De Yella à Ondine, en passant par Jerichow, Phoenix, Barbara et Transit, le cinéma de Christian Petzold, qu'il soit historique ou contemporain, sait parfaitement rendre l'intime des relations humaines universel, au fil d'histoires que l'on peut difficilement ranger dans un genre spécifique. Il en est de même pour Le ciel rouge, une petite merveille, qui peut ressembler à une comédie de mœurs estivale, légère en apparence, mais où s'incrustent bien d'autres sentiments comme l'amertume ou le cynisme, tout en flirtant avec le film catastrophe, le mélodrame ou le récit d'apprentissage, de manière extrêmement fluide, avec une intelligence narrative enthousiasmante. Le ciel rouge pourrait aussi facilement s'apparenter à un huis clos théâtral mais aucune pesanteur n'y est perceptible car la progression dramatique est subtile et les dialogues savoureux. Paula Beer a succédé à Nina Hoss, en tant que muse du cinéaste, et elle est de nouveau sublime de charme et de pétillance dans le film mais ce n'est pas elle, en définitive, qui a le rôle principal, abandonnant ce privilège à Thomas Schubert, exceptionnel en garçon égocentrique, maladroit et totalement dénué d'empathie. Une fois de plus, Christian Petzold exprime son talent unique à rendre passionnantes, voire jubilatoires, les interactions entre ses différents personnages. L'idée de départ du scénario du film lui est venue en revoyant La Collectionneuse de Rohmer et il est vrai que Le ciel rouge est à sa façon un délicieux et cruel conte moral. Sa liberté et sa malice, dans l'intersection des sentiments, pourrait aussi faire penser à Jules et Jim, pourquoi pas ?