Sylvie Gautier avait plusieurs sujets en tête, notamment celui de la condition ouvrière. La cinéaste, qui pour l'occasion réalise son premier long métrage, explique : "C’est une classe sociale qui n’apparaît plus beaucoup dans les films d’aujourd’hui, sans doute parce que les réalisateurs pensent qu’elle concerne moins de monde. Or elle est encore très présente."
"Elle a des difficultés à joindre les deux bouts, des problèmes pour se faire entendre, la peur du chômage. J’aime sa façon de rire de sa condition, et son esprit de solidarité... Ce sont des qualités remarquables. Sans doute parce que je suis une femme, je me suis dit que j’allais l’évoquer à travers un groupe de femmes, travaillant dans une usine de nettoyage."
"À un moment de l’écriture, l’idée m’est venue que l’une d’entre elles aurait une difficulté supplémentaire mais, soigneusement gardée secrète : elle serait illettrée... J’avais la trame de mon film."
La thématique de l'illettrisme était déjà au coeur de "Sotte", l’un des deux premiers courts métrages mis en scène par Sylvie Gautier. La réalisatrice précise cependant : "Je vais vous surprendre mais, Brillantes a été écrit avant mes courts métrages. Mais pour trouver un producteur et des financements pour un long, il faut montrer ce dont on est capable."
"Aussi, je me suis alors attelée à l’écriture d’un premier « mini-film » - je préfère ce terme à celui de court métrage - sur un souvenir d’enfance dont je voulais me débarrasser, puis d’un second, que j’ai intitulé « Sotte », et dans lequel j’ai imaginé la jeunesse qu’aurait pu avoir la Karine de Brillantes, celle d’une enfant qui aurait eu des problèmes avec l’écriture et la lecture."
Brillantes a été tourné à Martigues, une commune française des Bouches-du-Rhône. Plus précisément, Sylvie Gautier a voulu situer l'intrigue du film autour de l’Étang de Berre, un bassin ouvrier avec beaucoup de pétrochimie. Ce lieu donne sur une mer inondée de soleil et se situe près d'une garrigue épineuse mais splendide. La cinéaste se rappelle :
"Ce bassin traduit l’ambiance rude mais malgré tout légère et positive que je voulais. Encore une fois, j’ai eu de la chance : la région PACA m’a offert son aide et la ville de Martigues aussi. On a pu tourner tous les extérieurs en décors naturels ! Pour les intérieurs, pour ne pas en rajouter sur les côtés sombres du film, on s’est installé dans un HLM d’un quartier tranquille."
Initialement, le film devait s'appeler « Histoire de Karine ». Finalement, Sylvie Gautier et le distributeur ont opté pour Brillantes : "J’aime bien ce titre. Il est à double sens. Au premier degré, il se rapporte au métier qu’exercent les filles du film, qui est de tout faire briller, et au deuxième, il évoque l’intelligence. Oui, pour moi, ces filles sont brillantes. Elles doivent être fières d’elles. Et puis je trouve que ce titre est lumineux."
Si Sylvie Gautier n'avait pas de références précises en tête, elle a voulu placer Brillantes dans la lignée des films sociaux anglais et américains flirtant avec la comédie : "Je suis une fan absolue de Little Miss Sunshine, de tous les films de Ken Loach et aussi de The Snapper de Stephen Frears."
"J’ai aussi un grand faible pour tous les films chorals de Claude Sautet, parce qu’ils ont une belle profondeur de champ et des seconds rôles très bien écrits. J’aime les films de groupe où les acteurs ne servent pas de faire valoir à un seul d’entre eux", précise la réalisatrice.
Pour Karine, Sylvie Gautier ne voulait pas d’une actrice qui fasse de ce personnage une victime. La cinéaste a donc rapidement pensé à Céline Sallette pour l’interpréter, parce qu'il s'agit d'une comédienne qui sait très bien prendre une allure de garçon manqué et faire abstraction de sa féminité. Elle raconte : "C’est une actrice engagée, vraiment. À chaque fois que je l’ai vue jouer ce genre de personnage, un peu rebelle, un peu « même pas mal ! », elle m’a épatée par son naturel. Elle ne surjoue jamais.
"Elle est une actrice, fine, éclectique et intelligente, qui peut passer avec une aisance incroyable de L'Apollonide - souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello à Cessez-le-feu d’Emmanuel Courcol ou à Mais vous êtes fous d’Audrey Diwan. Comme son jeu est très ancré, elle étincelle aussi dans les films sociaux. J’ai eu beaucoup de chance que mon scénario l’intéresse. On a été tout de suite en symbiose toutes les deux. Céline est de celles qui osent tout et n’ont peur de rien."