Swan s'inspire de Phil Spector, producteur emblématique des années 60 qui travailla notamment avec les Beatles. Personnage haut en couleur qui révolutionna l'enregistrement en studio par l'utilisation de la stéréo, il est revenu sur le devant de la scène pour le meurtre de Lana Clarkson en 2003 dont il fut reconnu coupable. Il purge depuis 2009 une peine de 19 ans de prison.
Paul Williams, qui joue le rôle de Swan, a également composé la musique du film, qui cite avec talent les différents courants musicaux de l'époque (pop, folk, rockabilly, glam rock...). Il prête sa voix au personnage de Winslow lorsque celui-ci chante en studio grâce à son vocoder. Paul Williams a notamment composé la musique du Canardeur de Michael Cimino et d'Ishtar d'Elaine May. On a pu le voir en tant qu'acteur dans Les Doors d'Oliver Stone, pour rester dans le domaine musical, ou encore dans Les Lois de l'attraction. Il a également doublé le Pingouin dans deux des dessins animés Batman, celle de 1992 et celle de 1997.
A l'époque du tournage de Phantom of the Paradise, George Lucas, grand ami de Brian De Palma, errait, après avoir fini American Graffiti, à la recherche d'idées pouvant nourrir le scénario de Star Wars Episode IV : un nouvel espoir. Il atterrit sur le tournage de Phantom of the Paradise et fut fortement influencé par ce dernier dont il s'inspira pour son film. Il emprunte notamment à De Palma le masque lumineux, la respiration provenant d'un appareil et la voix rauque de Winslow défiguré pour nourrir le personnage de Dark Vador. George Lucas reprit également l'idée du bandeau défilant pour introduire le film.
Phantom of the Paradise est effectivement un paradis, celui de références aux années 70 et à l'industrie de la musique. La société de Swan dans le film se nommait à l'origine Swan Song (Le Chant du Cygne), mais les studios firent pression sur De Palma pour qu'il change le nom en Death Records à cause de l'existence du label Swan Song Records. Le logo déjà impressionné sur la pellicule est effacé pour éviter d'avoir à retourner les scènes. Par ailleurs, le groupe Juicy Fruits dans le film est un hommage au groupe de Paul Williams (acteur et compositeur du film) Juicy Lucy. Enfin, dans un plan où la secrétaire regarde le dossier de Winslow Leach, les autres dossiers portent les noms des grandes stars de l'époque, dont Bette Midler, Dick Clark, Peter Fonda et Alice Cooper. On retrouve également dans le film plusieurs parodies de groupes qui existent comme Kiss ou les Who.
Le film fait un flop à sa sortie : boudé aux Etats-Unis, le box-office s'avère être satisfaisant uniquement à Winnipeg, au Canada, où le film est resté à l'affiche pendant des mois. Pourtant, en 1975, il est nominé pour l'Oscar de la meilleure partition de chansons et adaptation musicale (décerné cette année à la musique de Gatbsy le magnifique de Nelson Riddle), décernée à Paul Williams qui est également appelé pour le Golden Globes de la meilleure musique l'année suivante. Phantom of the Paradise obtient cependant le Grand Prix du festival du film fantastique d'Avoriaz en 1975.
Phantom of the Paradise est un pot pourri de références cinématographiques. De Palma y réalise plusieurs clins d'oeil à quelques chef-d'oeuvres du 7ème art. Il reprend les couleurs psyché de l'ouverture de Sueurs Froides d'Hitchcock et parodie la célèbre scène de la douche de Pychose. Il fait aussi référence à quelques classiques du film d'horreur, une tenue de Swan ressemblant fortement à celle de Bela Lugosi dans le Dracula de Tod Browning, alors qu'il revient justement de Transylvanie. Le Faust de Murnau est cité via une phrase de Swan ("L'encre n'a aucune valeur pour moi") et les caractères gothiques du contrat qu'il fait signer à Leach avec son sang. Enfin, on retrouve un clin d'oeil au grand plan séquence d'ouverture de La Soif du mal, d'Orson Welles, dans un split-screen du film, ainsi qu'un hommage au Cabinet du docteur Caligari, de Robert Wiene, dans la scène où Beef sort dans un cercueil.
De Palma sait apprécier les grands classiques de la littérature fantastique de son temps. Bien évidemment, Phantom of the Paradise fait immédiatement penser au Fantôme de l'opéra de Gaston Leroux, adapté pas moins de sept fois au cinéma (avec une curieuse version en compagnie de Scooby-Doo) et dont le réalisateur s'inspire pour la trame de son film. Le Faust de Goethe, qui a de même été maintes fois porté à l'écran, dont la plus belle version reste peut être La Beauté du Diable, de René Clair (aux côtés du Faust de Murnau précédemment cité), sert à De Palma pour la construction du personnage de Swan, sorte de diable contemporain, qui enchaîne les jeunes talents à sa société par contrat ensanglanté tout comme le faisait Méphistophélès avec les âmes de ses malheureux signataires. Enfin, Le Portrait de Dorian Gray finit de rendre ce mélange de références littéraires homogène, jouant sur la perversité du personnage qui n'apparaît jamais sur son visage mais qui ne fait que grandir. Il a lui aussi été adapté pour le grand écran, notamment dans une magnifique version d'Albert Lewin.
Sissi Spacek a travaillé comme habilleuse sur le tournage pour aider son compagnon Jack Fisk, qui était chef décorateur sur Phantom of the Paradise. Selon ce dernier, elle fit si mal son travail qu'elle fit perdre un jour complet de tournage à l'équipe. Elle a aussi auditionné pour le rôle de Phoenix mais a dû le laisser à Jessica Harper.
Selon William Finley, la presse d'enregistrement dans lequel son personnage Winslow a été défiguré était un véritable modèle de la machine en question. Inquiet de savoir si la scène était sécurisée avec un tel engin sur le plateau, l'équipe lui assura qu'il ne courait aucun risque. Les cales censées empêcher la machine de totalement se refermer ne furent pourtant pas suffisamment résistantes face à la puissance de la presse et ce ne fut que grâce à sa rapidité d'action que Finley ne fut pas réellement défiguré. Le cri qu'il pousse dans le film est en réalité un vrai cri de terreur, l'acteur ayant failli être sérieusement blessé.
Le personnage créé par De Palma, Winslow Leach, est nommé d'après le mentor du réalisateur, Wilford Leach, alors que le nom de Philbin, l'aide de Swan, est tiré de Mary Philbin, l'actrice qui tint le rôle de Christine dans la première adaptation cinématographique du Fantôme de l'opéra, de Rupert Julian et duquel s'inspire également le film de De Palma. De même, pendant la scène à l'aéroport, Beef est entouré de journalistes dont l'un se nomme "Mr. PIzer". Il s'agit probablement d'une référence au directeur de la photographie du film, Larry Pizer.
Betty Buckley est plusieurs fois présente à l'écran dans Phantom of the Paradise. Seulement, elle n'est pas actrice, bien qu'elle ait été initialement auditionnée pour un rôle. Si elle ne fut pas retenue en tant que comédienne, De Palma la rappelle pour ses talents de chanteuse et pour la justesse de sa voix. Ainsi, l'audition de Swan et les séquences d'orgies donnent un aperçu de sa capacité vocale. Le réalisateur lui donnera finalement le rôle de la prof de gym dans son prochain film, Carrie.
C'est à l'université que William Finley rencontre Brian De Palma avec qui il forge une grande amitié. Ce dernier lui offre des rôles dès ses premiers films, court-métrages comme Woton's Wake, puis longs-métrages tels que Meurtre à la mode, The Wedding Party et Soeurs de sang. C'est avec Phantom of the Paradise qu'il passe à la postérité, bien que le film mette du temps à devenir culte. L'échec que fut le film à sa sortie empêcha malgré tout Finley de décrocher d'autres bons rôles, mais il resta toujours en bons termes avec De Palma qui continua à le faire apparaitre dans ses films, qu'il s'agisse de Furie, Pulsions et même du Dahlia noir.
Le film de De Palma devait initialement s'appeler "The Phantom". Mais après les soucis auxquels il dut faire face pour qu'Universal, détenteur des droits du "Fantôme de l'opéra", accepte une adaptation de l'oeuvre, le réalisateur se fait de nouveau attaquer à cause du titre de son film. Déjà utilisé pour une bande-dessinée ("Le Fantôme du Bengale" en français), De Palma doit s'incliner et changer le nom en Phantom of the Paradise. Un premier titre alternatif n'avait pas pu voir le jour, "Phantom of the Fillmore", toujours à cause de problèmes juridiques.
Alors que le film était encore en projet, Brian de Palma espérait avoir les Who ou les Rolling Stones pour la musique du film, mais ceux-ci étaient injoignables. C'est en rencontrant Paul Williams, qu'il qualifia plus tard de "Napoléon du rock", alors qu'il était à la recherche d'un producteur, qu'il pensa à faire appel à son talent pour la bande originale de Phantom of the Paradise. Pressentant d'abord le groupe Sha-na-na, Williams le convainc de monter un groupe spécialement pour le film afin de ne pas être influencé par un style de musique déjà installé. C'est Williams qui dirige le groupe et qui écrit alors tous les morceaux du long-métrage, qu'il interprète aux côtés de tous les comédiens. Seul Gerrit Graham, qui joue Beef, sera doublé par le chanteur Ray Kennedy.
Jessica Harper fut choisie pour jouer le rôle Phoenix mais Brian de Palma eut bien du mal à découvrir le personnage frais et fragile qu'il souhaitait parmi l'innombrable casting de jeunes femmes qui lui était proposé. Il donne pourtant à la Miss Harper son tout premier rôle qui la fera repérer par Dario Argento à la vue de Phantom of the Paradise. Le réalisateur, qui adapta justement quelques années plus tard Le Fantôme de l'opéra, prit l'actrice pour son film Suspiria. Elle fut entre-temps récupérée par Woody Allen qui lui offrit des seconds rôles dans Guerre et amour et Stardust Memories à cette même époque.
Ce film est présenté au Cinéma de la plage au Festival de Cannes 2024.