Pour se préparer au rôle d'Angelo, Clovis Cornillac a principalement fait du cardio-training afin de tenir le coup sur la longueur, du footing, des abdos et du combat. Il a commencé environ dix mois avant le tournage du Scorpion, avec un coach, Abdelkader Dahou, qui le suivait partout. "C'est la seule condition que j'avais posée pour faire le film, explique-t-il. J'avais un planning surchargé, je n'avais pas le temps d'aller dans une salle, il fallait quelqu'un qui soit présent et disponible à toute heure. Abdelkader m'entraînait quatre heures par jour où que je sois, quoique je fasse, six jours sur sept. Le dimanche, je le réservais à ma famille. Il m'a suivi sur le tournage des Brigades du Tigre, de Poltergay et du Serpent. Il m'entraînait à 6 heures du matin, juste avant que j'aille au maquillage des Brigades du Tigre, parfois à 2h du matin, pendant un raccord lumière sur Le Serpent qu'on tournait de nuit et, dès que j'avais un break, je faisais un footing."
De son côté, Alain Figlarz lui faisait répéter des chorégraphies qu'il devait retenir tout en apprenant les textes de ses autres films, pendant que Bertrand Amoussou lui enseignait les rudiments du free fight. N'ayant plus une seconde de libre, il a continué l'entraînement pendant les huit semaines de tournage de Scorpion.
Avant de tourner aux côtés de Jérôme Le Banner, Clovis Cornillac le connaissait pour l'avoir vu combattre. "J'étais allé le voir à Bercy dans un combat qui a duré 30 secondes. Il a mis K.O. d'un coup de pied un mec de deux mètres qui faisait 100 kilos, ça m'avait scotché. Je l'avais appelé pour le féliciter. Quand on a commencé à répéter ensemble, il avait plus peur que moi, il avait peur de me faire mal et puis il n'avait jamais fait de cinéma, il avait une angoisse par rapport à ça. Je lui ai dit que je n'étais pas chiant, que je n'étais pas là pour lui faire des reproches ni pour me plaindre. On a très vite accroché. Contrairement à l'image qu'il donne, pour se protéger j'imagine, il a une connaissance de l'être humain incroyable ! Il te décode tout de suite."
Les deux hommes auront à nouveau l'occasion de se croiser sur le tournage d'Astérix aux Jeux Olympiques, film dans lequel Jérôme Le Banner incarnera un gladiateur.
Entre les répétitions pour le film, Jérôme Le Banner continuait les matches. Dix jours avant le tournage, il avait combattu et s'était cassé le bras. "Je n'ai rien dit à Julien Seri, je ne voulais pas qu'il s'imagine que je ne serais pas capable de faire le film ou qu'il prenne ça pour un poids supplémentaire à gérer, explique le boxeur. Je savais que même avec un bras cassé j'allais faire le film. Quand j'accepte quelque chose, je vais jusqu'au bout, peu importe ce qui se passe. Je l'aurais fait même avec un seul doigt de pied, pour moi, ce n'est pas un problème, tout est dans la tête. Je me suis fait opérer, on m'a posé des broches et j'ai demandé à mon médecin si je pouvais combattre dans cet état-là, il m'a répondu : "Oui, si tu es fort mentalement, si tu gères la douleur". Ça faisait partie de mon répertoire."
Au départ, c'est le rappeur Joey Starr qui devait incarner le personnage d'Angelo. "Il devait tenir le rôle principal, explique Jérôme Le Banner, et comme on est amis, il a immédiatement pensé à moi pour jouer le champion de free fight dans le film. J'ai accepté parce que Joey me l'a demandé, que je m'en sentais capable et que c'était une nouvelle expérience que j'avais envie de tenter. Quand Joey s'est retiré du projet et que Cédric Jimenez, le producteur, est revenu vers moi deux ans plus tard avec un nouveau casting et un nouveau réalisateur, j'ai demandé à Joey s'il était d'accord, par respect. C'était la condition sine qua non pour que je le fasse : qu'il me donne le feu vert. Il m'a dit : "Vas-y, fais-le", donc j'ai dit oui à Cédric."
S'intéressant depuis longtemps au free fight, Cédric Jimenez avait envie de développer un film qui parlerait aussi de combat au sens général du terme. "On a tous un combat à mener, quel que soitnotre niveau social, confie-t-il. Je trouvais que l'idée était fédératrice, intemporelle et universelle. J'avais le sujet, le personnage principal, j'en ai écrit six pages, l'histoire était à peu près là, et Sylvie Verheyde m'a proposé d'écrire le scénario. Elle est partie au Mali et elle en est revenue avec un traitement de trente pages. C'était vraiment bien, beaucoup mieux que ce que j'avais envisagé : c'était beaucoup plus basé sur les émotions, moins sur les combats. Je l'ai proposé aux gens de Studio Canal, qui ont immédiatement adhéré au projet, on a commencé le développement mais ça n'a pas abouti tout de suite."
Julien Seri a repris le projet, a retravaillé le scénario avec Cédric Jimenez et a rajouté des scènes de combat afin de tenir la promesse principale de Scorpion qui est d'être le premier film au monde à traiter du sport de combat ultime qu'est le free fight. Et le producteur de préciser : "C'est comme ça qu'on a trouvé l'équilibre entre les scènes de combat et les scènes d'émotion, un équilibre fragile qui fait toute l'originalité du film."
Quand Cédric Jimenez a relancé le projet Scorpion, il l'a proposé à plusieurs réalisateurs, dont Chris Nahon, qui est un des amis de Julien Seri. Chris a dit à ce dernier : "C'est un film pour toi, tu devrais appeler le producteur pour le rencontrer." "J'ai appelé Cédric, se souvient le cinéaste, on a dîné ensemble et je suis reparti avec le scénario. A deux heures du matin, j'avais fini de le lire et j'appelais Cédric pour lui dire que je voulais absolument faire le film. J'aurais pu écrire chaque ligne du scénario. Ca ressemblait énormément à mes courts métrages, ça en était perturbant de voir que quelqu'un d'autre avait écrit quelque chose d'aussi proche de moi. C'était comme un miroir. Ça m'a bouleversé."
Pour les scènes de combat, Julien Seri souhaitait utiliser quatre caméras, or il n'en disposait que de deux et n'avait pas les moyens d'en louer d'autres. "Alors on s'est dit que comme il était question de combats diffusés sur Internet dans le film, il suffisait de prendre deux DV, confie le réalisateur. En plus, ça donnait un autre grain à l'image, un autre regard et ça nous permettait de filmer dans des endroits compliqués. Ce sont les seules scènes un peu storyboardées, sinon je n'avais aucun découpage. J'aime bien me laisser guider par les acteurs. Comme je cadre, je suis très réactif. Je filme à l'instinct, j'essaie de ne pas intellectualiser ma mise en scène, j'essaie de chercher la vérité, ma vérité. Je sais quand même où je vais, c'est de l'improvisation réfléchie, disons. En plus, on tournait en HD, parce que les caméras coûtaient moins cher, et je n'avais jamais utilisé de HD avant. On a dû s'adapter. Ce qui ne m'a pas empêché de faire entre trente et cinquante plans par jour. La plus grosse journée, on a fait cent deux plans totalement improvisés au niveau du cadrage."