Je découvre le cinéma de Pietro Marcello avec ce film (bien que Martin Eden me fasse de l’œil depuis sa sortie) et c'est un film sublime qui nous est offert avec L'envol. Déjà il faut parler des acteurs, qui sont tous formidables, notamment ceux qui jouent les personnages principaux : Juliette Jouan et Raphaël Thiéry. Rien qu'à voir leur gueule on croit dans leur personnage. Cet ancien poilu, habile de ses mains, cette jeune femme qui est la paria de son village et qui ne rêve que d'ailleurs. Ils ont la tête de l'emploi... (bon et Yolande Moreau et Noémie Lvovsky sont de toutes façons toujours formidables)
C'est sublimé par la photographie, ce grain qui offre immédiatement un cachet à l'image, par moment on se dirait presque dans la maison des bois de Pialat. Et en même temps on a une caméra très libre, qui donne une image comme on en a (quasiment ?) jamais vue.
Mais surtout Marcello n'abuse jamais, il ne va pas bouger la caméra juste parce qu'il le peut et c'est la même chose avec la musique. Parce que petit à petit le film devient de plus en plus musical et pourtant Marcello sait être dans le silence lorsqu'il y a un moment important, un moment touchant, pour ne pas voler l'émotion au spectateur avec une musique larmoyante. De la même manière il sait poser sa caméra lorsqu'il le faut et ne pas trop en faire.
Bref dès que le film se lance on voit qu'il a quelque chose en plus, par sa mise en scène, par sa photographie, par ses acteurs et immédiatement on est plongé dans cette histoire qui pourrait paraître assez classique, un type rentre de la guerre, il a une fille, sa femme est morte et il doit l'élever. Mais vu que le film n'est jamais dans le pathos, qu'il sait jouer avec les émotions, forcément on s'implique dans ce que l'on voit. Et ce que l'on voit c'est cette petite fille grandir. Et même si leur vie est plutôt triste, Marcello n'oublie jamais de montrer des moments de tendresse, de beauté, d'amusement, ce qui donne au film une certaine légèreté. On ne suit pas les malheurs de Juliette... On suit la vie d'une femme.
L'affiche nous vend une histoire d'amour, le titre l'envol nous laisse présager qu'elle va finir par s'envoler elle aussi avec un beau garçon venu du ciel... Tout le passage avec Louis Garrel est lumineux au possible... et j'aime que le film soit plus subtil que ça, qu'il nous tende une perche pour finalement jouer avec. Et pour ça la fin est très belle. Comme si le réalisateur nous disait : non mais c'est trop facile, c'est pas bien, c'est pas comme ça que ça doit se finir.
L'envol est un beau film, qui a absolument tout pour lui et il me tarde de voir Martin Eden.