Quelques années après l'échec commercial de Garçon!, Claude Sautet change de registre avec Quelques jours avec moi, où il va filmer une nouvelle génération et mettre en scène le patron d'une grande chaîne d'hypermarchés qui a connu la dépression avant de se rendre à Limoges pour y contrôler l'une des succursales.
Si Claude Sautet change de génération, on retrouve tout de même ses thèmes de prédilection, à savoir la complexité des sentiments et de la vie. Ici, il trouve toujours le ton juste, notamment dans le portrait des personnages à l'image de Martial, aussi complexe que fragile, cherchant sa place dans une société bien compliquée où on est vite enfermé dans une case tandis qu'autour de lui, il dresse une galerie parfois haute en couleur et toujours intéressante et approfondie où l'on retrouve celle dont il tombera amoureux, des grands patrons parisiens ou au contraire, des personnages typés plus provinciaux.
Sautet se montre toujours intelligent et sobre dans son traitement des personnages, mettant aussi en place une satire de la bourgeoisie (qu'elle soit parisienne ou provinciale) mais surtout une histoire sentimentale compliquée sur deux personnes que tout oppose. Le metteur en scène d'Une Histoire Simple se montre, comme toujours, brillant pour faire ressortir toute l'émotion et la complexité de l'histoire qu'ils vont peu à peu connaître, ainsi que d'une justesse incroyable pour mettre en avant la difficulté de la vie, les dilemmes trop compliqués qui en découlent mais aussi les simples moments de joie, de bonheurs et parfois d'amitié, à l'image des remarquables séquences dans les bistros, scènes que l'on retrouvait déjà dans des films comme Mado ou Vincent, François, Paul et les autres.... C'est aussi le regard des autres qu'il étudie, les codes d'une société où tout devient difficile si on n'y trouve pas une place bien définie.
La mise en scène de Sautet est toujours immersive, permettant de nous entrainer dans l'intimité des protagonistes et de partager leurs sentiments. Il insère quelques touches d'humour qui marchent bien dans la première partie du récit (à l'image de la formidable pendaison de crémaillère) avant de se montrer plus sombre et compliqué dans la seconde, où il fait ressortir toute la difficulté, la complexité et la cruauté du sort de Martial, sachant bien nous faire passer par les mêmes sentiments. Daniel Auteuil livre une composition juste et sobre, sachant faire ressortir toute la complexité, la peur et l'émotion de son personnage tandis que face à lui, les autres interprètes sont remarquables, notamment Sandrine Bonnaire, Jean-Pierre Marielle et Vincent Lindon.
Claude Sautet entame une nouvelle vie avec Quelques jours avec moi où il dresse le portrait d'une nouvelle génération et ce avec toujours autant d'intelligence, justesse et sobriété, pour mieux nous y immerger et faire ressortir toute l'émotion et la complexité des enjeux et personnages.