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    Soudain seuls
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Soudain seuls" et de son tournage !

    Naissance du projet

    En finissant Les Cowboys (2015), son premier long métrage qui comprenait beaucoup de décors et de personnages, Thomas Bidegain avait envie de traiter du sujet de l’intimité dans sa nouvelle réalisation. Le metteur en scène cherchait une histoire qui se déroulerait dans un lieu unique, avec un seul personnage ou peut-être deux. Il se souvient : "J'étais fasciné par le design des bases scientifiques de l'Antarctique. Et puis en écoutant un podcast de l’émission Le Masque et La Plume où il était question du livre d’Isabelle Autissier, Soudain, Seuls quelque chose m’a frappé."

    "J'ai été tout de suite séduit par la clarté de sa proposition : l'histoire d'un couple pris au piège sur une île déserte. Une proposition qui permettait d'envisager un film à la fois très intime et très large. J'avais envie de raconter le destin de personnages ordinaires qu'on va lancer dans une aventure extraordinaire. À eux ensuite de se dépasser pour être à la hauteur de cette aventure. La lecture du livre d'Isabelle a confirmé cette intuition, ce désir de faire un film d'aventure, à grand spectacle, mais sur un couple, sur deux personnages plongés dans une intimité forcée et absolue."

    Pourquoi un couple ?

    Il y a peu de films d’aventures sur et avec un couple déjà constitué. Ce qui était compliqué pour Thomas Bidegain était de construire leur passé : "Parce qu'il y a des films de rencontres, d'individus que tout oppose, qui se retrouvent plongés dans une aventure ensemble et qui s'embrassent à la fin du deuxième acte. Là, c'était différent, quelque chose peut-être d'un peu plus mature. Parce que l'histoire d'un couple pose la question, la seule qui soit intéressante : comment est- ce qu'on remet le couvert ? Comment est-ce qu'après un certain nombre d'années, on peut redistribuer les cartes ?"

    "L'aventure dans laquelle ils sont précipités, l'état de nature dans lequel ils sont plongés, permet de questionner leurs positions respectives à l'intérieur du couple, la place que chacun s’est assignée et les rapports de forces qui se sont institués. Il n'y plus de filtre, plus d'échappatoire. Une situation de survie impose le mouvement."

    L'île comme personnage

    L'île constitue le troisième personnage du film : "Tout comme Ben et Laura, elle respire, elle a ses accès de colère. Elle donne et elle reprend. Assez vite, ils se rendent compte que l'île est bien plus grande qu'ils ne l'imaginaient. Elle n'est plus un point sur une carte, elle prend vie. Elle est la nature, la puissance vengeresse de la nature. Au début du film, Ben et Laura entendent des baleines. Depuis leur bateau, ils les entendent mais ne les voient pas, ils les cherchent, tournent le gouvernail dans un sens ou dans l'autre", raconte Thomas Bidegain, en poursuivant :

    "Et c'était pour nous à l'écriture, comme si les baleines les guidaient vers l'île. On les retrouve aussi un peu plus tard dans le film, quand ils sont pris dans les vagues. Ben se retrouve sous l'eau. Il entend à nouveau le sifflement des baleines. Elles lui disent « Vous êtes chez nous maintenant."

    Pourquoi le froid ?

    Thomas Bidegain a opté pour un cadre spatial faisant la part belle au froid pour plusieurs raisons. D’abord dramatiquement, les températures froides réduisent les ressources des personnages, ce qui tend considérablement les choses entre eux : "L'hiver approche, il les emprisonne et les pousse à agir. Quand on va dans le froid, tout devient plus sérieux, plus mystérieux aussi à mesure que la faune et la flore disparaissent. Il y a aussi quelque chose de nu que provoque le froid. Une île froide, c’est pour moi une île nue, qui met à nu les deux héros. Il y a quelque chose d'insidieux dans le froid, il y a quelque chose de plus dramatique. Le froid, il vient nous empêcher d'agir", précise le cinéaste.

    Changement de casting

    Soudain seuls devait être tourné avec Jake Gyllenhaal et Vanessa Kirby dans les rôles principaux (le projet s'appelait Suddenly). Finalement, ce sont Gilles Lellouche et Mélanie Thierry qui les ont remplacés en raison de divergences artistiques entre l'acteur américain (qui devait d'ailleurs produire le film) et Thomas Bidegain.

    A noter que Bidegain a déjà collaboré avec Gyllenhaal sur le western de Jacques Audiard Les Frères Sisters (2018) : le scénariste a écrit le long métrage en compagnie du célèbre réalisateur d'Un prophète et l'acteur y campait l'un des quatre personnages principaux, aux côtés de John C. ReillyJoaquin Phoenix et Riz Ahmed.

    Survival Movie

    Soudain seuls est un survival movie répondant aux codes du genre : il va falloir, pour les deux héros, chasser pour se nourrir et revenir à des sensations plus primitives : "La question de la survie du couple vient s'ajouter à celle de la survie des personnages. Il y a un nouvel équilibre qui se crée entre le couple et la nature, mais aussi au sein du couple lui-même. Le rapport de force entre Laura et Ben est amené à évoluer, cette épreuve est aussi pour eux une opportunité extraordinaire de se trouver, de se retrouver. Parfaitement à égalité. Solidaires", confie Thomas Bidegain.

    Côté lumière

    Côté image, Thomas Bidegain voulait quelque chose de naturel, beau sans pour autant être esthétisant. La lumière polaire devait paraître sublime la première fois que les personnages la voient, car ils sont des touristes qui visitent une île. Le réalisateur ajoute : "Cette sensation de splendeur vire radicalement quand ils en deviennent prisonniers. Nicolas Loir, le chef opérateur, est un passionné. Un artiste et un collaborateur infatigable. Il a su tirer parti de ces couleurs froides, de ces paysages minéraux, de cette luminosité étrange et inhospitalière. C’est aussi la lumière d’un soleil presque blanc."

    "C'est en Islande que nous avons trouvé cet univers visuel perturbant, ce soleil presque blanc, cette luminosité qui se rapprochait de celle de l’hémisphère sud où il était trop difficile d'aller tourner."

    Tournage à la dure !

    Thomas Bidegain et le chef-décorateur François Emmanuelli ont tourné le film sur des terrains vierges, en Islande (et en Bretagne pour les scènes en mer). Tout ce qui apparaît à l'image a été dessiné, construit et transporté pour les besoins du tournage (par exemple la base baleinière en ruines et la base météo que l’on voit à la fin) : "Il a fallu construire les ruines de la base baleinière, le ponton, etc, ramener dans des endroits reculés des machines qui pèsent des tonnes. Tout cela en s’adaptant à la géographie comme à la météo. Nous avons tourné dans des paysages hostiles où le vent, le froid, le sable qui nous fouettait le visage, tout semblait nous dire "Partez ! On vous accorde trois heures pour faire ce que vous avez à faire mais vous n'êtes pas les bienvenus ici !"", se rappelle le metteur en scène.

    Importance du son

    Dans l'une des premières séquences, on entend une baleine mais on ne la voit pas. Elle est là pourtant, dangereuse et fascinante. "C’est le retour de l’instinct animal. Laura et Ben sont des personnages aux aguets. Ils sont dans l'attente de quelque chose, dans l'attente d'être sauvés. Ils se sentent en danger permanent sur cette île, ils sont donc à l’affût du moindre bruit. Ils guettent toutes les palpitations de l'île. Que ce soit le bruit de la pluie sur la tôle, le ressac de la mer… tout est très sonore. Donc effectivement le travail du son a été primordial pour faire vivre l’île mais, le goût de la nourriture, le froid, les odeurs, dans un film de survie, tous les sens sont convoqués", explique Thomas Bidegain.

    Un film de gestes

    Soudain seuls est un film de geste, un film de bricolage. Rien n’est donné aux deux personnages échoués sur ce territoire hostile : ils doivent tout fabriquer pour répondre à leurs besoins. Tout au long du film, on assiste ainsi à une sorte de retour vers des gestes et des sensations élémentaires. Thomas Bidegain confie : "S’ils veulent manger, survivre, ils doivent d’abord façonner des objets en récupérant toutes sortes de matériaux. Or, ce sont des gens ordinaires, comme vous et moi, pas du tout préparés à ce qu’ils vont devoir affronter. On a fait avec l’équipe déco et les accessoiristes un gros travail autour de ça, pour inventer des outils susceptibles d’être fabriqués par ces deux héros ordinaires. En partant d'objets récupérés."

    "Ils doivent réinventer la bougie, réinventer le harpon, réinventer la canne à pêche. Tout doit être réinventé, comme le couple doit se réinventer à partir de quelque chose qui existe déjà. En débarquant sur cette île, ils sont comme devant une page blanche. C’est pour cela que la caméra est en permanence à leur hauteur. On découvre les choses avec eux, comme eux. On les voit résoudre les problèmes un à un. Il fallait donc toujours penser et filmer à la hauteur des personnages, mais aussi à leur rythme, à leur vitesse."

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