Au lendemain de la Première Guerre mondiale, Raphaël (Raphaël Thiéry), un Poilu démobilisé, rentre chez lui, dans un petit village du littoral picard, pour y apprendre que sa femme bien-aimée est morte brutalement en lui laissant une fillette. Madame Adeline (Noémie Lvovsky) l’a élevée et accepte de prendre Raphaël comme homme à tout à faire. C’est entre ce père débonnaire et taiseux et cette mère de substitution que grandira Juliette, en butte à l’hostilité des gamins du village, qu’elle développera ses dons pour le chant et qu’elle tombera amoureuse de Jean (Louis Garrel), un bel aviateur.
"L’Envol" est l’adaptation d’un roman russe, écrit dans les années 20 par Alexandre Grine. S’il n’est guère connu hors de son pays, "Les Voiles écarlates" fut longtemps le livre de chevet de tous les petits Russes. Il racontait l’histoire édifiante d’Assol, une jeune fille, orpheline de mère, à qui on prédit qu’un navire blanc aux voiles « écarlates » lui apparaîtra et l’emmènera au loin.
Pietro Marcello vient de signer une adaptation de "Martin Eden" que je n’ai pas aimée, sans parvenir à décider si c’est la manière du film qui ne m’a pas plu ou le livre qui l’a inspiré, lequel fait pourtant l’objet d’une admiration révérencieuse que je ne partage pas. Il transpose le célèbre roman russe de Grin dans la France paysanne de l’entre-deux-guerres et transforme le Prince charmant de l’héroïne en aviateur tombé du ciel.
On retrouve, dans la forme et dans les thèmes de "L’Envol", la même farine que dans son "Martin Eden". L’image en est granuleuse, parfois décadrée ; le récit fait de grandes embardées avec la chronologie – sans pour autant que les personnages, à l’exception de la jeune Juliette, semblent prendre de l’âge. "L’Envol" fait le grand écart entre plusieurs styles et plusieurs thématiques : roman historique, drame familial, conte féérique, comédie musicale façon Jacques Demy où la charmante Juliette Jouan, qui est aussi musicienne et compositrice, pousse la chansonnette. On se croirait quelque part entre "Le Grand Meaulnes", "Peau d’Âne" et "Le Petit Prince". Mais cette surabondance finit par pénaliser l’oeuvre dont on ne comprend plus très bien le sens et la direction.
Mention spéciale à Raphaël Thiéry, à la trogne incroyable, qui rappelle Baur, Gabin ou Ventura dans le rôle de grand nounours bourru que monopolise depuis dix ans Gregory Gadebois.