Avec Les Cheyennes, sorti sur les écrans en 1964, John Ford réalise son dernier western, genre qu'il a sans doute le plus affectionné au cours d'une carrière qui, commencée à l'époque du muet, compte plus de 140 films. Sortiront encore Le Jeune Cassidy en 1965 (coréalisé par Jack Cardiff) et Frontiere chinoise en 1966, tout dernier film d'un metteur en scène à qui cinéastes, critiques et cinéphiles du monde entier vouent une admiration qui ne s'est jamais démentie.
A propos de Cheyennes, John Ford a déclaré avoir travaillé avec Dudley Nichols à un premier scénario dès la fin des années 50, tant le sujet lui tenait à coeur. "Je voulais le faire depuis longtemps, précise le cinéaste, j'ai tué plus d'Indiens que Custer, Beecher et Chivington réunis (...) et j'ai voulu montrer ici le point de vue des Indiens, pour une fois ".
Dans la peau du Capitaine Archer, Richard Widmark campe avec nuance un officier qui pourchasse à contrecoeur les Indiens et qui fera, tout comme l'institutrice (interprétée par Carroll Baker) les frais de l'ignorance de Washington et d'une presse à sensations rompue au cynisme. C'est aussi lui qui préviendra le secrétaire d'Etat, Carl Schurz, de la tragique situation des Indiens. Le comédien avait déjà tourné auparavant sous la direction de John Ford, dans les Les Deux Cavaliers, aux côtés de James Stewart.
Jugé trop long par les distributeurs, Les Cheyennes a été partiellement remonté sans l'accord de John Ford et plusieurs minutes ont également été supprimées dans la séquence du massacre des Cheyennes à Fort Robinson.
Après Les Deux Cavaliers et L' homme qui tua Liberty Valance, Les Cheyennes est la troisième collaboration entre John Ford et James Stewart. Loin de l'atmosphère de La Poursuite infernale, du même Ford, avec Henry Fonda, le légendaire Wyatt Earp est ici campé par un James Stewart plutôt débonnaire qui joue aux cartes avec un Doc Holliday interprété par Arthur Kennedy.
Pressenti pour le rôle du Secrétaire d'Etat Carl Schurz, Spencer Tracy, tombé malade, a finalement dû renoncer au rôle, obligeant ainsi John Ford à retourner ses scènes avec Edward G. Robinson, venu le remplacer au pied levé.
L'assassinat de John Kennedy survenu en plein tournage a incité John Ford et les participants du film à réfléchir plus que jamais à l'histoire même des Etats-Unis. L'une des plus fameuses séquences du film montre le Secrétaire d'Etat, Schurz, qui vient de prendre le parti, très risqué, des Indiens s'adresser au portrait de Lincoln en lui demandant : "Et toi, qu'aurais-tu fait ?", le problème des Indiens rejoignant clairement celui de l'esclavage pour le cinéaste.