Un film très fort, très personnel, très abouti de Breillat, celui où elle développe le plus profondément sa vision d’un féminisme atypique. C’est l’histoire d’une jeune femme , un peu désespérée , au bord du suicide qui décide de dévoiler ce qu ’est la féminité à un homosexuel qu’elle a rencontré dans une boite nuit, et qui lui a accessoirement sauvé la vie . Elle va l’embaucher et le payer, pour lui montrer son intimité intégrale, et exprimer ce que la femme cache habituellement, depuis des millénaires, depuis la nuit des temps. Ce qui fait que la femme a été sous- catégorisée pendant de siècles. Elle essaye de démontrer , le pourquoi de la différence féminine, les rapports hommes /femmes, les ressorts de l’attirance /rejet mutuel, depuis tout enfant ( avec la scène choquante, mais très juste des enfants qui « jouent au docteur » ,de la petite fille qui veut montrer aux garçons, qui l’avait un peu brutalisée, le mystère de la vie, « l’origine du monde » , et l’apparition de cette vulve imberbe , sous un massif de fleurs, est comme une claque dans la figure, comme la première expression obscène du mystère féminin, dune poésie troublante. Et les petits garçons rigolent tous d’un rire jaune, car c’est le début pour eux d’un long cheminement. Ensuite les différentes rencontres de nuit ( 5 séances) avec Rocco Siffredi , tourneront essentiellement autour des menstrues féminines .Des règles, comme élément donneur de vie, par le sang , alors que l’homme ôte la vie par le sang. De gros plans de vulves ensanglantées, et la fameuse scène du tampax dilué dans un verre d’apéritif, sont très symboliques, très belles scènes aussi picturalement ; c’est la vérité, c’est bien filmé, ou plutôt une représentation de la vérité . Très surréaliste aussi, puisque finalement les gens choqués et outrés, ne sont outrés que par la représentation d’un Tampax usagé, comme l’était la « représentation » de la Pipe de Magritte, alors qu’il s’agit en fait probablement d’un verre de jus de fraise. Amira Casar est formidable, elle se livre, à nue , donne beaucoup son corps en offrande , y compris dans une scène d’amour où Siffredi « l’étalon sauvage » la brutalise, on craint pour son petit corps, fragile , blanchâtre et délicat, il fallait tenir le choc, et elle le fait . Même si deux ou trois gros plans de sexe sont assurés par une doublure, toute la performance dénudée de Casar est admirable de dévotion et de courage. Siffredi est bon, et assure bien la prestation que lui demande Breillat, devenant même vers la fin un homme fragile, choqué par cette féminité découverte. Le texte de Breillat est très beau, très bien écrit, on reconnait bien là son talent d’écrivain. Un film extrême et extrémiste, jamais les règles de la femme n’ont été abordés sous cet angle, reconnues, montrées, encensées , comme un élément fondateur de la féminité. Dans la lignée des deux films déjà très réussis : « Une vraie jeune fille » et "Romance X" ,Breillat va encore plus loin et nous donne sa vision si personnelle . Un film majeur, absolument unique .