Innocence : les secrets du tournage

Innocence est adapté d'une nouvelle du dramaturge allemand Frank Wedekind intitulée Mine-Haha, ou l'éducation corporelle des jeunes filles. Ecrite en 1888, l'intrigue a été transposée dans les années soixante.

La réalisatrice se souvient : "Ce qui m'a plu avant tout dans la nouvelle, c'est le dispositif : un lieu clos dans lequel vivent en autarcie des fillettes, les plus grandes prenant en charge les plus petites, l'importance de la danse et des exercices physiques ainsi que la relation primordiale à la nature."

La cinéaste évoque quelques sources d'inspiration : "Pour Suspiria, Dario Argento s'est paraît-il très librement inspiré de la nouvelle de Wedekind. Je l'ignorais à l'époque du tournage et je n'avais pas vraiment ce film en tête. Mais il se trouve que j'ai découvert le cinéma à treize ans avec les films de Dario Argento et leur érotisme très sombre. La référence à Pique-nique à Hanging Rock de Peter Weir était davantage consciente, même si je n'avais pas revu le film depuis sa sortie (...) J'y ajouterais L'Esprit de la ruche de Victor Erice pour son côté fantastique sous-jacent lié au monde de l'enfance."

Pour rassurer certains financiers du film, Lucile Hadzihalilovic dut engager des actrices connues pour incarner les deux professeurs et ce, bien que ce ne soit pas les rôles principaux. Elle a alors pensé à Marion Cotillard et Hélène De Fougerolles : "Toutes deux ont une image de filles modernes mais je trouve qu'elles ont un visage classique, un peu hors du temps qui correspondait bien à l'univers du film. Je voulais aussi qu'elles soient très jolies et féminines."

Sur le plateau, tout était organisé autour des enfants. La cinéaste se souvient : "On dépendait de leurs envies de faire pipi, de leurs soudains coups de fatigue ou de faim, et de leurs caprices de mômes. Si bien que lorsque Marion et Hélène sont arrivées, elles ont tout de suite compris la situation et ont su se rendre invisibles d'une certaine manière, n'hésitant pas à jouer les baby-sitters avec beaucoup de simplicité. La difficulté pour elles était de ne pas se laisser déstabiliser et de réussir à jouer leurs scènes malgré les réactions parfois imprévisibles des plus petites."

Pour les cours de danse et le petit ballet du théâtre, Lucile Hadzihalilovic a fait appel aux services du danseur et chorégraphe Pedro Pauwels. Celle-ci s'explique : "J'avais apprécié un petit spectacle qu'il avait monté avec des enfants qui n'avaient jamais suivi de cours de danse. C'était très joli et très simple, dans l'esprit de ce que j'imaginais pour le film. En effet, je ne voulais surtout pas de danse classique mais quelque chose de plus libre."

Ce premier long métrage de Lucile Hadzihalilovic est dédié à son compagnon, le cinéaste Gaspar Noé. Elle a participé à la production et au montage de Carne et Seul contre tous, deux films réalisés par ce dernier.