Après avoir multiplié les demandes de subvention et essuyé des refus, le réalisateur a décidé de se lancer dans un projet sans trop y réfléchir, pour ne pas perdre le souffle initial.
Très belle journée a été entièrement filmé avec un téléphone cellulaire. Cette idée est venue de l’envie de tourner dans l’immédiat, le plus rapidement possible et en suivant son instinct. « High Flying Bird de Steven Soderbergh et Tangerine de Sean Baker m’ont convaincu qu’il s’agissait d’une avenue intéressante. Avec le directeur de la photographie Christophe Dalpé, nous avons donc opté pour cet objet que nous avons tous dans nos poches, mais en le réfléchissant comme une caméra traditionnelle », explique le réalisateur.
Le réalisateur Patrice Laliberté et le scénariste et acteur Guillaume Laurin avaient collaboré quelques années plus tôt à un projet du chorégraphe de danse Dave St-Pierre, où ils faisaient de l’écriture de plateau, « une pratique commune au théâtre mais quasiment inexistante au cinéma. Au Québec, je crois qu’il n’y a que Robert Morin qui a exploré cette technique d’écriture, où le scénario se construit à mesure, avec les comédiens. Cette façon de faire m’intriguait ». Ainsi, ce sont les idées de mise en scène qui ont construit l’histoire et non l’inverse : « par exemple d’avoir une scène dans le métro de Montréal, et nous trouvions des moyens dans le scénario pour s’y rendre. »
À l’instar de son précédent long-métrage Jusqu’au déclin, Patrice Laliberté met encore une fois en scène un personnage fasciné par les conspirations et les scénarios de fin du monde. Les deux films ont été construits en parallèle et ont comme point de départ la culture du web. « À mes yeux, les conspirations sont des légendes urbaines, des fictions qu’on se raconte et qui sont teintées par notre contexte technologique. J’ai aussi été inspiré par le concept de déréalisation, lorsqu’un individu n’a plus l’impression d’habiter son corps, où il sent qu’il fait partie d’un univers qui n’est pas réel. » Guillaume Laurin ajoute : « Nous avons accès plus que jamais aux opinions personnelles et aux croyances des autres. Quand j’étais jeune, cette parole conspirationniste ne parvenait pas jusqu’à moi. Maintenant, c’est tout autre chose. »