Val Waxman, cinéaste autrefois renommé mais aujourd'hui exclus des grands circuits du cinéma pour ses frasques névrotiques, est contraint à trouver son gagne-pain dans la réalisation de films publicitaires. Pour ne rien arranger, sa femme Ellie l'a quitté et vit désormais en compagnie de Hal Yeager, célèbre producteur de cinéma installé à Los Angeles. C'est toutefois cette ex-épouse qui donne à notre "star" déchue sa dernière chance. Elle parvient à persuader son amant Hal, le producteur, de confier à Val la mise en scène d'un film à gros budget pour lequel il serait, selon elle, le réalisateur parfait. Hélas, juste avant le début du tournage le pauvre Val devient mystérieusement aveugle, et convenons qu'il est pour le moins difficile de diriger le tournage d'un film lorsqu'on n'y voit plus rien.
Sur cette mise en abyme souvent invoquée dans le cinéma "Allenien" (cf.: "La Rose Pourpre du Caire", "Stardust Memories" et dans une moindre mesure "Broadway Danny Rose"), l'ami Woody nous offre un feu d'artifice de situations loufoques et de quiproquos savoureux, le tout savamment emballé dans des dialogues farfelus qui suivent une implacable logique absurde il a le secret. Si la mise en scène est brillante et les images fort belles comme à l'accoutumé, le film tire sa vraie réussite du scénario, complexe à souhait dans les moindres recoins, qui déborde d'imagination et sert de tremplin aux plus hilarantes répliques que le réalisateur ait écrites de longue date. C'est cette complexité de la narration, au service de dialogues d'un burlesque époustouflant, qui différencie "Hollywood Ending" d'une simple comédie made in Woody Allen de plus. Et qui en fait tout simplement un grand film.
La distribution des rôles est également une très belle réussite. S'il faut féliciter tous les acteurs et actrices pour leur prestation et adresser une mention spéciale à Mark Rydell pour le personnage de l'agent artistique, c'est bien entendu Woody Allen lui-même qui crève l'écran dans le rôle du metteur en scène aveugle, névrosé, hypocondriaque et éternel amoureux délaissé. Rôle "type" qu'il endosse ici pour la Nième fois - entre clown et personnage au pathétique comique - mais qui plus encore qu'à son habitude parvient à faire rire et sourire, selon que le scénario est lui-même "névrosé", ou pour le moins... sympathiquement déjanté.
Grande comédie que le spectateur déguste avec un plaisir immédiat, mais aussi réflexion sur la création artistique dans son ensemble et sur l'art cinématographique en particulier, "Hollywood Ending", s'inscrit en filigrane comme un premier bilan que le réalisateur effectue sur sa vie de cinéaste. Le titre du film est d'ailleurs fort évocateur à cet égard, puisque la réalisation correspond peu ou prou à la date de la révérence que Woody Allen tira à sa carrière américaine pour partir d'un nouveau pied tourner en Europe.
Conclusion : Figurant parmi les meilleurs Woody Allen et film "testament" à presque trente années de réalisations américaines, "Hollywood Ending" est une oeuvre qui pétille d'un humour de grande classe. A ranger aux côtés d'autres chefs d'oeuvre tels "Crimes et Délits", "La Rose Pourpre du Caire" ou bien encore "Annie Hall".