Après les adieux émouvants entre enfants et maman en fin de vie (le déchirant La Famille Hollar), après les monstres qui font peur (les brillants Sans un bruit), John Krasinski mixe les deux : il se frotte aux monstres gentils et aux adieux qui font mal, avec une âme d'enfant et une palette d'émotions qui ne nous ont pas laissé de marbre. Blue et compagnie est une bonne surprise (bande-annonce niaise et mal montée, échos presse parlant d'un film "ultra mièvre"... Des cailloux sans cœur) qui rappelle un dessin-animé (qu'on adorait quand on était gamin) : La Maison de Foster, où un enfant se dévoue pour redonner une famille aux amis imaginaires oubliés, recueillis dans un refuge où Blue (oui, même le nom est identique) est la mascotte qui enchaîne les bêtises. Ajoutez à ce speech ultra-mimi une histoire à la Quelques minutes après minuit qui insuffle beaucoup d'émotions adultes au côté plus enfantin des gags et gentils monstres en tous genres, ajoutez une photo vraiment agréable (la mamie qui danse dans les rais de lumière, le spectacle musical...), ajoutez une seconde partie bien rythmée (la première est vraiment mollassonne, on patiente avant que ça démarre...) et dont le twist a surpris les plus jeunes : John Krasinski ne perd rien de sa sensibilité poétique et touchante, de son œil avisé pour poser sa caméra, et sait très bien s'entourer. On rêve de revoir le film en VO, tant les noms en bas de l'écran au début du film nous ont fait saliver (Steve Carrel, Phoebe Waller Bridge, Emily Blunt...), bien qu'on n'a carrément pas reconnu José Garcia ("Il est cool le doubleur de Blue, je le connais pas... Ah ben si.") ni Mylène Farmer, et que l'ensemble des doubleurs VF est très à l'aise. Ryan Reynolds est impeccable dans son rôle jusqu'au final qui nous a refait dégainer la larme (on n'en dira pas plus pour ne pas spoiler). Vraiment, on venait en s'apprêtant à voir un film "niaiseux et enfantin", on ne s'attendait pas à la touche émotion "à la Krasinski", ce qui nous a le plus plu. Et quand vous descendez les escaliers de la salle en voyant que la fin du générique est dédiée au doubleur du vieil ours, décédé juste après le tournage, et que vous repensez à la très belle scène "du banc face à la mer", qui prend un autre sens, allez, décidément : on s'hydrate bien les joues. La première partie du film met un certain temps à démarrer, les adultes ne sont pas vraiment surpris par le scénario (les chuchotements des tous-petits de notre salle ont dit l'inverse), les gags sont surtout pour les enfants (leur préféré : le running-gag de Blue qui éternue) mais on se rince l’œil sur la mise en scène et la poésie d'un John Krasinski inspiré, et si l'on est un brin sensible : on est (encore) bon pour sortir le mouchoir. Non, Blue, ce mouchoir n'est pas pour toi.