Quoi de mieux que des araignées voraces pour terminer 2023 ? Et surtout pour célébrer une fin d'année riche pour le cinéma de genre français qui s'est distingué de façon inattendue par la pluralité et l'éclectisme de ses propositions. Cette fois, c'est donc le film de méchantes bestioles pur et dur qui est mis à l'honneur avec l'infestation d'un immeuble de cité HLM par les pattes velues d'arachnides particulièrement volubiles pour s'adapter à la menace de l'espèce dominante que nous autres, humains, sommes censés être.
Prenant à juste titre comme base la dénonciation de l'importation illégale d'espèces exotiques, Sébastien Vaniček trouve le parfait prétexte pour mêler son amour du film de monstres (dont la sincérité ne sera jamais prise en défaut) à la réalité sociale de son milieu d'origine. Car, si les araignées piquent d'abord discrètement dans l'ombre, c'est pour mieux laisser à "Vermines" le temps de nous laisser évoluer parmi la communauté des habitants de son immeuble, où entraides, petites combines, frustrations et préjugés de bas front bouillonnent comme un reflet plus global de la société en général. Et, là où un frustrant "La Tour" avait clairement échoué, "Vermines" parvient dans le même temps à construire un noyau central de personnages crédibles, voire un minimum attachants, parfois avec humour, par certaines de leurs motivations avant de les soumettre aux mandibules de leurs assaillantes animales (on saluera également la prestation des comédiens dans leur ensemble, tous plutôt convaincants, ce qui faisait aussi cruellement défaut au film de Guillaume Nicloux).
Pour le reste, avec les premières attaques de ses bébêtes bien conçues entre réel et images de synthèse, "Vermines" fait plutôt mouche (huhu) dans leur montée en puissance, appuyant sur leur étonnante volonté de survie et de prolifération pouvant faire tourner du regard à plus d'un phobique de ces petites fourbes à huit pattes. Cependant, une fois leur invasion de l'immeuble bien actée dans l'esprit des occupants des lieux par de méchantes morsures, "Vermines" va se contenter d'une certaine efficacité sans ne plus vraiment chercher à créer la surprise, le film se reposant avant tout sur leur surnombre et leur évolution pour enchaîner des morceaux de bravoure auxquels ils manquera toujours ce petit surplus d'inventivité nécessaire -et même de véritable horreur- pour emporter notre complet enthousiasme (on citera comme exemple notable la séquence de "la traversée" sur laquelle on aurait aimé tant stresser mais qui laisse étrangement de marbre).
Ainsi, malgré son indéniable sens d'immersion au sein de la toile de son HLM, le film de Sébastien Vaniček se met finalement à un peu trop tisser le fil que l'on pouvait attendre de lui, donnant évidemment à son titre son double sens très prévisible via une présence policière chargée d'endiguer le problème de façon plus que révoltante ou en se rapprochant trop de péripéties d'autres productions du même type sans trouver la plus-value originale qui lui permettrait de les surclasser, et ce malgré une ambiance de chaos réussie et un regard plus humain qu'à l'accoutumée sur les liens défaits par ces attaques arachnéennes incessantes.
Toutefois, si "Vermines" a du mal à trouver un second souffle pour maintenir l'attrait de ses débuts, il n'en demeure pas moins une tentative audacieuse et pleine de qualités généreuses en vue de tutoyer des rivaux étrangers à l'avenir. La toile du ciné de genre français contemporain continue de se tisser avec une telle proposition et elle fait plaisir à voir.