Quitter la nuit est le premier long-métrage de Delphine Girard. Il est le prolongement de son court, Une sœur, réalisé en 2018 et nommé à l'Oscar du meilleur court-métrage.
Le court-métrage Une sœur, qui est le prélude de Quitter la nuit, est inspiré d'une histoire vraie survenue aux États-Unis. La réalisatrice avait découvert par hasard sur Youtube un appel enregistré où une jeune femme avait pu être sauvée grâce à l’intervention d’une opératrice par téléphone.
En faisant des recherches, elle a appris que la jeune femme de la voiture ne s’était pas rendue au procès : "ça m’avait beaucoup déstabilisée. On était à la veille du tournage d’Une sœur et ça a influencé la fin du film, avec l’envie qu’on ne termine pas sur une note complètement rassurante, mais plutôt agitée. Dans les mois qui ont suivi la présentation et les discussions autour d’Une sœur, la suite de cette histoire continuait de m’habiter. Mais si le cinéma est un bon endroit pour le thriller, l’après-coup de l’action m’intéresse tout autant."
La réalisatrice s'est beaucoup interrogée sur la manière de représenter dans son film l'agression, d'un point de vue narratif mais aussi éthique : "On a tellement vu ces scènes de violence envers les femmes au cinéma qui ne sont qu’un prétexte à une érotisation ou qui produisent une sidération totale. J’avais donc à cœur de ne pas montrer le viol. Notre choix a été de montrer comment tout dérape pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur l’aspect violent." Elle souligne : "Montrer le début de l’empoignade permettait d’évacuer le doute, si quelqu’un en avait encore et montre aussi que cette violence, bien que réelle, n’a pas laissé les traces ou preuves tangibles que demandent la justice."
Delphine Girard retrouve Veerle Baetens, qui jouait déjà dans le court-métrage Une sœur. Les deux femmes se sont rencontrées sur le tournage de Duelles où la réalisatrice était coach pour les enfants. Cette dernière se souvient : "Je l’ai ensuite convaincue de jouer dans mon court-métrage car je ne voyais pas quelle autre actrice pourrait me donner accès à une telle intériorité. Pour un personnage qui écoute c’était très important. Lorsque Veerle joue tout son corps change, sa manière de bouger se modifie, c’est très impressionnant. J’ai une admiration infinie pour son éthique de travail et son engagement."
Sans excuser le comportement du personnage de Dary, il fallait montrer qu'il agissait sous le coup de la frustration, subissant une forme d'humiliation et d’injonction à la virilité, comme le souligne Delphine Girard : "Il était très important pour moi que l’on comprenne sans méprise que le moteur de la violence chez lui n’est pas le désir érotique mais la frustration. Avec Guillaume [Duhesme], on se connaît depuis longtemps. Il est également réalisateur et scénariste et son positionnement m’a beaucoup aidée. Guillaume n’essayait pas d’excuser Dary, il a plongé dans l’enjeu de cette violence-là et a complètement assumé d’être celui qu’on questionne."