Quelle mini-claque !!
Le film est magnifique, et filme la banlieue d'un point de vue jamais vu jusque-là. La cité Gagarine est déjà chargée d'histoire, inaugurée par Youri Gagarine lui-même, mais surtout chargée humainement d'histoires d'habitants, de familles ayant vécu toute leur vie ici pour certains.
Le gros pari du film était d'allier onirisme spatial et banlieue ancrée dans le réel. Et clairement, la mission est totalement réussie, et même davantage. La maîtrise de l'univers est total, et il est difficile de se dire qu'il s'agit d'un premier film pour le duo de réalisateur Fanny Liatard, Jérémy Trouilh ! C'est visuellement très beau, c'est rempli de poésie, le film nous transporte avec lui totalement en seconde partie, dans cet univers de rêve spatial pour Youri, avec cette métaphore du vaisseau spatial utilisé comme personnalisation de l'immeuble aux briques rouges. Car l'immeuble est véritablement montré comme personnage à part entière du film, il prend vie, de façon onirique et fantastique.
Les différents plans et cadrages sur cet immeuble sont très réfléchis. Et l'aspect banlieue se retrouve finalement en second plan, tellement on accroche et adhère ensuite intégralement à l'univers de Youri.
Le scénario prend un vrai contrepied sur la façon dont est présentée la banlieue habituellement, loin des caricatures, à travers ses personnages principaux. Ici, les dealers, ce sont des français peau blanche, et les rêveurs ambitieux les français d'origine africaine et maghrebine. Pas de violences physiques, seulement de la violence verbale, issue de cet amour que les habitants ont tissé avec cette cité et cette immeuble. Je trouve une nouvelle fois que Lyna Khoudri est fabuleuse. Qu'est-ce que j'aime cette actrice qui apporte vraiment un vent d'air frais et d'authenticité au cinéma français. Elle est ici encore une fois à la hauteur de son rôle, qu'elle joue avec une justesse impeccable.
Le scénario de façon globale, est bourré de bonnes idées, visuellement retranscrites de la meilleure des manières. J'ai juste une frustration car je m'attendais à voir un plan à un moment bien précis, et je pense clairement que les scénaristes ont loupé le coche, avec un élément qui aurait pu servir de plan émotionnel supplémentaire lors de l'éclairage des étages de l'immeuble... En effet, en début de film, lorsque Youri déambule dans l'immeuble, la caméra s'attarde quelques secondes sur un tableau d'affiche sur lequel est taggé "Ici on crève". Lors de la scène d'éclairage de toute la lignée d'étage, moment climax émotionnel du film, je m'attendais tellement à revoir en un seul plan ce tableau d'affiche et ce tag, éclairé par intermittence par l'immeuble, et sur lequel on aurait pu cette fois lire "Ici, on rêve" avec le C qui aurait été supposément barré par Youri durant sa résistance. Je m'attendais tellement à voir cette idée de plan arrivé, que ne pas le voir m'a frustré !! haha Ça m'aurait clairement achevé émotionnellement ^^ Cette séquence étant vraiment magnifique ! Soutenue en plus par la puissance de la musique, qui est aussi l'un des gros points forts du film. La musique est elle aussi personnage à part entière, et accompagne l'univers de rêve, de façon inspirante et inspirée.
Les images en dernière partie de film sont sublimes, avec une très belle photographie et application donnée à la lumière.
Clairement, Gagarine devrait être largement représenté à la prochaine cérémonie des césars, pour moi, à ce jour, c'est clairement un candidat sérieux pour le césar du meilleur premier film. BRAVO !