"I shall never forget the weekend Laura died.", voilà, je suis envouté dès la première réplique. Plus qu'une simple enquête policière, "Laura" est une atmosphère, plus qu'une atmosphère, c'est un obsession, plus qu'une obsession, une héroïne.
Pour son cinquième film, le génie autrichien Otto Preminger nous raconte donc l'histoire de Laura, une ravissante (et pas qu'un peu puisqu'elle est campée par Gene Tierney) publicitaire abattue dans son domicile à Manhattan. Lorsque l'inspecteur McPherson se charge de l'affaire il étudie les proches de la victime sachant que le meurtrier ne peut être que l'un d', jusqu'à tomber amoureux de la défunte. Mais alors que l'enquête piétine Laura réapparaît.
"Laura" c'est une incarnation. Le film, au départ, ne devait être qu'une série B. Mais malgré une certaine aversion pour Preminger le producteur Darryl Zanuck débloque un budget important après s'être emballé sur le script. La fabuleuse, la divine Gene Tierney est alors engagée même si au départ le futur réalisateur de "Autopsie d'un Meurtre" avait jeté son dévolu sur Jenniger Jones.
Zanuck a donc eu le nez fin, et on ne peut que nous réjouir, le scénario est une splendeur. La voix off de Clifton Webb (inoubliable) apporte au film se ton si jouissif. Rien que le générique ou les titres défilent sur le portrait de Laura Hunt donne une sensation d'impuissance, comme si déjà elle était là quelque part, le charme du personnage que l'on aperçoit dans les flash back est envoutant, sans un moindre défaut physique, elle n'existe qu'à travers le regard des autres et de l'amour proche du fétichisme qu'ils lui portent. Otto Preminger impose sa mise en scène étourdissante, un rythme qui jamais ne faiblit ou ne tombe dans l'inégale ou l'insistance, jamais ne il ne cherche à nous prendre au piège n'abusant pas d'artifices criards comme l'aurait probablement fait un autre (rappelons que Preminger a totalement repensé le film) mais c'est surtout l'atmosphère qu'il instaure; pas glauque mais authentiquement noir "Laura" doit presque tout à son réalisateur qui par la suite va s'imposée comme une figure mythique du film noir.
L'intrigue, il faut être honnête, plus le film avance plus on s'en fiche, d'ailleurs on a l'impression que l'équipe fait pareil, ce qui nous fait tenir c'est cette totale fascination pour ces personnages machiavéliques. Gene Tierney ne tient pas seulement le rôle de sa vie, elle tient celui qui fera d'elle une icône intemporelle de part sa beauté et sa performance magistrale, comme dans un rêve, son visage évoque celui d'un fantôme, une illumination capable de faire tout ce qu'elle veut, l'élégance incarnée, jamais vulgaire, on comprend ensuite l'intérêt que Preminger aura pour les femmes qu'il mettra en avance comme une menace notamment dans "Un si doux Visage" et "Carmen Jones".
Véritable orgasme policier, fascinant, obsédant, jouissif et exquis. "Laura" est une réussite majeure, gracieux, incroyablement bien géré. Une leçon comme Preminger sait si bien les faire.
PS : Thanks a lot Docteur Jivago.
PS 2 : Sur grand écran c'est de la folie.