Cinéaste américain né le 1er janvier 1930 à Boston, Frederick Wiseman est diplômé en droit en 1954 à la Yale Law School. Wiseman affirme dès son premier film documentaire, Titicut Follies en 1967, ses principes de base : l’absence d’interviews, de commentaire off et de musiques additionnelles. Le montage, qu’il effectue lui-même, est une étape importante du processus de création de ses films et dure en général 12 mois. Il a réalisé 42 films documentaires qui composent un portrait mosaïque de la société contemporaine, des États-Unis, de la France et de leurs institutions. Wiseman a également dirigé un film de fiction, The Last Letter, en 2002. À Paris, il a mis en scène The Belle of Amherst, pièce de William Luce sur la vie d’Emily Dickinson et deux pièces à la Comédie Française : Oh les beaux jours de Samuel Beckett et La dernière lettre, d’après un chapitre du roman de Vassili Grossman, Vie et destin. Le cinéaste a obtenu de nombreuses récompenses, parmi lesquelles figurent quatre Emmys, un Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière au festival de Venise en 2014, ainsi qu’en 2016, un Oscar d’honneur de la part du Conseil des gouverneurs de l’académie des arts et des sciences du cinéma américain.
Monrovia est une ville américaine d’environ 1400 habitants à une trentaine de minutes de voiture d’Indianapolis. Selon les données de 2016, la ville est composée à 96,3 % de blancs-américains, de 1,4% d'afro-américains, 1,2% d'hispano-américains, 0,6 % d'asio-américains et 0,5% d'autres ethnies.
Frederick Wiseman a pensé qu’un film sur une petite communauté du Midwest aurait toute sa place dans la série de documentaires qu'il a déjà réalisée sur le mode de vie américain contemporain. La ville de Monrovia, dans l’Indiana, lui a paru être un bon choix, pour sa taille (1400 habitants), son emplacement (il n’a jamais tourné dans le Midwest rural) et l’intérêt des habitants pour la religion et l’agriculture. "On parle beaucoup de la vie dans les grandes villes de la côte Est et de la côte Ouest. Ce qui m’intéressait, c’était de découvrir la vie des petites villes américaines et de partager mon point de vue avec les spectateurs."
Frederick Wiseman a fait part de son idée de faire un film sur une petite ville du Midwest à une amie professeure de droit. Elle lui a dit qu’elle connaissait quelqu’un qui enseignait le droit à l’Université de l’Indiana, dont la famille vivait dans la même petite ville depuis six générations. "Je devais justement faire une conférence à l’Université de l’Indiana. J’ai donc pris rendez-vous avec ce professeur de droit avant de quitter Boston. C’est lui qui m’a emmené à Monrovia ; il m’a présenté sa cousine, qui est la directrice des pompes funèbres de la ville. Nous nous sommes vus pour la première fois au cimetière. Elle a accepté de m’aider et c’est elle qui a organisé les rendez-vous avec le chef de la police, le président du conseil municipal, le directeur scolaire du secteur, les patrons de restaurants, et plus généralement avec tous ceux que je voulais rencontrer dans la ville."
Durant les neuf semaines de tournage, les habitants de Monrovia ont été accueillants, aimables et serviables. "Ils m’ont laissé voir tous les aspects de leur vie quotidienne", se souvient Frederick Wiseman. "Une seule personne seulement n’a pas voulu être filmée. Ils étaient contents que je m’intéresse à eux et à leur façon de vivre. Ce qui m’a le plus surpris à Monrovia, c’est le manque de curiosité et d’intérêt qu’ils manifestent pour le monde extérieur à leur ville. Ils vont très rarement à Indianapolis, la plus grande ville de l’Indiana, qui n’est qu’à 30 minutes de là. Je n’ai entendu personne manifester d’intérêt pour ce qui se passe en Europe, en Asie, ou ailleurs dans le monde. Leur monde, c’est Monrovia et ce qui se passe autour. Personne ne parlait de politique, et personne ne m’a demandé ce que je pensais politiquement. Les gens parlent de leur famille, du travail, de religion, de maladies, de voitures, de matériel agricole et de leurs voisins. Lorsqu’ils sont confrontés à un problème, ils tirent des réponses, des analyses littérales de la Bible et de ses variantes fondamentalistes. Aucun scepticisme, pas de doutes."