Tu choisiras la vie est le premier long-métrage en tant que réalisateur de Stéphane Freiss, plus connu du grand public pour ses rôles dans Chouans ! et 5x2. Il revient sur son passage à la réalisation : "C’est au départ une chose confuse sur laquelle je n’aurais pu mettre de mots avant de me retrouver seul devant ma feuille. Je n’avais aucune idée de ce qui sortirait de ce premier jet. J’étais autant acteur que spectateur de ce qui naissait sur le papier. Mais il me semblait alors qu’écrire était l’unique moyen de redonner du désir et du sens à ma vie. Que quelque chose n’allait plus dans ma manière de concevoir et de vivre mon métier."
Stéphane Freiss a grandi avec deux parents juifs qui avaient été cachés enfants durant la Seconde Guerre mondiale. Les exactions, les tortures, et les morts en camps de concentration ont été nombreux des deux côtés de sa famille. Ce passé terrible restait tabou chez ses parents, jusqu'à leur séparation quand il avait douze ans. Pour son père, marqué par l'Holocauste, "un Dieu qui avait laissé faire ça était totalement disqualifié à ses yeux", raconte Freiss. Sa mère, elle, s'est à l'inverse totalement réfugiée dans la religion juive : "La foi de ma mère n’a cessé de grandir jusqu’à la fin de sa vie. Elle était totale et d’une intensité que je n’ai jamais vu chez aucune autre femme religieuse du village pourtant très religieux où elle vivait en Israël. Le mode de vie dogmatique des ultras orthodoxes est extrêmement contraignant. Elle, pourtant, n’en avait jamais assez de prier, d’étudier, et de respecter à la lettre les commandements."
Stéphane Freiss affirme que sa mère a été le déclencheur du film. Ses rapports avec elle se sont de plus en plus compliqués au fil des années en raison de sa lecture intransigeante des textes religieux. Avec Tu choisiras la vie, il ne voulait pas "écrire un film sur les pratiques contraignantes et l’archaïsme du monde orthodoxe sous tant d’aspects, ni même simplement un film religieux. Au contraire, de la manière la plus universelle possible, je voulais poser la question du poids de notre héritage et de notre capacité à pouvoir nous en libérer quand il est trop lourd, d’où que nous venions. C’est avant tout un film sur la liberté."
Elle est décédée au début du montage du long-métrage, qui lui est dédié : "C’était un pont entre nous sur lequel nous aurions pu nous retrouver, et qui aurait, j’en suis sûr, libéré la parole."
Parmi les films qui l'ont influencé, Stéphane Freiss cite les films d’Alice Rohrwacher, d’Abbas Kiarostami, de Cassavetes et ceux de cinéastes soviétiques comme Mamine, Klimov ou Mikhalkov. Il était une fois un merle chanteur du Géorgien Otar Iosseliani est aussi l'une de ses références : "Un film merveilleux tourné en 1970 à Tbilissi en Géorgie. Il y a une scène de mon film qui rend hommage à ce chef-d’œuvre, lorsqu’Esther rembobine la cassette dans le pick- up d’Elio et redonne ainsi vie à Lucio Dalla qui chante une chanson sur la liberté, faisant ainsi écho dans le film de Iosseliani à la scène où l’horloger remet en marche le mécanisme d’une montre qui s’était arrêtée."
À l'origine, Tu choisiras la vie devait s'intituler Face à toi. "J’aimais ce titre et le trouvais évocateur du combat intérieur que mènent les deux héros du film, contre eux-mêmes et leur famille. Je l’avais extrait d’une phrase du Deutéronome qui dit : « J’ai placé, face à toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction, tu choisiras la vie ». Je l’ai abandonné à la toute fin de la post-prod lorsqu’en relisant le carton où s’inscrit la citation, j’ai compris que l’invective divine « Tu choisiras la vie » était plus percutante et dramatique", confie le réalisateur.