Fasciné par son premier long métrage, Love is the Devil, Steven Soderbergh souhaitait que John Maybury réalise le film. Il le contacte mais le jeune cinéaste, peu sollicité par Hollywood ne le croit pas et raccroche. Le producteur n'abandonne pas et réussit à organiser une entrevue à Londres avec son associé, George Clooney, qui scelle leur collaboration.
La maison de production fondée par Steven Soderbergh et George Clooney, Section Eight, ne s'est pas intéressée à John Maybury par hasard. Ils aiment donner leur chance aux cinéastes en marge des studios hollywoodiens comme ils l'ont fait pour Todd Haynes, réalisateur de l'encensé Loin du paradis.
La production envisagea un temps de confier la réalisation à Antoine Fuqua, auteur de Training day et des Larmes du soleil.
Dans le projet original, l'acteur irlandais Colin Farrell devait interpréter Jack Starks.
Le script original du film a été rédigé par Marc Rocco. Il reste crédité pour l'histoire même si le scénario a été réécrit par Massy Tadjedin.
Pour se préparer, John Maybury s'est plongé dans l'univers du cinéma muet qui le rapproche de son passé d'artiste visuel. "J'ai regardé beaucoup de films muets, en particulier ceux d'Erich Von Stroheim, parce qu'il faisait des expériences dans les années 1910-1920 qui restent une énigme pour moi. Je suis issu de l'avant-garde expérimentale anglaise, donc j'ai une grande connaissance d'un cinéma qui n'a aucun impact sur le cinéma traditionnel (...) Je pense qu'on a utilisé de nombreux langages de cinéma dans ce film, j'espère de manière assez progressive, pour que ça n'ait pas l'air maladroit (...) et que les spectateurs ne le remarquent pas".
Le directeur de la photographie John Mathieson a travaillé avec John Maybury sur ses premiers travaux expérimentaux ainsi que sur Love is the Devil. Pris par le tournage du Fantôme de l'Opéra, c'est le talentueux Peter Deming qui est choisi. Il a fait ses preuves pour des films comme Lost highway et Mulholland Drive.
L'actrice Jennifer Jason Leigh a apporté le documentaire Titicut Follies à John Maybury lorsqu'il faisait des recherches. Décrivant les conditions d'emprisonnement de criminels dans un asile psychiatrique du Massachussets, le réalisateur a été époustouflé : "Si vous avez vu Titicut Follies et que vous voyez ensuite mon film, il va ressembler à un camp de vacances. Ce documentaire est le plus brutal, le plus terrifiant et le plus réel de tous les documentaires sur ce type d'établissement".
"Il est superbe, comment ne pas l'apprécier ?", tels sont les propos de John Maybury pour qualifier Adrien Brody. Il poursuit en précisant qu'il "n'est pas l'archétype du premier rôle héroïque, mais il apporte une dimension intéréssante et énigmatique au rôle. On sent une certaine menace ce qui rend les silences du personnage plus riches et plus denses." L'acteur, pour sa part, avait été inspiré par Love is the Devil. Sur le tournage, ce sont les talents artistiques et la créativité du cinéaste qui l'ont marqué : "J'ai appris beaucoup en le regardant travailler", a-t-il déclaré.
Adrien Brody a choisi ce rôle très nouveau pour lui, d'un homme en quête de son identité et de son passé. Il reconnaît que cette idée d'être enfermé dans un asile fut angoissante mais enrichissante : "Ca m'a fait un choc de comprendre que les expériences qu'il traverse peuvent le rendre fou. Je comprends mieux à quel point bon nombre de gens sont impuissants, victimes d'un système qui les contrôle et les empêche d'évoluer (...) Il est possible qu'une grande partie de ce qui arrive à Starks soit ce qu'il voit avant de mourir, sa vie défilant sous ses yeux, des bribes de sa vie passée, ou de la vie qu'il aurait voulu avoir. Mais pour moi, aussi bizarre que ça puisse paraître, Starks doit vivre comme si toutes ces choses étaient vraies".
Adrien Brody a vécu intensément les scènes où il est enfermé dans le tiroir de la morgue. Il parle de lui comme quelqu'un de très introverti : "L'équipe était sympathique mais pas l'état d'esprit dans lequel j'étais ! J'étais confiné dans cette camisole et je demandais souvent d'être laissé seul sur ce lit à roulettes en attendant qu'ils préparent la prochaine scène au lieu de m'extraire de là et avoir une conversation (...) Je pense que c'est important de rester concentré."
L'actrice britannique Keira Knightley a lu le scénario à Dublin, sur le tournage du Roi Arthur. Un jour de congé, elle part à Londres pour rencontrer John Maybury et les producteurs malgré une intoxication alimentaire. Si le réalisateur n'est pas intéressé par cette jeune actrice qu'il juge comme : "une jolie jeune fille intéressante (...) mais rien de plus", elle insiste pour lire quelques passages. John Maybury est bluffé ajoutant avec humour que "son intoxication alimentaire l'a en fait aidée à jouer et à ressembler à Jackie" et lui donne le rôle.
John Maybury a orienté l'actrice Keira Knightley vers différentes sources d'inspiration. Cela allait d'Edie Sedgwick, égérie d'Andy Warhol morte d'overdose à Courtney Love en passant par la langoureuse Marlene Dietrich. Elle s'est également inspirée de la jeune Laura Marano, interprète de Jackie enfant.
John Maybury a décidé que Jackie écoutait beaucoup de musique seule chez elle, à plein volume, et incita Keira Knightley à écouter Jeff Buckley, White Stripes, Nirvana et The Strokes. Installé dans l'appartement en-dessous de l'actrice, il se souvient : "J'avais l'impression de vivre en dessous d'une adolescente bruyante, Keira Knightley aimant danser dans son appartement".
L'actrice Jennifer Jason Leigh interprète le rôle d'un medecin initialement prévu pour un homme. John Maybury a pensé qu'une opposition homme/femme, face à Kris Kristofferson, serait plus subtile.
Par opposition à l'interprétation nerveuse d'Adrien Brody, John Maybury a choisi Kris Kristofferson pour jouer le Dr Becker. Connu pour ses rôles dans Blade et La Porte du paradis, il le définit comme "un héros 100% américain".
Après une première collaboration dans Love is the Devil, John Maybury retrouve son ami Daniel Craig.
Pour John Maybury, les petits rôles sont fondamentaux. Kelly Lynch, la mère de Jackie dans le film, fait écho à sa prestation de junkie dans Drugstore cowboy. De plus, Daniel Craig a été choisi par le réalisateur car il est capable d'interpréter un fou.
The Jacket est le premier film hollywoodien de John Maybury. A cette occasion, il exprime son aversion pour les Oscars sur le site américain about.com : "C'est un tissu de mensonges, ça ressemble à Américan Idol avec tous ces gens sur scène (...) C'était vraiment déprimant de regarder ce programme... spécialement quand le réalisateur d' Un frisson dans la nuit, l'un de mes films préférés, a gagné pour une telle m...e (ndlr, Million dollar baby)." Il poursuit de plus belle sur le choix de la meilleure actrice 2004 : "Tout le monde aurait du gagner excepté Hilary Swank". The Jacket
A la fin du tournage, le film durait 2h50. Certains des producteurs n'étaient pas favorables à ce que John Maybury coupe des scènes au montage mais c'était faire fi de sa ténacité : "Si vous ne pouvez pas raconter une histoire en 90 mns, ne la racontez pas du tout !". leur a t-il répondu. Le message est clair.