Depuis 2005, un long métrage tous les 5 ans : Raphaël Jacoulot est un réalisateur qui tourne peu. Pour son 4ème film, il a posé sa caméra dans sa région d’origine, la Franche-Comté, dans une nature magnifique qu’il connait bien, celle du Jura français. En partant de la description du désir de paternité, il a étendu son propos au comportement déboussolé d’un homme qui n’en peut plus de voir ses choix de vie constamment dictés par d’autres.
« L’enfant dont vous rêvez n’existe pas ». C’est ce que s’entendent dire François et Noémie Receveur lors d’un entretien avec une assistante sociale venue visiter leur lieu d’habitation dans le cadre d’une procédure d’adoption. Depuis qu’ils ont fait connaissance, très jeunes, François et Noémie Receveur ont toujours voulu avoir un enfant. Malheureusement pour eux, toutes les tentatives ont été vaines malgré le passage par la PMA. Noémie ne supportant plus les piqures de la stimulation ovarienne, elle a décidé de mettre tout le monde devant le fait accompli en parlant d’adoption au cours d’une réunion familiale, sans même en avoir parlé auparavant avec son mari. Comme, en plus, les conditions économiques difficiles de la filière bois ont fait que Noémie a dû injecter de l’argent personnel dans la scierie qu’ils exploitent tous les deux, devenant de ce fait majoritaire dans une entreprise dont les origines se trouvent dans la famille de François, ce dernier prend conscience une fois de plus qu’il n’a pas de prise sur ses choix de vie, que d’autres décident pour lui : par exemple, cette scierie dont son père lui a donné les clés, avait-il rêvé d’en reprendre l’exploitation, lui qui, certes, aime la forêt et les arbres, mais n’a pas du tout l’étoffe d’un entrepreneur ?
Cet enfant dont il rêve, ou, plus exactement, ce fils dont il rêve, peut-il le trouver par l’adoption ? Son véritable désir n’est-il pas celui d’un enfant dont il serait le père biologique, un fils à qui il transmettrait son amour de la forêt, un fils qu’il appellerait Lucien, en souvenir de son grand-père. Et voilà que, dans le cadre de l’adoption, on lui pose plein de questions sur les raisons de ce désir d’enfant, qu’on lui demande « quand vous vous imaginez avec votre enfant, vous voyez quoi ? ». Des questions qui l’amènent à s’interroger sur lui-même, sur son propre parcours. Et voilà que, dans cette période de doute et d’interrogations, arrive dans sa vie Patricia, une femme venant de la ville, mariée, mère de deux enfants, avec qui l’attirance mutuelle est quasiment instantanée et qui, en plus, se retrouve très vite enceinte.
Par sa façon de nous introduire dans les ressentiments au sein d’une famille, par sa façon de générer une tension chez le spectateur à l’aide d’un certain nombre de détails, il n’est pas interdit de trouver à L’enfant rêvé un certain côté « chabrolien ». Grâce à d’excellents comédiens venant s’ajouter au thème de la paternité, grâce, également, à l’excellence de la photographie, et malgré quelques invraisemblances, "L’enfant rêvé" vient ajouter un maillon marquant à la filmographie de Raphaël Jacoulot.