Une oeuvre magistrale de Bunuel, probablement une de ses plus aboutie. Tout d'abord ,paradoxalement c'est la direction d'acteur chez Bunuel qu'il faut admirer ,les acteurs sont justes , dans le ton, inquiétants , grotesques ou cyniques . Bunuel sait les emmener exactement où il veut . Francis Blanche est remarquable dans son petit rôle, Piccoli , qui en fait souvent trop, est ici sous contrôle, Clementi "jeune enragé " est un régal, tous les seconds rôles aussi, Fabian superbe , Mais bien sûr Deneuve tient le meilleur rôle de sa carrière, à la fois ingénue, licencieuse, avec son charme glacé, mais aussi très souriante, elle se transforme et alterne le sensuel et le frigide. Son visage est lumineux , rayonnant . C'est un régal. Son défilé de Veuve noire , juste couverte d'un tulle noir transparent est cultissime , d'une beauté éblouissante , au dela de l'érotisme. Quel courage , quel toupet à l'époque de faire un film comme cela. Ensuite il y a la qualité de l'image , les cadrages , l'art cinématrophique ( les beaux restes d'une formation à Hollywood) . Toutes les scènes sont cadrées au millimètre, Du plan d'ouverture , au cadrage dans l'appartement ,les pieds montant un escalier , retournant en arrière, expriment toute l'angoisse du personnage, le plan au bord de la mer avec un ciel bleu profond est beau comme un tableau de Hopper. D'ailleurs le film est très pictural et rempli de clin d'oeil à la peinture . Le bel appartement du couple bourgeois , à l'angle de la célébre Rue de Messine, est rempli d'oeuvres surréalistes , de Dali, Picasso, Gris , Miro . On les voit et les revoit , c'est beau comme un musée. Ensuite il y a bien sûr le suréalisme , mais qui parfois déçoit les adeptes de la libération sexuelle ou de l'esprit 68. Bunuel n'est pas dans ce schéma là , il ne prone pas une "liberté" , ou une libération féministe. Il est dans la déconstruction , Deneuve ne se "libére" pas , Deneuve enfreint la loi , les bonnes moeurs, l'esprit bourgeois ,Bunuel ne sait pas si l'utopie libératrice est possible, ou plutôt il sait que collectivement elle n'est probablement pas possible. Par contre il abjecte l'ordre bourgeois. On est à la racine du surréalisme, dans le dadaisme. Deneuve à toutes ces aventures pour "casser" son éducation religieuse, elle avait refusé de prendre l'hostie petite fille , elle avait été abusé se venge, . Les scènes de rêveries imaginaires , de fantasmes sont aussi un moyen de se libérer , de tout "se dire", de ne plus se refreiner .La scène du duel , la scéne en Camargue avec la projection de boue, le client mongol avec son fantasme du "double sens", de la perle qui s'enfile par les deux cotés , la scène à la montagne avec une Macha Meryl " so cute " , autant de scènes cultes qui font de ce film un chef d'oeuvre , unique dans son genre.