Sorti en plein cœur de l’été et destiné, selon toute vraisemblance, à un public assez jeune, « L’aventure des Marguerite » n’est pas, sur le papier, un film très excitant. Mais comme on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise au cinéma, et de tomber sur un film qui voit plus loin que le bout de son nez, je lui ai laissé sa chance. Déjà, le long-métrage se suit sans ennui, d’abord parce qu’il a la bonne idée de durer à peine 90 minutes et puis surtout parce qu’il va à 100 à l’heure, enchainant les rebondissements, faisant des sauts de puce entre 2019 et 1942 sans arrêt. Il est présenté comme une comédie pour adolescent et c’est précisément ce qu’il est. Coté humour, le film use (et abuse) du décalage 1942-2019, en installant ses deux personnages dans des situations forcément improbables. Coté forme c’est un film assez ambitieux, avec une reconstitution honorable de la France occupée, des petites cascades, une musique sautillante (mais un peu envahissante). C’est filmé avec honnêteté, sans génie mais sans fausse note. Encore que, on y reviendra, tout est tellement caricatural dans le scénario que forcément, ça rejaillit sur la réalisation, ca surjoue, ça cabotine, ca pousse certaines situations jusqu’à l’absurde et même parfois, malheureusement, jusqu’au ridicule. Pierre Coré fait du mieux qu’il peut avec ses acteurs et son scénario, on peut se montrer magnanime et ne pas lui jeter la pierre. Coté casting, une seule jeune comédienne joue les deux Marguerite, bien entendu, il s’agit de Lila Gueneau et ma foi, elle fait de son mieux. Elle réussit quand même à composer deux personnages différents, la Marguerite de 1942 étant de loin la plus intéressante (et la moins tête-à-claque). La Marguerite de 2019, quant à elle, est une adolescente comme on n’en souhaite à personne, égocentrique et revenue de tout, curieuse de rien et carrément ignorante des choses et des gens qui l’entourent, elle est pénible au bout de 3 minutes de film. On aurait pu espérer qu’un petit séjour dans la France occupée lui mettrait du plomb dans la tête mais on verra que ce n’est même pas le cas ! A coté de Lila Gueneau, Alice Pol et Clovis Cornillac jouent dans un registre qu’ils connaissent par cœur, la jeune ingénue d’un côté, le nounours au grand cœur de l’autre, tout sauf original. Du coup, ils en font trop et c’est dommage. En fait, le problème du casting et du réalisateur, c’est que le scénario fait défaut, et sans bon scénario, tu peux te démener tant que tu veux, tu ne produiras jamais un bon film. D’un coté on a une gamine de 2019 insupportable avec un beau-père qui fait pourtant de son mieux (même s’il est maladroit, au moins il est présent, contrairement à son vrai père qui s’est fait la malle, sans jeu de mot !). Elle débarque en 1942, elle ne connait rien de la Guerre (ce n’est pas au programme, ce qui n’est pas une excuse !) mais on dirait presque qu’elle s’en fiche. Le scénario aurait pu la confronter à la complexité des choses, aux privations, au danger, mais tout semble glisser sur elle. Elle semble regarder ce nouveau contexte comme si elle se retrouvait dans un film ou un roman et ne change pas sa perception des choses d’un iota !
Autour d’elle, le scénario schématise la contexte jusqu’à l’absurde, refusant de parler de « zone occupée » pour lui préférer une étrange « zone interdite », montrant des soldat allemands et des résistant français ridiculement caricaturaux. Et certaines scènes (les moutons, l’avion, Hemingway) sont carrément ridicules !
De l’autre côté, on a une gamine de 1942 qui débarque en 2019, mange des hamburgers, tombe en admiration devant des éoliennes, entraine un copain de collège à la recherche du destin de son père à elle (dans les cimetières militaires par exemple) mais elle cherche sans but. Ce côté-là du scénario semble tourner à vide et se résumer à une course poursuite entre les adolescents et le beau-père de Margot. Là encore, on passe pudiquement sur quelques scènes sorti d’on ne sait où,
le vol de voiture essentiellement (rappelons que les personnages sont censé avoir 12 ans tout au plus !)
. Pris dans on ensemble, le film de Pierre Coré reste terriblement premier degré, pas le moindre début de commencement de hauteur de vue, le film ne dépasse jamais le bout de son nez ! Je me demande si, passé l’adolescence, on peut vraiment se sentir concerné par les pérégrinations de ces deux gamines ?
La facilité avec laquelle elles arrivent à persuader l’une la tante de 1942, l’autre le copain de 2019 qu’elles ont traversé une faille spacio-temporelle, rien que ça ca résume tout. « Un voyage dans le temps ? Ok, pas de soucis, je te crois, et on doit faire quoi pour te renvoyer dans ton époque ? Retrouver la trace d’une personne, c’est ça ? Bon, ben OK, on y va… ». Voilà, ca résume bien…
Ca peut à la rigueur suffire pour un jeune public pas trop regardant, mais passé 15 ans, c’est bien trop faible !