L'Enfant au violon : les secrets du tournage

Présenté au Festival de San Sebastian en 2002, L'Enfant au violon a été récompensé par les Conchas de plata (Coquilles d'argent) de Meilleur réalisateur pour Chen Kaige, et de Meilleur acteur pour Liu Peiqi. Cette même année, Kaige a obtenu le prix le plus convoité en Chine, celui de Meilleur réalisateur au 22e Festival cinématographique du Coq d'or. Le prix a été attribué ex aequo au réalisateur Yang Yazhou pour Meilide de jiao.

C'est en regardant la télévision que Chen Kaige a eu l'idée de L'Enfant au violon. Dans une émission, un père et son fils issus d'une province chinoise racontaient qu'ils étaient venus s'installer à Beijing pour que l'enfant, jeune violoniste, trouve un bon professeur de musique. Chen Kaige a été très ému par les liens très forts qui semblaient unir le père et son fils : " Chaque geste, chaque regard trahissait la relation entre le père et le fils, les rêves de l'un, les espoirs de l'autre. Il y avait là quelque chose de bouleversant qui dépassait le simple contexte du jeune virtuose."

Chen Kaige s'intéresse une nouvelle fois à la relation entre un père et son fils. Ce thème renvoie à la propre histoire du cinéaste. Pendant la Révolution culturelle, il avait dénoncé aux autorités son père, également réalisateur, comme étant antirévolutionnaire. Kaige a rapidement regretté son acte, mais les deux hommes se sont longtemps tenu éloignés l'un de l'autre.

En 2002, année de la sortie de L'Enfant au violon au Japon, Chen Kaige signait également son premier film en anglais, Feu de glace. On pouvait voir la même année un court-métrage réalisé par Kaige pour le film Ten minutes older - The trumpet, auquel ont également participé Wim Wenders et Jim Jarmusch, entre autres.

C'est la première fois depuis 1987 et Le Roi des enfants que Chen Kaige parle directement de la Chine contemporaine. Entretemps, avec Adieu ma concubine, Temptress moon et L' Empereur et l'assassin, le réalisateur s'était intéressé à l'Histoire de son pays, même si on pouvait voir, en filigrane, une réflexion sur la situation actuelle.

"Together est une fable, un conte. Ce jeune garçon grandit, se découvre, choisit ses valeurs; son père essaye de l'aider, quitte à se sacrifier. On y découvre aussi la musique comme un art, un fabuleux vecteur de sentiments, mais aussi un univers redoutable où la compétitivité domine. En filigrane, c'est toute la société chinoise que l'on voit évoluer, à travers la jeune femme, à travers ces soifs de réussite insatiables. Par tous ces aspects, Together interpelle chacun de nous, sur ce que nous voulons, sur ce don nous avons vraiment besoin (...) Avec Together, j'ai eu envie d'offrir de quoi réchauffer un peu ce monde glacial. Je ne suis pas certain que toutes les technologies, tous ces progrès, nous rapprochent les uns des autres. La musique que ce jeune garçon fait naître de son violon, ses regards et ceux de son père sont, je crois, un moyen bien plus puissant de nous rassembler. "

Le jeune acteur choisi pour interpréter le rôle principal participait à un concours de violon lorsqu'il a été remarqué par le premier asssistant réalisateur. L'histoire de Yun Tang est similaire à celle qui est racontée dans le film, puisque le garçon a quitté sa province pour venir à Shangaï. Lorsqu'il le rencontre, le réalisateur trouve Yun Tang malheureux, et il apprend bientôt que l'enfant est battu par son père à chaque fois qu'il ne joue pas bien... Mais Chen Kaige raconte que depuis le film, sa vie a changé: " (...) Après le film, il a été choisi par un très célèbre professeur à Beijing. Sa famille l'a suivi, et il est devenu un étudiant réputé de l'académie de musique." Cependant, dans le film, il joue en playback les solos de violon, et c'est un autre élève du professeur Yu qui les interprète.

Le jeune Xiao Chun a deux professeurs de violon. Le premier, Jiang, bourru mais passionné, représente dans le film la Chine traditionnelle, tandis que le second, Yu, très réputé mais cupide, symbolise pour le cinéaste la Chine moderne. C'est Chen Kaige lui-même qui joue le rôle du professeur Yu, un personnage qu'il "n'aime pas beaucoup". En effet, explique-t-il, "comme beaucoup de gens aujourd'hui, il est motivé par l'argent et par le besoin d'augmenter encore son succès, sa richesse, sa position, même aux dépens d'un enfant."