres de sa famille à propos de leur rapport au travail et aux études. En 2001, il signe un court métrage qui, comme Douches froides, conte une histoire d'amour sur fond de lutte des classes. Ce court, comme son premier long, sont produits par Why Not, la société qui finance, entre autres, les films de Desplechin, Podalydès ou encore Richet.
"Le monde ouvrier accorde beaucoup d'importance à la notion d'effort, de sacrifice : il faut souffrir dans la vie, il faut en baver. Je voulais voir jusqu'où ça pouvait nous mener, cette logique du sacrifice, dans tous les domaines, et en particulier dans le domaine du coeur. Qu'est-ce qu'on a à sacrifier en amour ? Pourquoi ? Quel plaisir est-ce que ça peut procurer ?"
Le héros du film est interprété par Johan Libéreau, qui fait dans Douches froides ses premiers pas au cinéma : "C'est quelqu'un qui vient de la rue, comme on dit, ce n'est pas un comédien de profession : il a fait de la chaudronnerie, de la pâtisserie...", précise le cinéaste, qui avait dû faire un casting de 250 garçons, pendant un an et demi, pour trouver son Mikael. Libéreau a passé son casting en même temps que Pierre Perrier, qui incarne son ami/rival Clément dans le film. Pendant leurs essais, se souvient Antony Cordier, "il y avait entre leurs deux personnages (...) une opposition intelligente, pleine de fascination mutuelle. On sentait que Johan enviait la prestance de Pierre, qui lui-même enviait l'aspect canaille de Johan. Ce n'était pas la lutte des classes, ni les bons contre les méchants, c'étaient deux formes masculines opposées de la séduction, donc c'était parfait."
Si Johan Libéreau est un débutant, sa jeune partenaire est connue des cinéphiles : fille du comédien Jean-François Stévenin, Salomé Stevenin a déjà joué entre autres dans Love me de Laetitia Masson (2000) et Mischka réalisé par son père en 2002. A propos du travail avec les deux comédiens, le cinéaste note : "Johan et Salomé sont fondamentalement différents, que ce soit socialement, mentalement ou dans leur façon d'appréhender la vie quotidienne, et au tournage on pouvait s'appuyer sur cette différence (...) Pendant le montage, j'ai lu une phrase de Jacques Piasenta qui m'a fait pensé à mes deux petits acteurs : il comparait deux athlètes qu'il avait entraînées. Eh bien Johan et Salomé, c'est comme Marie-José Pérec et Christine Arron : l'un dit tout le temps oui, et l'autre dit tout le temps non, mais ce sont des bêtes de compétition."
Les parents de Clément son interprétés par Aurélien Recoing et Claire Nebout, deux comédiens qui étaient déjà mari et femme dans Trois couples en quête d'orages, sorti en salles en avril 2005, quelques semaines seulement avant Douches froides.
Si les protagonistes de Douches froides sont des adolescents, le cinéaste se défend de faire un portrait sociologique des jeunes gens d'aujourd'hui : "Jamais il n'a été question de faire une chronique naturaliste de l'adolescence, surtout pas ! (...) Non, ce qui m'intéresse, ce sont les différences, et à 17 ans, la question de la différence se pose de manière très crue -la différence sociale, la différence sexuelle... A la limite, oui, ce qui m'intéressait, c'est qu'à l'adolescence, on peut être très libre sexuellement, très partant pour expérimenter des "figures". Faire l'amour à trois, ça ne veut pas forcément dire qu'on est partouzeur dans l'âme, ça peut juste vouloir dire qu'on a un rapport très sensuel aux amitiés... et qu'on cherche les limites et le sens de sa propre sexualité. Et puis, à 17 ans, on peut encore voir la sexualité comme une performance. Le nombre, la durée, les positions, l'endroit où "on l'a fait", ça a de l'importance. Je trouve que c'est touchant."
Antony Cordier explique pourquoi il a choisi de situer son film dans l'univers du judo : "Si j'ai commencé à écrire sur le judo, c'est parce qu'il s'agit du sport que je connais le mieux, pour l'avoir longtemps pratiqué, mais j'avais donc l'idée de changer de sport en cours d'écriture, de parler d'athlètes par exemple. Mais l'histoire du régime que s'impose Mickael a pris tellement d'importance que le judo est devenu indéboulonnable (...) une équipe de judo, c'est comme une microsociété utopique où les handicaps de poids (beaucoup trop léger, un peu obèse...) deviennent des avantages... On ne voit jamais de judo au cinéma, mais, en France, c'est le 3e sport en nombre de licenciés." Un des rares films français récents dans lesquels on peut assister à des scènes de combats de judo (entre enfants) est L'Emploi du temps de Laurent Cantet avec, déjà, Aurélien Recoing.
L'infirmière compréhensive qui dialogue avec Vanessa est interprétée par une réalisatrice, Dominique Cabrera, auteur entre autres de L'Autre Côté de la mer et Le Lait de la tendresse humaine. Elle avat déjà fait l'actrice dans Un petit cas de conscience de Marie-Claude Treilhou.
Le poème étudié en cours d'anglais au début du film est en fait une chanson de PJ Harvey, grande figure du rock féminin britannique. Il s'agit du morceau Meet ze monsta, qui figure sur l'un des plus fameux albums de la chanteuse, To bring you my love (1995). A propos de chanteuse, signalons par ailleurs que la bande-originale de Douches froides comporte plusieurs morceaux extraits de premier album (en anglais) d'une célèbre actrice française : Julie Delpy.