Salim Kechiouche a voulu faire un film très naturaliste et réaliste avec des dialogues proches du réel : "tout est préparé et écrit, mais je voulais que cela sonne comme de l’improvisation, comme dans un documentaire, comme si on posait une caméra qui se faisait oublier et filmait la vie." Il avait pour intention de témoigner de son époque à travers une histoire singulière mais aux thématiques universelles (la famille, la perte d’êtres chers, le couple, la paternité, l’amitié, et aussi les addictions). L'Enfant du paradis a été fait avec très peu de moyens, "mais avec toute l’énergie extraordinaire qui nous anime lors d’une première fois."
Le film est inspiré du destin tragique de l'acteur et ami d'enfance du réalisateur, Yasmine Belmadi, disparu dans un accident de la route en 2009 et qu'on avait pu voir dans son dernier rôle avec Adieu Gary. Il est décédé dans un accident de moto, en sortant d’une boîte de nuit, après une fête de fin de tournage.
Salim Kechiouche confie : "Je me suis approprié cette histoire, tout en m’en éloignant. Je l’ai imbriquée à la mienne, beaucoup plus fortement que je ne l’avais imaginé au départ, en intégrant des archives personnelles." Il a envisagé dans un premier temps d'utiliser des images d’animation pour prendre de la distance avec le sujet, en lieu et place de ces vidéos, avant de se raviser : "finalement je me suis dit que, quitte à y aller, autant y aller à fond. C’est ma vie, mais en même temps, ce n’est pas la mienne. En ce qui me concerne, je suis père de deux jeunes enfants et non d’un ado. Cet ami, lui, n’avait pas d’enfant. Mon film est une espèce de projection autour de la vie d’un acteur, laquelle peut être très déroutante."
Le titre est une référence à Marcel Carné et à son film Les Enfants du paradis, qui était l’un des préférés de l'ami décédé du réalisateur. Celui-ci explique : "Le " paradis " désigne aussi l’endroit au théâtre, qui rassemble des spectateurs peu fortunés, ayant acheté des places en hauteur pour une somme modique. Mon personnage vient lui aussi d’un milieu modeste, et tout d’un coup, il se retrouve propulsé dans le monde du spectacle. Le titre, enfin, établit un lien avec la mort. J’espère que mon ami a trouvé sa place au Paradis."
Salim Kechiouche tient également le rôle-titre de son premier long-métrage en tant que réalisateur. On a pu le voir dans le film Les Amants Criminels, puis entre autres pour David Oelhoffen dans Nos Retrouvailles en 2007. On le retrouve chez Abdellatif Kechiche dans La Vie d’Adèle en 2013 et Mektoub my love en 2017. Il alterne cinéma, télévision, théâtre et décroche des rôles d’envergure dans des séries telles que Engrenages sur Canal+ ou Braqueurs sur Netflix.
Au départ, il voulait engager un autre comédien pour le rôle principal mais l'a finalement endossé car "c’était plus facile, par rapport à la direction d’acteur mais aussi, au regard de l’économie du film." En réalité, l'envie d'écrire et de réaliser précédait le désir de devenir acteur, métier qu'il a fait un peu par hasard après avoir été repéré lors d'un casting sauvage.
Les images d'archives que l'on voit dans le film sont des vidéos personnelles de Salim Kechiouche. Elles permettent d’accéder à l’inconscient du personnage et de mesurer ses blessures. Elles constituent aussi un hommage à la mère du réalisateur, qu'il a perdue à l’âge de 14 ans, "ce qui a été une grande douleur dans ma vie. C’est elle qu’on voit sur ces images. Quitte à réaliser un premier film, dans des conditions économiques tendues, autant faire preuve de la plus grande sincérité."