Séance du soir à Deauville, la présentation de l'avant-première nous a instantanément fait fondre : [attention, petit spoiler] quand on donne la parole au très jeune Giovanni Pucci pour lui demander si le film ne lui avait pas trop fait peur, il répond en souriant : "Non, ça va, parce que l'ogre il est gentil en vrai", et regard à Samuel Jouy... Qui rigole : "Chut, il fallait pas le dire ça !", et le garçon de dire "Oups.", et toute la salle de comprendre, et de s'amuser de ce genre de petits couacs qu'on adore avec les jeunes acteurs. Surtout que celui-ci se défend vaillamment dans ce film d'Arnaud Malherbe, il vaut à lui seul le détour en parvenant à nous faire partager son angoisse dans un décor stressant à souhait. Voici en plus que vient la fine psychologie du personnage, dont on comprend vite qu'il est traumatisé par un abandon du père (violent à ses heures), et que le fameux "ogre" peut aussi se lire comme un pur délire de persécution, l'impossible remplacement du père par un autre potentiellement encore plus dangereux... Vous avez carte blanche pour la lecture de l’œuvre, la fin étant assez ouverte à toutes les interprétations. Ce que l'on a le plus aimé (en plus du jeune Giovanni) est tout le travail sur le son, sur la surdité du jeune garçon (un peu à la Sans un bruit) qui n'entend jamais l'ogre arriver, sur les bruitages gutturaux de la créature qui se mêlent aux craquements de la forêt... On stresse devant des sapinettes, sans même savoir pourquoi, chapeau à l'équipe son. Chapeau également au scénariste, qui a l'intelligence de ne pas nous faire l'éternel coup du "je coupe le son, et je met un coup de klaxon au premier chat qui passe" pour nous faire sursauter bêtement, ici on voit arriver la créature, on subit son approche lente du jeune garçon, et on en transpire d'autant plus... Un sursaut tout de même, auquel on ne s'attendait pas (il y avait encore de la musique... On sent qu'on est vraiment trop habitué aux autres jumpscares silencieux) : "le mec à la fenêtre", qui a fait bondir la salle entière, s'étouffer en criant quelques vieilles dames, et m'a subjectivement fait secouer les mains spasmodiquement. Un grand moment de communion dans la salle. En revanche, on a été franchement déçu par la facilité de la fin, qui laisse tomber tout le mystère pour plonger dans le film de super-héros à hauteur d'enfant "au pouvoir bébête", qui dénote avec le reste. Les effets spéciaux de cette scène ne suivent pas, la résolution facile n'apporte aucune explication, et on ne sait rien de l'avenir du petit garçon et de sa mère... Dommage, car jusque-là Ogre nous avait vraiment plu, mais la fin très simple nous a laissé un goût d'inachevé. Ce qui ne nous a pas empêché d'adorer le casting, les effets sonores, et la mise en scène terrifique à l'ancienne très réussie.