Après la chute de l’animation « Sahara », Pierre Coré rebondit sur une adaptation live de la bande-dessinée « Le Temps des Marguerite », de Robin et Vincent Cuvellier. Ils nous offrent ainsi un nouveau regard sur l’escapade temporelle, qui se révèle plutôt rafraichissant dans l’ensemble, car le concept arriver bien évidemment à saturation. Il s’agit ni plus ni moins d’une quête d’émancipation, comme pour tout film s’adressant aux pré-adolescents. Mais à l’instar d’aller cueillir d’indépendance même, les héroïnes vont chercher une clé symbolique qui a tout du contraire, à savoir le soutien moral paternel. On découvre alors que ce qui aurait pu être ardemment exploiter pour ses gags agressifs devient un enjeu métaphorique entre le patrimoine et le désir même de combler un manque.
Surfant sur une articulation classique du récit, il n’est pas étonnant de retrouver des références marquantes comme « Retour vers le Futur », « Les Visiteurs » ou encore « La Grande Vadrouille » dans l’ambiance. Le film ne cache pas non plus sa joie en les glissant frontalement dans les dialogues ou dans une mise en scène peu subtile. Sur ce versant, pas de quoi s’enthousiasmer et c’est le principal reproche qu’on peut lui faire, car le fantastique manque de briller à l’écran. En le suggérant seulement, on évite sans doute quelques clichés, mais ce qu’on retient est encore plus anecdotique. Et c’est vraiment dommage, car l’engagement de Lila Gueneau dans la peau de Margot et Marguerite séduit. Son énergie est mise au service du drame familial qu’elles portent toutes deux dans une quête commune. Le conte reste tout de même honorable, malgré ses restrictions, car ni la pédagogie historique, ni le sentiment de réécrire l’Histoire ne viendront nous bouleverser.
Il faut alors relativiser et puiser dans ce qu’il reste, à savoir des personnages secondaires charmants, mais loin d’être ambitieux. La féminité de la tante (Alice Pol) de Marguerite n’est qu’un constat et comme beaucoup d’autres sujets, on y fait trempette pour laisser plus de place à cette quête de la paternité. On finit par y prendre goût, naïvement mais simplement. Un beau-père (Clovis Cornillac) accompagne sa belle-fille dans ses crises, tout comme un camarade de classe, Nathan (Nils Othenin-Girard), qui caractérise et qui caricature toute cette mutation de l’adolescent. Il change d’avis aussi rapidement qu’il change d’apparence ou d’ambition. On ressent toute cette fougue, qui finit par imploser, mais qui saura trouver l’encadrement de personnages adultes, souvent enfantins d’ailleurs. La thématique de l’enfance est donc à double sens, mais le point de vue de Margot et de Marguerite impose des limites qui font parfois tort à une narration qui avance avec facilité.
Ainsi, nous pouvons aisément nous confronter aux problématiques fébriles et maintes fois revisiter dans « L’Aventure des Marguerite » et pourtant, il n’y a pas d’animosité, juste le sentiment de vivre une étape apaisante, celui dont le spectateur a besoin pour relâcher la pression, à l’image de deux héroïnes trop exigeantes et confuses dans leur désir. De même, le réalisateur marche sur une frontière entre le film d’époque et un présent anecdotique, car privilégie l’évolution de ses personnages, mais il manque encore de pertinence et de lucidité afin de rendre l’aventure plus angoissante et colérique, tel un adolescent capricieux et qui se frustre en observant son monde s’agrandir autour de lui.