Thriller dramatique aux allures de teen movies, « Alpha dog » s’avère être un très joli coup. Inspiré d’une histoire vraie, il est à la fois un fort plaidoyer sur les errements d’une jeunesse dorée américaine qui ne connaît pas ses limites, mais aussi une histoire sombre et captivante.
Le générique de début défile sur des images filmées par un caméscope familial, où l’on peut y voir des moments de l’enfance de deux frères. Un peu comme pour nous montrés qu’énormément de choses sont étroitement liées dans la vie. Notamment le destin de personnes proches. Oui, car si Zach n’avait pas été le petit frère de Jake, lui serait-il arriver si folle aventure ? Nul doute que non. Puis le film glisse vers le portrait des protagonistes des dites folles aventures. Au cœur d’un quartier riche, une bande de jeunes hommes de 20 ans se prend pour de vrais gangsters. Parce qu’ils dealent de la drogue, parce que certains d’entre eux sont armés, parce qu’ils aiment l’argent facile, les belles voitures et les jolies filles un peu écervelées. Aussi peut-être parce qu’ils regardent les clips sur MTV. Mais surtout parce qu’ils sont en manque de sensations fortes, et donc en quête perpétuelle de fruits défendus. Une histoire d’argent qui tourne mal, et un gamin de 15 ans est kidnappé, afin de servir de rançon. Mais nos gangstas-fils à papa n’ayant pas les épaules et le tempérament de vrais criminels organisés, ils ne savent pas comment s’y prendre, et du coup ils deviennent les nounous d’un pré-pubère en pleine crise d’adolescence qui choppe très vite le syndrome de Stockholm ! Pendant qu’en coulisse, la tension monte. En premier lieu, on sent vraiment que Nick Cassavetes a voulu faire une immersion à l’esprit quasi-documentaire dans le milieu de ces jeunes gosses de riches californiens proches de la rupture. Nous montrer comment une certaine tranche de la génération fast-food consomme la vie. Ils vivent uniquement entre eux dans leur petit monde superficiel, telle une meute, livrés à eux-mêmes, sans autorité, sans règles, et par conséquent sans respect pour rien, même pas pour leur propre personne. Voilà la peinture qu’a voulu dresser le réalisateur-scénariste à travers cette chronique sociale vraiment vraie. Et il y est plutôt bien parvenu. Son étude de cas ne sonne pas comme un gros cliché long de 2 heures, servi par des caricatures sur pattes. Oui, c’est souvent le risque avec les films sur les ados américains, on a vite fait de se tromper de route et de se retrouver à signer rien de plus qu’une énième production sans relief, sur et pour les teenagers. Même si l’atmosphère de ce genre de cinéma est là, elle est transcendée pour devenir un drame obscur et glaçant qui a véritablement quelque chose d’intéressant à dire. Notamment grâce à une pléiade de jeunes acteurs vraiment au top. Ben Foster, qui joue Jake Mazursky, est tout simplement impressionnant. L’interrogation pourrait se poser sur le chanteur Justin Timberlake, mais, même sans être grand fan de ses tubes R’n’B, il faut reconnaître qu’il sait très bien jouer la comédie. En gentil ravisseur dépassé par les évènements, lui aussi est un des points positifs de ce film. De très beaux noms viennent complétés le casting. Bruce Willis, en guest star, laisse parler sa classe naturelle, ainsi que le jeu subtil du remarquable - mais trop rare - Harry Dean Stanton. Seule ombre à ce tableau, la star complètement dépassée qu’est Sharon Stone, fausse et confondante de ridicule, comme par exemple, lors de sa dernière scène. Ah, qu’elles sont loin pour elle les années 90 des « Total Recall », « Basic instinct » et « Casino »… Si la mise en scène du fils Cassavetes est plutôt bonne, avec quelques effets très réussis mêlés à beaucoup de plans sobres et intimistes, rythmée par une B.O. rap US, elle est juste un peu freinée par les quelques incrustations de faux « documents réalités » dont on se serait bien passer, et par quelques scènes de fiestas un peu répétitives qui peuvent faire traîner en longueur, sans pour autant porter préjudice à l’ensemble, tellement on sent que le réalisateur souhaitait nous montrer l’ennui récurrent et le manque de valeur latent de ce mode de vie de djeun’s branchés. Et on aurait aussi aimé une charge émotionnelle moins lisse et plus poussée, car l’attention est ici plus tournée vers le tragique de l’histoire que sur l’épaisseur des personnages. Mais là aussi difficile de sanctionner le film, car le résultat final n’en souffre pas outre mesure.
Jamais objecteur de conscience, il esquive donc par la même occasion de virer au pamphlet réactionnaire et puritain, qui nous aurais délivrer un beau et universel message sur sa fin. Si il lui manque deux ou trois petits détails pour avoir la vraie puissance d’un film coup de poing sur l’adolescence à la Larry Clark, il reste un thriller honnête et efficace, au scénario intelligent, jamais porter sur l’artificiel.
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